Dans les rues agitées de Washington, Cal s'arrêta devant le stand d'un vendeur ambulant de hot-dog pour combler son ventre vide par de la mal bouffe interdite par son épouse. Affamé après de longues recherches sur une affaire d'agression, il demanda un supplément de choux sous les yeux effarés du restaurateur qui se demanda comment cet homme pouvait avaler autant de nourriture dans un seul sandwich. Cal paya l'homme puis entendit son portable sonner. Il s'installa sur un banc libre d'un square et par un jeu d'équilibriste, il réussit à tenir son sandwich d'une main et à récupérer son téléphone de l'autre. Il accepta l'appel vidéo en cours et découvrit le visage de son ami Richard Castle qui afficha une grimace à la vue de son ami en train de manger son volumineux sandwich d'une seule bouchée.
— Bon sang Cal, tu ne changeras jamais, lança Richard avec une pointe de dégoût.
— J'me gave avant le dîner de la semaine prochaine chez ma belle-mère !
— Pas bête, rit l'écrivain. Je devrais prendre ton exemple !
— T'as pas de belle-mère toi.
— Non, mais j'ai une femme et elle est très mauvaise cuisinière !
— Pas faux ! J'ai encore le souvenir de son carpaccio qui me remonte aux tripes !
Les deux hommes rirent à cette anecdote commune.
— Alors, que me vaut cet appel New-Yorkais ?
— Abby harcèle tout le monde pour savoir si on vient à la fête d'anniversaire de Gibbs ce week-end. Et on voulait savoir si la famille Lightman serait de la partie ?
— Je ne louperai ça pour rien au monde !
— Tu dis ça à cause de la tradition n'est-ce pas ?
— Tu me connais si bien !
Richard ria jusqu'au moment où il remarqua l'expression de son ami devenir plus soucieuse. Celui-ci venait de recevoir un message sur son portable.
— Un problème ? s'enquit Richard.
— C'est Gill'. Elle a reçu un message de la principale du lycée...
— Laisse-moi deviner, Seth...
— Yep... Ça va faire la troisième fois qu'on reçoit une alerte. Ce gamin va me tuer.
— Il est en pleine crise d'adolescence Cal, n'oublie pas que toi aussi t'as fait des bêtises quand tu étais jeune.
— Ouais, mais je n'ai jamais dit à mes enfants de suivre mon exemple.
— C'est toi alors l'auteur du "faites ce que je dis mais pas ce que je fais" !
— J'croyais que c'était Dieu, mais peut-être que c'était moi.
Richard ria de nouveau et répliqua :
— Je peux essayer de lui parler si tu veux ? En tant que parrain, peut-être qu'il m'écoutera.
— Vu qu'il fait la sourde oreille avec sa mère et moi, peut-être qu'un écrivain qui fait autant de bêtises que lui peut fonctionner.
— C'est vrai que je m'y connais, Kate m'a punis pas plus tard qu'hier pour avoir mis un serpent en plastique dans le tiroir du bureau de Ryan. Si tu avais vu sa tête, c'était tout simplement hilarant ! Quelle était la dernière bêtise de Seth ?
— Il a frappé l'un de ses camarades de classe.
— Oh... je ne m'attendais pas du tout à ça...
— Hmm...
— Rick ! À table, je viens faire du poulet rôtis ! cria Kate à son mari.
Castle ferma ses yeux et dit :
— Prie pour que je sois encore en vie demain...
— La une risque d'être triste ! se moqua-t-il.
— Arrête de rire, je sens l'odeur de la mort d'ici !
— Rick ça va refroidir ! clama Kate.
— Bon, je te laisse... si on se revoit pas, je te donne toute ma collection de vinyle!
— Sans vouloir t'offenser, les boys band c'est pas trop mon genre.
— Le groupe Take That était super connu au début des années 90 !
— Mouais, bon j'te laisse avec ton poulet congelé, repose en paix !
Cal coupa la conversation et froissa le papier de son sandwich pour le jeter à la poubelle.
De retour au Lightman group, Cal marcha dans les couloirs de l'agence puis s'arrêta devant la salle de conférence en apercevant Gillian lui faire signe par la baie vitrée. Après une heure intense de réunion, elle décida de l'ajourner et demanda à ses employés de travailler sur les points les plus importants. Elle récupéra hâtivement ses affaires et rejoignit son mari dans le couloir.
— Cal, tu as reçu mon message ?
Il pouvait discerner l'angoisse dans sa voix.
— Oui, je suis revenu aussi vite que possible.
Gillian convia son compagnon à se rendre dans son bureau pour discuter en détail de la situation. Elle ferma la porte pour plus d'intimité et se retourna vers Cal avec un air inquiet sur le visage.
— Cal, ça va faire la troisième fois que le lycée nous appelle pour Seth. Et cette fois-ci, il s'est battu avec un autre élève ! Je ne sais pas ce qu'il lui arrive. Je ne le reconnais plus. J'ai... j'ai l'impression que la même histoire se répète... Je pensais qu'avec ce qu'il s'était passé avec Nicholas, on avait résolu nos problèmes... mais là...
— Gill', toi et moi on sait que Seth est un bon garçon. Il traverse probablement une mauvaise passe et c'est à nous de le remettre dans le droit chemin. Si on a réussi pour Nick, il va en être de même pour Seth.
— J'espère que tu as raison...
— J'ai toujours raison, dit-il avec un mince sourire.
Elle lâcha un léger rire et répliqua :
— J'espère que Lou' ne nous causera pas plus de problèmes... Jusqu'à présent, son seul caprice était une nouvelle voiture... que nous avons refuser de lui acheter au vu de son prix très élevé...
— Je crois que les garçons Lightman n'ont jamais totalement bien tourné pendant leur période d'adolescence.
— Pourtant, tu t'es plutôt bien rattraper je trouve.
— Parce que j'ai croisé une Foster qui m'a remis sur le droit chemin.
Elle sourit et Cal ancra son regard tendre dans le sien et déplaça une mèche de cheveux qui lui barrait ses yeux bleus.
— On va l'aider, je te le promets.
Ils se serrèrent dans leurs bras puis Cal ajouta :
— Et puis, Rick s'est proposé de jouer les parrains en détresse. Faut juste espérer qu'il ne lui donne pas de conseils pour plus de bêtises.
Elle ria de nouveau et embrassa furtivement son mari. Il avait toujours eu le dont de la faire sourire, même lorsqu'elle traversait des moments pénibles.
— Tu sais que Kate l'a punis ? lui demanda-t-il.
— Je sais, elle m'en a parlé pendant plus d'une heure au téléphone. Une histoire de serpent d'après ce que j'ai compris...
— À quelle heure est le rendez-vous avec la principale ?
— En fin de journée. Cela nous laissera du temps pour voir M. Wyatt.
Cal opina du chef puis Gillian l'invita à le suivre dans la salle d'analyse.
Plus tard, Cal et Gillian partirent pour le lycée de Seth et entrèrent dans le bureau de la principale Simmons. Celle-ci les saluèrent par une poignée de main solennelle puis les invita à prendre place sur les deux sièges en face de son bureau. Elle s'installa à son tour, croisa ses mains sur son bureau et déclara sur un ton protocolaire :
— Madame et Monsieur Lightman, je vous remercie d'avoir fait le déplacement. Je suis désolée que nous nous retrouvions une fois plus pour une malheureuse circonstance. En effet, le cas de votre fils Seth me préoccupe. Comme vous le savez, il a été plusieurs fois convoqué pour diverses infractions au règlement de notre établissement. Tel que sécher les cours ou aux dernières nouvelles, frapper l'un de ses camarades de classe.
— Connaissez-vous la raison pour laquelle cette bagarre a eu lieu Mme Simmons ? l'interrogea Gillian.
— Non Madame Lightman, mais plusieurs témoins affirment que votre fils aurait été le premier à donner des coups. Il a refusé de nous en donner la raison et je ne vois aucune manière de le punir autrement que par une semaine d'exclusion.
Gillian expia son angoisse par un discret soupir puis Cal, jusqu'à présent silencieux, prit à son tour la parole :
— Cela sera-t-il consigné dans son dossier scolaire ?
— Et bien, si Seth admet sa faute et présente ses excuses auprès de M. Scott. Nous ne consignerons pas ce fait dans son dossier scolaire.
— Il le fera.
— Écoutez, je connais Seth. Malgré ses quelques frasques, c'est un garçon intelligent, voir plus que ça d'après ses notes. Il lui est arrivé de transgresser le règlement pour des blagues potaches, mais c'est la première fois que je le vois user de la violence. Je connais le passif de votre famille et l'histoire de votre fils Nicholas. Y'aurait-il eu un événement quelconque dans la vie de Seth qui aurait participé à ce changement d'attitude ?
— Nous avons réglé les problèmes que nous avions eus avec Nicholas, répondit Gillian, et à vrai dire, je ne vois rien qui aurait pu changer son comportement...
— Je vois... Je vous conseil d'avoir une franche discussion avec votre fils afin de lui faire comprendre que s'il venait à continuer sur ce chemin là, son avenir risque d'y être compromis. Et malgré tout, je reste persuadée qu'il est promis à un brillant avenir.
Le couple remercia la principale pour cette discussion puis récupéra leur voiture sur le parking de l'établissement. Sur le chemin du retour, Cal était au volant de la voiture et aperçut du coin de l'œil sa femme arborer un air soucieux.
— Gilly, on va lui parler et tout rentrera dans l'ordre, ok ?
— Il ne nous parle plus Cal... Quand est-ce que tu l'as-tu vu sourire ou rire ?
Cal ne sut quoi répondre, car il est vrai que cela faisait longtemps qu'il n'avait pas vu son plus jeune fils éprouver autre chose que de la colère ou de la morosité.
— Ce n'est pas normal Cal. Seth a toujours été d'humeur joyeuse. Même quand les choses vont mal, il trouve toujours un moyen de voir les choses d'une autre manière. Tu te souviens... quand ils étaient encore petits et que Lou' avait perdu son doudou. Seth avait eu l'idée de lui fabriquer des personnages avec des aliments et...
— Cela avait terminé en bataille de tomates, termina Cal. Je m'en souviens parfaitement, devine qui a dû tout nettoyer après ça.
— Ce dont je me souviens surtout, c'est que Lou' avait ri et que Seth était venu me voir pour me dire que les larmes de sa sœur avaient disparu. Seth a toujours voulu guérir les personnes qui se sentaient mal... Et aujourd'hui, c'est lui qui ne se sent pas bien et je ne sais pas comment faire pour l'aider à aller mieux...
— On va lui parler, certifia Cal avec conviction.
Gillian esquissa un timide sourire puis perdit son regard sur le paysage défilant devant ses yeux.
De retour à la maison, Cal et Gillian voulurent discuter avec leur benjamin mais, au contraire de son frère et de sa sœur, celui-ci n'était pas encore rentrer. Cela inquiéta les parents qui laissèrent plusieurs sms et messages vocaux sur son portable. Lorsque ce fut l'heure de manger, Louise aida son père à préparer le repas, le temps que Gillian termine de mettre la table avec l'aide de Nicholas. Soudain, elle entendit la porte d'entrée claquée et sut que Seth était enfin de retour. Elle l'appela, mais il fit semblant de ne pas l'entendre. Il gravit à toute vitesse les escaliers et claqua la porte de sa chambre. Cal rejoignit Gillian et lui conseilla d'attendre le lendemain pour entamer une discussion. Elle approuva à contre cœur puis le reste de la famille dina en évitant de poser la question sur la raison de l'absence de Seth à table. Après le repas, chacun alla se préparer pour la journée qui allait suivre puis alla se coucher. Dans leur lit, Cal étudia un dossier sur l'affaire en cours alors que Gillian s'installa à ses côtés sans dire un mot. Ressassant les événements passés, elle céda un léger soupir et laissa divaguer son regard sur le plafond immaculé. Cal la vit faire et arrêta son travail pour se concentrer sur sa compagne tourmentée.
— Tu penses à Seth ?
— Hmm... J'essaye de me souvenir à quel moment il a changé...
— Je crois qu'il n'a jamais changé.
Gillian tourna son regard interrogateur sur son mari qui s'expliqua :
— Ce que je veux dire, c'est que Seth est toujours là. Comme tout adolescent de son âge, il a simplement... des émotions qu'il ne comprend pas et des secrets qu'il ne souhaite pas partager avec ses parents.
— Que crois-tu que c'est ?
— J'en sais rien... mais il a sûrement besoin de temps pour le comprendre lui-même et... il va falloir être patient...
Cal invita Gillian à venir dans ses bras et l'embrassa dans ses cheveux.
— Je voudrais tellement l'aider..., souffla-t-elle.
— Je sais, chérie... pour le moment, il faut que tu dormes, demain on lui parlera.
Allongé dans son lit, Seth n'arrivait pas à trouver le sommeil et se sentait oppressé dans l'obscurité de sa chambre. Il alluma l'écran de son portable : 23H. Un besoin urgent de prendre l'air le submergea. Sans réfléchir, il sauta de son lit pour enfiler une veste à capuche et des baskets sous les yeux attristés de son chien couché sur le sol. Par chance, un treillis menant à la fenêtre de sa chambre permit à l'adolescent d'escalader la façade de sa maison et d'atteindre sans problème la terre ferme du jardin. Il passa le portillon et marcha plusieurs mètres avant d'être envahi par une envie de courir. Il enfonça ses écouteurs dans ses oreilles, commença par des petites foulées puis trouva un rythme régulier. Il courut longtemps, jusqu'à se retrouver sur une colline qui portait un point de vue dégagée sur la ville illuminée. D'ici, il se sentit à la fois invincible et minuscule dans cette ville grouillante de vie. Jamais il ne s'était senti aussi seul. Il aurait voulu pleurer, crier sa colère mais rien ne vint. Plusieurs émotions contraires explosèrent en lui sans qu'il ne puisse les comprendre. Tous ses problèmes paraissaient si futiles face à ce monde froid qui semblait ne pas se soucier de ses enfants en perte de repères. Il se demanda qui pouvait l'aider si eux-mêmes ne savaient pas où ils allaient... Il se sentait perdu, désorienté, au bord du vide, comme si l'univers l'avait dévoré. Las et épuisé, il s'écroula sur l'herbe fraîche de la nuit et resta pendant plus d'une heure sur cette dune à contempler les luminaires qui avaient remplacés les étoiles. Il laissa vagabonder ses réflexions en espérant trouver une paix intérieure. Puis au bout d'une heure, il décida qu'il était temps de retourner chez lui, malgré le fait que sa tristesse était toujours présente.
Le lendemain, les deux experts en mensonge retournèrent au Lightman Group afin d'élucider l'affaire de l'agression qui était en cours. Au même moment, Seth tentait de rester éveillé à un cours de math dont il écoutait vaguement les leçons de son professeur. Lorsque la cloche sonna la fin du cours, Seth s'empressa de ranger ses affaires et de quitter la salle pour rejoindre la cour arrière de l'établissement scolaire. Déambulant dans les couloir, il croisa Riley arborant un coquard violacé sur son œil droit et ne put s'empêcher de sourire à ce détail.
— Qu'est-ce qui te fait marrer Lightman? cracha Riley, accompagné de deux de ses amis.
— Ta tronche d'aubergine, répliqua Seth. Dommage qu'on nous a séparés, j'aurai pu ajouter plus de couleurs sur ta face de Picasso.
Il n'en fallut pas plus à Riley pour foncer sur Seth et les faire tomber tous les deux à terre. À ces heurts, un attroupement d'élèves se regroupèrent rapidement autour des deux combattants pour les encourager dans leur lutte. Après quelques coups bien placés, Seth se sentit être tirer en arrière pour l'empêcher de continuer son combat.
— Calme-toi Seth !
L'adolescent reconnut la voix de son grand frère et se débattit dans ses bras pour se libérer de son emprise. Tout ce qu'il désirait c'était retourner à son duel.
— Lâche-moi ! cria-t-il.
— Non ! D'abord je veux que tu te calmes !
— Qu'est-ce qui se passe ici ? clama une voix autoritaire dans la foule.
Nicholas distingua le directeur du lycée se frayer un chemin jusqu'à eux et s'empressa d'emmener son petit frère loin du grabuge dont il était la cause. Trois couloirs plus loin, il poussa Seth dans les toilettes de l'établissement et vérifia qu'ils étaient seuls.
— Nettoie ton visage, tu as du sang sur tes lèvres, dicta-t-il, à son petit frère.
Seth contempla son visage tuméfié dans le reflet du miroir et constata effectivement une blessure ensanglantée au coin de sa bouche. Il ouvrit le robinet et aspergea son visage d'eau pour effacer toutes traces de l'échauffourée.
— Tu peux me dire pourquoi tu t'es encore battu avec cet abruti de Riley ?
Seth se pencha au lavabo et regarda l'état de son visage à travers son reflet.
— Sa tête ne me revenait pas.
— C'est ça ton excuse ?
— Quoi ? C'est pas suffisant ?
— Seth... Qu'est-ce qui t'arrive ? Tu n'arrêtes pas de te battre, tu sèches les cours, tu ne parles plus à personne... Papa et maman s'inquiètent pour toi, tu le sais ?
— Ils devraient pas, j'vais bien.
Seth commença à partir, mais Nicholas lui fit barrage.
— Tu ne peux pas continuer comme ça, déclara très sérieusement Nicholas. J'étais comme toi à une époque, Seth. J'étais en colère et je me battais contre tout et tout le monde, jusqu'au jour où j'ai compris que la seule manière de s'en sortir s'était de parler.
— Sauf que t'oublie une chose, je ne suis pas comme toi, rétorqua-t-il froidement, en quittant rageusement la pièce.
Nicholas regarda Seth partir et soupira longuement en songeant que s'il ne trouvait pas rapidement une solution, son frère risquerait de se retrouver dans des situations périlleuses.
En fin d'après-midi, Cal était retourné à son domicile alors que sa femme était restée au Lightman Group pour effectuer l'interrogatoire d'un suspect. Il gara sa voiture devant le garage et remarqua le vélo de Seth stationné contre le mur de celui-ci. Il rentra chez lui et entendit de la musique à l'étage. Reconnaissant un air du groupe des Jam, il sut qu'il s'agissait de son plus jeune fils. Il s'apprêta à aller le voir pour avoir une conversation posée sur les événements passés, mais lorsqu'il reçut sur son smartphone un mail du lycée l'informant que Seth avait une nouvelle fois attenté une bagarre contre un élève, une colère fulgurante balaya tout ce qu'il pouvait lui rester de calme. Il s'empressa d'aller le rejoindre et frappa à la porte de sa chambre pour l'avertir de sa présence.
— Seth, c'est moi, il faut que je te parle.
— Deux minutes ! scanda-t-il, derrière la porte.
Cal patienta, entendit du mouvement s'opérer puis après quelques secondes Seth autorisa enfin son père à entrer. Celui-ci découvrit l'adolescent nonchalamment étendu sur son lit avec une BD entre ses mains, puis afficha un léger air de suspicion lorsqu'il discerna chez lui une respiration irrégulière. Il ne s'en formalisa pas et présenta à son fils le mail à charge le concernant :
— Tu peux m'expliquer ?
Affalé sur son lit, Seth afficha un air d'incompréhension.
— Ne joues pas à ça avec moi Seth, répliqua sévèrement son père. C'est un mail de ta principale de ton lycée. Elle dit que tu y es exclu pour deux semaines parce que tu t'es battu avec un élève ! Et que tu aurais récidivé aujourd'hui !
— Il l'avait mérité…
— D'avoir cassé son nez ?
Seth ne répondit pas. Cal inspira et reprit:
— Je veux bien passé l'éponge sur quelques blagues de casiers collés avec de la glue ou de bombes à eau jetées des toits, mais ça, je ne l'accepterai pas ! Je ne te reconnais plus Seth.
— Peut-être parce que tu ne me connais pas, marmonna-t-il.
— Quoi ? Tu peux répéter ? réclama-t-il, sur un ton exaspéré.
— Tu ne me connais pas ! répéta plus fortement l'adolescent.
— Qu'est-ce que tu veux dire ?
Seth garda une fois de plus le silence.
— Tu ne veux rien me dire ? Il va pourtant le falloir. Dis-moi pourquoi tu t'es battu ?
Le jeune homme refusa de répondre. Il contracta ses tempes à plusieurs reprises et détourna son regard de celui accusateur de son père. Cal remarqua que celui-ci avait étrangement dévié plusieurs fois vers sa housse de guitare. D'un froncement de sourcils, il prit l'initiative de s'en approcher et capta l'augmentation de nervosité de son fils à sa simple proximité. Suivant son intuition, il fouilla la housse et trouva avec une grande fureur un petit sachet de cannabis.
— Tu te fous de moi Seth ? s'écria t-il, en agitant le sachet. Depuis quand tu prends cette merde ?
— Tout le monde en prend ! répliqua-t-il avec exaspération.
— Pas sous mon toit !
— J'ai une photo de toi qui prouve le contraire !
— Tu me réponds maintenant ? s'indigna-t-il. Crois-moi que tu vas avoir de sérieux problèmes jeune homme !
— C'est marrant quand c'était Nick, tu ne disais rien et avec moi tu lâches les chiens ? Chez moi, j'appelle ça du favoritisme !
— Ce que tu appelles du favoritisme, j'appelle ça rectifier ses erreurs. Je n'ai pas été là pour ton frère et je le regrette chaque jour. Alors, crois moi quand je te dis que j'vais pas te lâcher ! Comment t'as eu ça ?
Seth s'obstina dans son mutisme, un comportement qui agaça fortement Cal.
— C'est pas en gardant le silence que j'vais abandonner. Je ne vais pas en rester là, crois-moi ! T'es privé de sortie jusqu'à nouvel ordre. Pas de jeux vidéos, ni de portable ! Les seules choses que tu auras le droit de faire c'est d'aller en cours et faire tes devoirs !
— Quoi ? Mais...!
— Y'a pas de mais qui tienne ! Tu te comportes comme un gamin, je te traite comme tel ! Et n'essaye pas d'amadouer ta mère, elle est d'accord avec moi.
— S'te plait, ne le dis pas à maman pour l'herbe. Je veux pas la faire souffrir...
Cal quitta furibond la chambre de son fils et cracha en claquant sa porte :
— Fallait y penser avant !
Seth jeta rageusement sa BD à travers la pièce, poussa un long soupir et s'écroula désespérer dans son lit.
Plus tard, Gillian téléphona à Abby pour confirmer leur venue pour la grande maison, un lieu de rassemblement pour le groupe d'amis, afin de participer à l'anniversaire de leur ami Gibbs. Après quoi, Cal profita que leurs enfants étaient occupés dans leur chambre pour lui révéler ce qu'il venait de découvrir dans la chambre de Seth. Sous le choc, la mère ne formula pas le moindre mot sur cet aveu sans précédent. Cal voulut approfondir la discussion, mais l'heure du dîner ameuta leurs enfants affamés au rez-de-chaussée, excepté Seth qui préféra une fois encore ne pas participer au repas de famille. Après le dîner, Gillian débarrassa la table avec l'aide de son compagnon qui avait remarqué son air peiné depuis la révélation sur leur plus jeune fils. Une assiette à la main, l'expert en mensonge se dirigea jusqu'à l'évier afin d'y mettre le couvert sale.
— Chérie, je sais que cette histoire avec Seth te tourmente mais...
— Il y avait de la drogue dans sa chambre Cal ! le coupa-t-elle, avec agacement. Je... Je suis sa mère comment je n'ai pas pu m'en rendre compte !
— Je sais que ce que je vais te dire ne va pas te plaire, mais c'est un adolescent et ils sont les pros du mensonge. Et puis... Tu sais, il m'est aussi arrivé de fumer de l'herbe quand j'étais jeune et... aujourd'hui je fonctionne à peu près normalement, je te l'accorde.
— Ne minimise pas ses actes Cal, répliqua-t-elle, irritée.
— Ce n'est pas ce que je suis en train de faire. Je dis simplement qu'il n'a pas sombré dans le côté obscur. Il est juste... perdu.
— Pourquoi a-t-il fait ça ? La plupart des jeunes qui en prennent c'est pour fuir la réalité. Je ne vois pas ce qu'il cherche à fuir.
— Tu sais aussi que certains en prennent juste pour s'amuser.
— Seth n'est pas du genre à suivre le troupeau.
— C'est vrai, il préfère le disperser, répliqua quelque peu amusé Cal.
Une réplique qui amusa Gillian et qui détendit l'atmosphère appesanti.
— Gilly, reprit Cal, je sens que Seth à envie de se confier, mais ce qu'il cache semble bien plus complexe que nous le pensons. Seth à parfois besoin de temps pour dire ce qu'il ressent et... Sur ce point là, il te ressemble beaucoup. Je crois que la seule manière pour lui de nous dire ce qu'il ne va pas, c'est de lui parler sans l'incriminer.
— Je suis d'accord avec toi. J'ai juste peur... qu'il se renferme un peu plus et qu'il fasse comme... Nick. Je ne veux pas le voir souffrir, Cal.
— Moi non plus et on va tout faire pour. D'accord ?
Gillian hocha la tête puis Cal l'embrassa avant de poursuivre son nettoyage.
Le soir même, Seth fit de nouveau le mur et courut jusqu'à cette colline qu'il avait autrefois gravie. Il sentit ses poumons brûlés, mais il continua à fournir encore plus d'efforts pour atteindre le sommet. Une fois en haut, il reprit son souffle, son coeur cogna à tout rompre dans sa poitrine, son sang battit dans ses oreilles, puis ne pouvant plus contenir sa rage, il hurla. L'incompréhension, la tristesse, la solitude. Tout lui semblait que mensonge et cruauté dans ce soit disant royaume qu'on appelait civilisation, où personne ne méritait son trône. Injustice était pour lui le mot qui résumait ce qu'il voyait et ressentait envers ces Hommes égoïstes dépourvus de sentiments et de raisons. Des êtres qui pour la plus part ne faisaient que fouler cette terre sans prendre en considération ceux qu'ils côtoyaient. Il se demanda s'il était le seul à avoir cette pensée puis balayant ces amères réflexions, il rebroussa le chemin à la lueur de la lune pour retrouver sa maison.
Le jour suivant, la famille Lightman se prépara à partir pour un week-end de détente à la grande maison. Chacun prépara sa valise puis Cal les rangea une par une dans la voiture. Il s'apprêta à récupérer le sac de Seth, mais celui-ci préféra le mettre de lui-même sur la banquette arrière à ses pieds pour laisser de l'espace dans le coffre pour son chien. Le père regarda son fils entrer dans la voiture avec colère et ferma le coffre avec un soupir d'exaspération lorsque Punk prit sa place. Gillian arriva à ce moment là et posa une main tendre sur son bras pour lui signifier que se mettre en colère n'allait rien arranger.
— Em' nous rejoins là bas ? demanda Nicholas, en ouvrant la porte arrière.
— Oui, répondit Gillian, c'était plus pratique pour elle de partir de l'université.
Nicholas hocha la tête et entra dans la véhicule avec sa sœur. Gillian s'installa derrière le volant alors que Cal prit place sur le siège passager. Prêts à partir, la conductrice enclencha le démarrage de la voiture et s'engagea sur la route. Durant le trajet, elle regarda dans son rétroviseur Nicholas et Louise discuter en riant puis elle tourna son regard sur Seth qui, le visage fermé, regardait le paysage défiler en écoutant de la musique avec ses écouteurs. Cela l'attrista jusqu'au moment où elle sentit une tendre pression sur son bras. C'était la main de son mari qui lui signifiait sa présence. Elle esquissa un sourire puis continua de se concentrer sur sa route. Après une heure de trajet, ils arrivèrent à destination et remarquèrent aux abords de la maison des voitures déjà stationnées, présageant que bon nombres de leurs amis étaient déjà arrivés. Gillian se gara entre un 4X4 et une voiture de collection et devina que les Booth et les Jane devaient être sur les lieux.
— Tient, il y a la voiture de Em', informa Cal.
— Génial ! s'extasia Louise, en sortant rapidement du véhicule avec Nicholas.
Seth fit de même, mais avec beaucoup moins d'entrain.
— Je sens que cela va être un long week-end, soupira Gillian.
— Ça va le détendre, la rassura Cal, avec un sourire.
— Espérons-le, dit-elle, en quittant à son tour la voiture avec son mari.
Une fois dehors, le couple regarda avec joie Emily prendre Louise et Nicholas dans ses bras. Elle remarqua au loin son père et Gillian et s'empressa de venir à leur rencontre pour les embrasser. En retrait, Seth regarda la scène avec contrariété.
— Seth ! Ça va ? dit-elle, en prenant joyeusement son petit frère dans ses bras. Celui-ci esquissa un léger sourire puis se détacha de sa sœur sans dire un mot. Emily ne s'en préoccupa pas, caressa tendrement Punk, et demanda au couple :
— Vous avez fait un bon voyage ?
— Comme d'habitude, répondit Gillian souriante, un peu de bouchons sur la sortie de la capital, mais sinon aucun problème !
— Tant mieux ! Pratiquement tout le monde est déjà arrivé ! Je sais pas si oncle Leroy va apprécier ça, mais il aura beaucoup de cadeaux !
— Peut-être qu'on aura enfin le droit à un sourire de sa part sur les photos, répliqua Cal.
Emily ria alors que Gillian réprimanda son compagnon de sa mauvaise blague. Chacun récupéra son sac dans le coffre puis entra dans l'immense demeure pour les déposer dans leur chambre respective. Après quoi, la famille Lightman rejoignit leurs amis dans le jardin arrière pour saluer la trentaine de personnes qui venaient de faire le déplacement pour participer à l'événement. Tables et chaises avaient été sorties spécialement pour un pic-nique extérieur. Pendant que certains mettaient le couvert, d'autres terminèrent de préparer le repas dans la cuisine. Heureux, Punk profita du grand espace pour courir dans tout le jardin. En amenant des plats, Cal vit les jumeaux Reece et Jake Castle chahuter prêt des flûtes de champagne et les sermonnèrent :
— Les garçons ! Si je vois une seule flûte de champagne à terre, je vous jette dans le lac !
— Oui oncle Cal ! dirent en cœur les deux adolescents, en arrêtant leur course poursuite avant de la reprendre aussitôt lorsque l'expert en mensonge n'était plus dans leur champ de vision.
— Je sens que le gâteau ne va pas faire long feu, souffla Teresa, en voyant les jumeaux Castle en pleine bataille de grains de raisins.
Aidant Teresa à mettre le couvert, Kate suivit le regard de celle-ci et prit ses fils en flagrant délit de bêtises juvéniles.
— Reece, Jake ! arrêter ça toute suite ! s'écria-t-elle.
Les jumeaux s'arrêtèrent aux cris de leur mère jusqu'au moment où un grand homme brun les attaqua avec des cacahuètes.
— Non mais je rêve ! s'exclama-t-elle, en reconnaissant son mari. Rick qu'est-ce que tu fais ?
— Bah euh... les cacahuètes vaut dix point... alors..., bredouilla l'écrivain, avec une une poignée d'arachides dans la main.
— Arrêtez ça toute suite et aller chercher la salade !
— Oui madame..., marmonnèrent les trois Castle, en trainant des pieds jusqu'à la maison jusqu'au moment où ils reçurent des projectiles de tomates cerises sur leur tête.
— 20 points ! s'écrièrent deux jeunes filles hilares.
— C'est pas vrai, Lily et Alexis s'y mettent aussi..., soupira Kate complètement désespérée.
— Laisse-les Kate, ils s'amusent, dit Samantha, en pliant des serviettes en papier pour chaque convive.
— On voit que tu n'as jamais essayé d'enlever des taches de tomates en plus de mayonnaise sur des vêtements !
Sam et Teresa rirent à cette remarque et continuèrent de placer le couvert sur les tables.
Les préparatifs terminés, tout le monde s'était réuni autour des tables et commencèrent le festin dans la bonne humeur.
— 60 ans Leroy ! s'exclama Cal pour son ami en bout de table. Ça va en faire des bougies sur ton gâteau, t'as pas peur qu'il s'effondre !
— Ça ne risque pas d'arriver, renchérit Jack O'Neill, ça sera un gâteau en béton comme la machine qu'il est ! Et ne vous moquez pas de lui, je vous signale qu'on a le même âge...
— Le mystère est levé ! clama House, en se servant généreusement d'haricots-vert. Gibbs est en réalité un homme-machine venu du futur, c'est pour ça qu'il ne montre aucune émotion. Dis moi, tu marches à l'essence ou au sans plomb ? Non, parce que je me suis peut-être trompé pour ton cadeau...
Gibbs leva ses yeux au ciel sous les rires hilare de ses amis masculins.
— Rhoo vous ne pouvez pas le laisser tranquille, les réprimanda Kate. C'est son anniversaire je vous le rappel !
— Bah oui, Kate ! répondit House. Quoi de mieux que des railleries sur son âge de la part de ses meilleurs copains pour le féliciter de sa longue traversée !
— C'est vrai, surtout que House pourra toujours te prêter sa canne lorsque tu en auras besoin ! répliqua Richard.
— Ha-ha très drôle, fit House, avec sarcasme. Si ça ne te dérange pas, je préférais la garder pour faire des croches pattes à des écrivains qui se croient aussi amusant que notre ministre de la santé qui promet plus d'employés pour nos urgences ! Je te laisse deviner qui est le plus drôle des deux... Petit indice l'un gagne mieux sa vie que l'autre.
Richard s'était rembruni à cette attaque personnelle alors que tout le monde s'était mis à rire à ses dépends. Au cours du repas, Gillian partagea diverses anecdotes avec ses amis puis tourna son regard sur Seth pour voir si celui-ci s'était détendu. Malheureusement, l'adolescent gardait toujours cet air renfermé depuis qu'ils avaient quitté leur domicile et semblait refuser toute discussion avec ses amis. Au moment du dessert, Mac Taylor et Horatio Caine amenèrent deux gâteaux décorés de glaçage avec les mots "Joyeux Anniversaire Leroy" et de trente bougies sur chacun d'eux. L'ensemble des invités chantèrent en cœur la célèbre chanson "Happy Birthday" qui se conclut par une bruyante ovation.
— Allez Gibbs souffle tes bougies ! scanda Abby.
— Si tu t'évanouie, mets ta tête dans le gâteau, ça t'évitera une commotion ! ajouta House. Demande à Wilson si tu ne me crois pas !
— Je te signale que c'était toi qui m'avait mis ma tête dans le gâteau à mon dernier anniversaire, jasa Wilson.
— Fantastique journée ! confirma House tout sourire.
Gibbs esquissa un rictus et prit une grande inspiration avant de souffler sur toutes les bougies qui s'éteignirent sous les applaudissements de ses amis.
— Besoin d'un masque à oxygène ? demanda House à Leroy.
— C'est toi qui en aura bientôt besoin si tu continues, répliqua Gibbs, en découpant un morceau de son gâteau pour le gober entièrement.
— O-k, je vois que la vieillesse te rend plus aigri que d'habitude...
— Qui veut du gâteau au chocolat ? proposa Mac, en voyant plusieurs mains qui se levèrent.
Après avoir manger du gâteau, Dinnozo se leva avec un verre de champagne et déclara :
— J'aimerais porter un toast à l'homme qui m'a offert plus de frappes sur la tête qu'il y a de bougies sur ces gâteaux ! Plus sérieusement... tu es le meilleur patron qui m'ait été donné d'avoir et... j'espère être encore là lorsque tu dépasseras la centaine!
— Et moi, ajouta House avec un verre à la main, j'espère que tu garderas encore dans vingt ans cette coupe de cheveux pour comparer ton vieillissement sur les photos !
Sans s'y attendre, le médecin reçut un morceau de gâteau sur son visage, faisant éclater de rire toute l'assistance.
— Je vois, vraiment très adulte Gibbs, marmonna House, alors que Leroy afficha un sourire.
— Allez-y prenez le en photo, il sourit ! s'exclama Richard, alors que Abby s'empressa de prendre une photo de l'agent du NCIS pour capturer ce moment inédit. Au bout d'un moment, Patrick proposa de donner les cadeaux à l'homme du jour, qui fut d'abord très circonspect lorsqu'il reçut un lave vitre pour voiture de la part de Monk. Le détective expliqua avec embarras qu'il trouvait toujours sa voiture de fonction sale en raison de ses missions pour le NCIS et qu'il en faisait des cauchemars répétés. Gibbs eut aussi le droit à des outils de menuiserie de la part de la famille Jane, un nouveau roman écrit par Temperence, des tickets de foot de Seeley, des tickets de Monster Truck de House, des chemises de la famille Castle, de la bière du Minnesota de la part des O'Neill, des dvd de la part de Dinnozo, des vinyles de Rock et Jazz des Lightman et une superbe canne à pêche de la part des Shepherd. Entouré par une avalanche de cadeaux, Leroy ne sut pas quoi dire à part un merci général à tous ceux qui avaient fait le déplacement. Sur quoi, Richard s'était levé avec d'autres garçons pour dire qu'ils avaient une autre surprise pour lui. Craignant le pire, Leroy avait plissé ses yeux de suspicions lorsque le groupe composé de Jack, Cal, Patrick, et Richard l'avait entouré et soulevé avec sa chaise pour le transporter jusqu'au ponton du lac afin de le jeter à l'eau.
— Désolé Gibbs, mais c'est la tradition ! s'exclama Patrick amusé, en regardant son ami nager sur place tout en fusillant ses amis du regard.
— J'peux aller te chercher ta nouvelle canne à pêche pour te sortir de l'eau ! proposa Derek, rieur.
— Et moi la raclette de Monk pour essuyer toute cette eau ! renchérit House.
En réprimande, Gibbs jeta une vague d'eau sur la bande qui éclata de rire avant de nager jusqu'au bord de la rive pour sortir de l'eau.
— Tu veux de l'aide oncle Gibbs ? proposa William Jane, en tendant la main à l'agent du NCIS.
— Mauvaise idée, Will', l'avertit son père alors qu'il avait vu un fin sourire se dessiner sur ses lèvres de Leroy.
Et en effet, une seconde plus tard le jeune Jane se retrouva dans le lac avec le farceur sexagénaire.
— Je te l'avais dit fiston ! ria Patrick.
— L'expression c'est pas tel père tel fils ? demanda House, avant de pousser Patrick dans le lac.
Patrick retourna à la surface de l'eau et passa une main sur son visage mouillé avant de s'exclamer :
— T'as de la chance que j'ai déjà trois costumes de ce genre dans mon placard !
— Tout le monde à l'eau ! cria Reece et Jake, en courant sur le ponton pour sauter dans le lac avec tous les autres adolescents.
De l'autre côté du jardin, Gillian regarda rieuse ses amis et le groupe d'enfants s'amusés dans l'eau jusqu'au moment où elle remarqua que Seth ne participait pas au jeu. Elle le chercha du regard et remarqua que l'adolescent s'était isolé dans un coin du jardin.
— Il y a un problème avec Seth ? demanda Teresa à son amie. Il me semble étrange depuis qu'il est arrivé...
— Seth traverse une période difficile, avoua Gillian, et je ne sais plus trop quoi faire pour qu'il me parle.
— Christine a aussi eu sa période, dit Tempérance.
— Et qu'est-ce que tu as fait ?
— Oh, je l'ai invitée à une conférence de deux heures sur l'anthropologie à Vancouver ! Et elle a adoré !
— Heu... bien que Seth aime les films d'horreur, je crois pas que cela fonctionnera... Temp'.
— Mais Temp' n'a pas tout à fait tort Gill', ajouta Kate, tu pourrais toujours faire quelque chose qui lui plait et peut-être qu'il s'ouvrira plus à vous.
— Peut-être... j'essayerai. Merci les filles, dit Gillian avec un chaleureux sourire.
Alors que la bataille d'eau allait de bon train dans le lac, Nicholas décida d'aller chercher son petit frère pour qu'il participe à la fête. Il le trouva assit sur les marches de la terrasse et l'interpella avec un air enjoué :
— Hey Seth, tu viens ? Tout le monde est en train de jouer dans le lac !
— Non merci.
— Pourtant, y'a oncle Rick qui est en train de poursuivre Patrick dans l'eau ! C'est hilarant, on dirait deux anguilles dans l'eau! Allez viens !
— Je t'ai dit non ! répéta plus durement Seth. Je suis très bien ici.
— Très bien..., fit Nicholas avec désappointement. Si passer ton temps à faire la tête te comble, j'vais pas te gêner.
— Désolé de ne pas avoir de quoi sourire, ma vie n'est pas aussi parfaite que la tienne !
Nicholas réprima sa colère par un sourire contrarié et répliqua :
— Ok, c'est quoi ton problème ?
— Mon problème, c'est que t'es toujours là alors que j'ai rien demandé !
— Écoute, je suis venu te voir parce que je croyais que t'avais envie de passer du bon temps, mais si c'est pour jouer les cons t'aurais peut-être pas dû venir à une fête d'anniversaire.
— Les parents m'ont obligé de venir !
— Ils t'y ont obligé parce qu'ils pensaient que ça te ferait du bien et que ça te changerait les idées, au vu de toutes les conneries que tu n'as pas cessez de faire ces dernières semaines ! D'ailleurs, ça serait pas mal que t'arrête tes bagarres au lycée, où tu vas finir par y être exclu pour toute l'année ! C'est ça que tu veux ? Fumer de l'herbe toute ta vie et quitter le lycée sans avoir de diplôme ?
— T'es pas mon père ! s'exclama Seth agacé, en se levant d'un bon pour faire face à son grand frère.
— En effet, je le suis pas, mais crois pas qu'il va te laisser t'en tirer qu'avec des petites punitions.
— C'est vrai que toi tu as eu l'droit à une voiture, comme quoi certains on des passes droits !
— Qu'est-ce que t'as Seth ?
— Rien fiche moi la paix !
— Non ! Dis-moi c'est quoi ton problème ?
— C'est toi mon problème !
— Quoi ?
— Le fils parfait ! Le fils chéri !
— T'es en colère contre moi ? C'est pour ça que tu fais tous ces trucs débiles ?
Seth ne répondit pas et contracta ses tempes de rage.
— Sérieusement ? Tu fais souffrir maman et papa juste parce que tu crois que les parents me préfèrent à toi ? T'es vraiment un imbécile, tu le sais ça ?
— Va te faire voir !
Ne se contenant plus, Seth fonça sur son frère et provoqua une violente bagarre. Punk rejoignit les combattants et aboya pour les séparer. Alerté par les cris, Mac arriva sur les lieux et sépara les deux frères en plein combat.
— Hey ! Qu'est-ce qui vous arrive tous les deux ?
Seth tenta de se dégager de son emprise, mais s'immobilisa lorsqu'il vit son père arriver à grands pas vers ses fils.
— Je peux savoir ce qu'il se passe ? exigea-t-il sévèrement.
— Ils se battaient, expliqua Mac. Apparement Seth s'est jeté sur Nicholas.
— Pourquoi ? demanda le père à ses enfants qui refusaient de répondre. Très bien, Nick va avec les autres, Seth tu vas dans le bureau du rez-de-chaussée, ta mère et moi on va t'y rejoindre.
Taylor libéra Seth qui fit volte-face à sa famille pour rejoindre la pièce dictée par son père. Celui-ci rejoignit Gillian pour l'avertir de la situation et allèrent tous les deux retrouver leur fils dans le bureau du rez-de-chaussée pour mettre les choses au clair. Il ne pouvait plus continuer ainsi. Dans le bureau, Cal regarda son fils se contrôler pour ne pas exploser et donna un coup de pied dans une chaise en lui ordonnant sèchement :
— Assis-toi, fiston.
Le jeune homme obéit à contre cœur. Les deux parents se tenaient, côte à côte, adossés contre le rebord du bureau et dévisagèrent leur petit dernier avec les bras croisés contre son corps. Il avait le visage fermé et le regard fixé sur ses pieds. Un langage non-verbal particulièrement révélateur sur ses futures intentions. Il allait être difficile de faire la conversation, mais cette fois-ci Cal n'allait certainement pas le ménager.
— Ta mère et moi on a parlé à ta principale, débuta Cal. Elle nous a dit qu'un témoin lui avait révélé que Riley t'avait provoqué lors de la première bagarre, mais il a refusé de lui en donner la raison.
— Quand ça vient d'un autre, tu le crois…, marmonna-t-il avec véhémence.
— Attention, ne commence pas mon grand ! ragea Cal.
— Cal, le tempéra Gillian. Seth, Mme Simmons nous a dit que nous devions te parler pour comprendre la raison de ton geste…
L'adolescent resta silencieux.
— Seth, on s'inquiète beaucoup pour toi, s'attrista sa mère. On voudrait comprendre ce qui ne va pas…
— Depuis quand vous vous intéressez à moi, lâcha-t-il, avec insolence.
— Hé sur un autre ton jeune homme ! l'avertit sévèrement Cal.
— Qu'est-ce que tu veux dire par là, Seth ? s'inquiéta Gillian.
— J'suis l'oublié de la famille ! s'emporta-t-il. Le dernier ! Le looser ! Celui né après Abel et Caïn ! Après le fils légendaire ! Parfait en sport, parfait en étude, parfait avec… les filles ! Le fils parfait !
— Quoi… on a jamais pensé ça… Ton père et moi nous n'avons jamais fait de distinction avec ton frère et tes soeurs. Nous t'aimons de la même manière et…
— Je ne vaux rien ! s'écria-t-il furieusement.
— Seth…, fit Gillian attristée, en posant une main tendre sur son visage perturbé. Je t'en prie parle-nous mon chéri, on peut t'aider…
— Comme pour Nick…, siffla-t-il, en se levant pour s'éloigner de sa mère.
C'était une remarque extrêmement blessante. Gillian en fut particulièrement touchée et ne trouva plus les mots pour continuer cette discussion. De là, Cal s'empressa de se mettre à hauteur du visage de son fils pour rageusement répliquer entre ses dents :
— Tu veux faire du mal à quelqu'un, vas-y défoule toi sur moi, mais pas sur ta mère ! T'as compris ?
Seth ne répondit pas.
— J'te demande si tu as compris ? répéta Cal plus fortement.
Tétanisé, Seth hocha lentement la tête.
— Bien..., dit-il plus posément, on commence enfin à dialoguer.
Le père se redressa et plaça ses mains dans les poches de son jean.
— Pourquoi t'as pris de l'herbe ?
— Je… Je n'en avais besoin…, bredouilla-t-il.
— Pourquoi ? insista Cal, en déplaçant son regard sur le visage de son fils afin de capter la moindre trace de mensonge.
— Pour me sentir bien. Être quelqu'un d'autre…
— Qu'est-ce qui se passe ? Tu n'as jamais eu besoin de ça, tu n'es pas comme ça Seth.
— Comment peux-tu savoir qui je suis ! s'emporta-t-il encore. Je ne le sais même pas moi-même !
— Tu es notre fils…, répondit sa mère peinée.
— J'aurai aimé ne pas l'être, répliqua-t-il, sans dénier regarder les expressions blessées de ses parents.
Il savait que ces paroles étaient des plus blessantes, mais il n'avait pas réussi à ravaler ses mots. Tout ce qu'il voulait c'était qu'on le laisse tranquille, qu'on l'oublie.
— Chérie, laisse nous s'il te plaît, demanda Cal à sa femme, sur un ton neutre.
— Cal, je...
— S'il te plaît Gillian.
Devant le regard appuyé de son mari, Gillian quitta la pièce en jetant un dernier regard attristé à son fils. Une fois seul, Cal prit silencieusement place sur une chaise, regarda son fils fixer rageusement un point invisible et commanda :
— Revient t'assoir.
Seth poussa un soupir et obéit à son père. Celui-ci pointa un doigt inquisiteur sur son fils et dit :
— Tout d'abord, je veux que tu me promettes que plus jamais tu ne manqueras de respect à ta mère, est-ce que c'est bien clair ?
Sans regarder son père, Seth hocha lentement la tête.
— Je veux te l'entendre dire !
— Oui, je te le promets, répondit-il avec agacement, en regardant son père droit dans les yeux.
— Deuxièmement, la prochaine fois que je te vois te battre avec ton frère comme tu l'as fait, tu le regretteras.
— Pourquoi ? Tu vas me frapper ? cracha-t-il.
Cal se maîtrisa face à cette insolence typiquement Lightmanienne.
— Écoute moi bien Seth, je vois bien que tu essayes de te battre contre quelque chose qui te ronge et que tu n'es pas encore prêt à nous en parler. Mais, une chose est sûre, c'est que tu n'as aucun le droit de t'en prendre à ta famille et de réagir comme le dernier des crétins. C'est pas comme ça que ta mère et moi on t'a élevé, alors je te prierai d'avoir plus de considération pour nous. Tu as un toit, une famille qui t'aime, tu ne manques de rien. Et quoique que tu puisses vivre ou faire, jamais je ne te ferai de mal, tu m'entends jamais je ne ferai de mal à l'un de mes enfants. Mon père était le dernier des salauds, mais je ne suis pas comme lui.
À ces derniers mots, Seth regarda son père et vit de la tristesse dans son regard à la simple pensée que son fils puisse imaginer qu'il lèverait un jour la main sur lui.
— Je t'aime mon grand, et je ferai tout pour te protéger, mais il faut que tu nous fasses confiance. Et si tu as besoin de temps pour nous parler, je te le laisse. En contrepartie, je veux que tu respectes chaque membre de cette famille à commencer par ta mère. Je veux aussi que tu arrêtes de sécher les cours et de te battre. Je sais qui tu es Seth, parce que tu es mon fils, alors je suis sûr que tu feras le bon choix.
Cal regarda son fils refouler un flots d'émotions et décida de le laisser tranquille pour qu'il puisse réfléchir à ses agissements. Mais avant de partir, il ajouta :`
— Oh et tu es privé de gâteau et tu resteras toute l'après-midi dans ta chambre pour t'être battu avec Nick.
Une fois son père parti, Seth effaça rageusement une larme qui s'était logée au coin de son œil après cette discussion entre père et fils.
Le soir venu, certains regardèrent un film proposé par Dinnozo alors que d'autres jouèrent à des jeux société. S'inquiétant pour son frère, Emily abandonna une partie de poker avec son amie Alexis pour aller voir comment celui-ci se sentait. Elle se rendit dans sa chambre et frappa à la porte de celle-ci sans entendre de réponse. Plongée dans l'obscurité, elle prit l'initiative d'y entrer et remarqua une silhouette allongée dans un lit.
— Seth ? C'est Em, tu vas bien ?
Sans réponse, la jeune fille s'approcha prudemment de son frère qui avait la tête tournée contre le mur. La faible lueur de la lune éclaira le visage attristé de l'adolescent. Cela brisa le cœur de sa sœur qui s'allongea à ses côtés pour l'envelopper dans ses bras et le réconforter. Étrangement, ce geste eut pour effet de faire pleurer le jeune homme de tout son être. Ravalant sa tristesse, Emily répéta des mots réconfortants à son petit frère éploré. Elle resta ainsi avec lui jusqu'à ce qu'il s'endorme d'épuisement. Déambulant dans les couloirs pour chercher des couvertures, Gillian remarqua la porte entre-ouverte de la chambre de Seth et la poussa légèrement pour voir avec attendrissement Emily endormit au côté de son frère.
— Il va aller mieux, souffla Cal, qui venait d'apparaître à ses côtés.
— Je voudrais tellement qu'il sache à quel point je l'aime..., dit-elle, avec une pointe de tristesse dans la voix.
— Il le sait, chérie, dit-il, en posant une main sur son épaule pour la caresser. Il reviendra.
Gillian regarda avec un pincement au cœur son fils puis Cal la serra contre lui pour la réconforter.
Le dimanche matin, Emily se rendit dans la cuisine et tomba sur Gillian qui était en train de se préparer une tasse de café.
— Bonjour Em' ! dit-elle avec un large sourire. Alors, bien dormi ?
— Bonjour Gillian ! répondit la jeune fille, sur le même ton enjoué. Tu sais bien que c'est toujours mieux de dormir ici, que dans une minuscule chambre d'étudiante avec une coloc' écoutant exclusivement des boys band...
— Ton père comprend parfaitement ce que tu endures depuis son week-end en camping avec ton oncle Rick et sa playlist des années 90 !
Les deux femmes rirent en imaginant Cal vivre ce cauchemar puis Gillian proposa une tasse de thé à la jeune fille qui l'accepta volontiers. Elle s'installa autour de la table et remua sa boisson matinale en arborant un air interrogatif.
— Un problème Emily ? s'inquiéta Gillian.
— C'est... juste que... hier soir je suis allée voir Seth dans sa chambre et... je l'ai vu pleuré.
Étonnée par cet aveu, Gillian prit lentement place autour de la table et demanda avec inquiétude :
— Est-ce qu'il t'a dit ce qu'il n'allait pas ?
— Non... Je suis juste restée avec lui, le temps qu'il se calme. Tu sais comment il est. Seth n'arrive pas toujours à dire ce qu'il ressent et il a besoin de temps pour comprendre ses émotions... Je crois que c'est de famille...
— Oui, en effet..., dit Gillian avec un mince sourire.
— Gillian, Seth semble traverser une période difficile, mais... je sais qu'il va réussir à surmonter ça. Seth est un garçon fort. Tu ne le sais peut-être pas, mais il m'a aidée plusieurs fois à surmonter des épreuves difficiles dans ma vie. Il m'appelle très souvent lorsque je suis à l'université et... il ne m'a jamais lâchée. Je ferai tout ce que je peux pour qu'il aille mieux, c'est mon petit frère et je l'aime...
Gillian fut émue par ses dires. Elle embrassa la jeune fille puis la laissa partir lorsque Alexis lui proposa une balade au bord du lac. Le reste de la journée défila avec plusieurs activités puis en fin d'après-midi chaque famille entreprit de plier bagages afin de retrouver leur domicile et leur quotidien. Sur le chemin du retour, Cal remarqua l'air plus paisible sur le visage de son benjamin et il sut que celui-ci était sur la voie de la réflexion. Les jours suivants, Seth ne provoqua aucun écart de conduite au lycée, ni avec sa famille avec qui il n'échangea pas le moindre mot. Gillian voulut plusieurs fois lui parler, mais Cal l'en dissuada en affirmant qu'il le ferait de lui-même. Elle espéra que cela arrive bientôt et ses prières ne tarda pas à s'exaucer...
Un soir d'orage chez les Castle, Kate entendit sonner à la porte de leur appartement New-Yorkais et interrompit une partie de poker avec sa famille pour aller ouvrir.
— Ne trichez pas ! les prévînt-elle, en les pointant avec son index. Je le saurai si vous avez regarder mes cartes !
— Promis maman ! scandèrent leur jumeaux et leurs filles.
— Compte sur nous ! ajouta Richard, avant de glisser subtilement sa main vers le jeu de sa femme.
— Papa ! Ne triche pas ! le sermonna Lily.
Le père afficha une mine contrite et obéit à sa fille. Parallèlement, Kate déverrouilla la porte et fut surprise de découvrir Seth trempé de la tête aux pieds.
— Seth ? Qu'est-ce que tu fais ici ?
— Je peux entrer ? demanda le jeune Lightman.
Surprise par cette visite improviste, Kate s'effaça de la porte et laissa l'adolescent entrer.
— Tu es trempé, dit-elle, donne-moi ta veste.
Seth s'exécuta puis déclara :
— Je suis désolé de vous déranger comme ça, mais il faut que je parle à oncle Rick.
— Euh... tes parents savent que tu es là ?
L'adolescent ne répondit pas et Kate devina par son expression quelle en était la réponse.
— Seth...
— S'il te plait tante Kate, j'ai vraiment besoin de lui parler. C'est urgent.
Confronté à l'air suppliant du jeune garçon, la lieutenant se plia à sa volonté et l'emmena jusqu'au salon.
— Seth ? s'exclamèrent les membres de la famille Castle.
— Qu'est-ce que tu fais ici ? demanda Richard.
— Ne me dis pas que tu as fait tout ce chemin pour que je te rende ton jeu-vidéo ? demanda Reece.
— Non, réfuta Seth, je... je suis venu voir... oncle Rick. J'ai besoin de te parler.
Richard croisa le regard tout aussi déconcerté de son épouse et dit :
— Euh... bien sûr, suis moi. Allons dans mon bureau, on sera plus tranquille.
Devant les regards intrigués des Castle, Seth suivit son oncle dans son bureau et regarda celui-ci s'installer derrière sa table de travail. Il offrit à son invité de s'assoir mais celui-ci refusa. Richard racla sa gorge et demanda :
— Alors... Que se passe-t-il ? Je suppose que si tu as fait tout ce chemin ce n'est sûrement pas pour connaître la fin de mon prochain roman.
— Non, bien que j'aimerais être le premier à le lire.
— Ton vœux est exaucé, cher neveu, dit l'écrivain avec un fin sourire.
Richard perdit vite son air joyeux lorsqu'il vit apparaître une expression de tristesse sur le visage de Seth.
— Parle-moi Seth. Dis-moi ce qu'il ne va pas.
Le jeune homme resta silencieux, le regard plongé dans le vide.
— Tu sais que tu peux tout me dire.
Seth se détourna et fixa un livre écrit par son père rangé sur l'étagère de son parrain.
— Je... Je crois que rien ne va chez moi en ce moment, souffla-t-il.
— Que veux-tu dire ? Tu parles de tes problèmes au lycée ?
— Si ce n'était que ça, répliqua-t-il avec ironie. J'ai... l'impression que tout s'écroule autour de moi et que je ne peux rien contrôlé. La dernière fois que j'ai ressenti ça, c'était quand mon père était dans le coma. Je le voyais en train de mourir et je ne pouvais strictement rien n'y faire.
— Tu as été là pour lui et c'est tout ce dont il avait besoin.
— Pourtant, la première chose à laquelle j'ai pensé à ce moment là, c'était de faire exactement ce qu'avait fait Nick et... je n'ai rien fait. Je n'ai rien fait pour protéger mon père, ni ma famille. Alors que Nick a osé se mettre en danger pour nous protéger, il a risqué sa vie.
— Nick a fait ça parce qu'il avait peur de perdre votre père. Il a perdu son sang-froid et il aurait pu aussi perdre la vie si Gibbs n'avait pas été là. Toi, tu es resté auprès des tiens, de tes sœurs et de ta mère et tu les as aidées à garder espoir.
— J'aurai voulu faire plus. J'aurai voulu être plus... Nick a toujours été mon model, comme mon père. Ils n'ont peur de rien.
— C'est faux, ton père à constamment peur.
Surpris, Seth se retourna à ces mots et envoya un regard interrogateur à son oncle.
— Il a peur de vous perdre, reprit-il. Chaque jour qui passe, il n'a qu'une seule crainte c'est qu'il puisse arriver quelque chose à un membre de sa famille. Et il n'est pas le seul. Chaque enquête que nous faisons avec Kate, me rappelle la chance que j'ai d'avoir une si belle famille, mais aussi le risque que nous prenons pour la protéger. Beaucoup d'entre nous avons perdu des êtres chers, mais le pire qu'il puisse arriver est de perdre un enfant. Patrick, Jack et Leroy connaissent cette douleur et nous ne pouvons qu'imaginer ce qu'ils endurent. Ton père était présent lorsque Anne-Charlotte est décédée. Il a vu ton oncle Patrick disparaître petit à petit. C'était pour lui, inimaginable. Cal était le parrain de Anne-Charlotte. Elle était comme sa propre fille.
— Papa ne nous parle jamais d'elle.
— Ton père a toujours été très secret sur ses sentiments, mais ta mère l'a aidé à en parler. Cela a demandé du temps, mais aujourd'hui il va mieux, grâce à elle et à vous quatre.
— J'ai toujours pensé que mon père m'estimait moins que mon frère ou mes sœurs.
— Pour quelle raison tu penses ça ?
— Nick est le fils idéal. Je ne peux pas le blâmer. Mais moi... Je me suis toujours senti différent... Hors de tout ce qui m'entoure. Je n'arrive pas à comprendre... les autres... ni à rentrer dans le moule...
— Crois-le ou non, ton père est exactement pareille et il s'en est toujours servi comme d'une force.
— On n'est pas pareille, souffla-t-il, meurtri.
— Vous l'êtes bien plus que tu ne le penses.
— Il y a quelque chose que tu ne sais pas sur moi et ma famille non plus. Quelque chose que je cache depuis plusieurs années.
— Cela a-t-il un rapport avec tes déboires au lycée ?
— Tu sais pourquoi je me suis battu contre cet abruti de Riley ?
Richard secoua négativement la tête.
— Il a osé dire à un élève qu'il n'était qu'une taffiole de mes deux.
— Tu as voulu défendre un camarade, pourquoi ne l'as-tu pas dit à tes parents?
— L'élève c'était moi oncle Rick et si je l'avais dit à mes parents, ils auraient su.
— Quoi donc ?
Seth appuya son regard et Richard comprit.
— Ooh, je vois... Tu... ne l'as jamais dit à personne ?
— Personne n'est au courant.
— Pourquoi n'as-tu rien dit à tes parents?
— J'ai peur...
— Seth, tes parents sont très ouverts sur le sujet, il t'accepteront tel que tu es et...
— Je sais. Ce n'est pas de ça dont j'ai peur. Si je leur dit, alors cela deviendra réel et je ne pourrais plus...
— Te cacher.
— C'est ça. Et je ne sais pas si je pourrais me montrer aussi courageux que mon frère ou mon père.
— Tu es un jeune homme très courageux Seth. Tu as déjà défendu des causes et des camarades en détresses et je sais que tu seras capable de faire fi de ce que les autres peuvent penser de toi. Tes parents t'ont élevé dans l'amour et le respect le plus total. Tu es porteur de leurs valeurs, alors si certains ne s'arrêtent qu'à ta sexualité, ils ne valent pas d'interêt à te connaître. Tu es intelligent, drôle, talentueux, promis à un avenir des plus brillants. Alors, oublie tous ces imbéciles qui n'ont aucune idée de ce qu'ils sont et de ce qu'ils disent. La plupart passeront leur vie sans connaître le sens de savoir aimer, ce qui est pour moi la chose la plus triste qui puisse exister. Tu vaux mieux qu'eux. Et si... certains continuent de s'en prendre à toi, ils risquent de se confronter à une multitude d'agents gouvernementaux...
Touché par ces mots, la gorge de Seth se serra d'émotion alors que Richard se leva pour prendre son neveu dans ses bras.
— Je serai toujours là pour toi, Seth, promit Richard. Tout comme ta famille. Tu n'es pas seul, tu es aimé n'oublie jamais ça. D'accord ?
L'adolescent se détacha de l'écrivain et hocha lentement sa tête.
— Bien..., dit Richard avec un sourire. On va prévenir tes parents que tu es là et... tu vas passer la nuit ici. J'espère que tu aimes la cuisine de ta tante !
Seth afficha une légère grimace qui fit éclater de rire Richard.
— Ne t'inquiète pas, dit-il, on a une plante qui récupère tout ce qu'on ne mange pas !
Le lendemain, Seth était revenu à Washington. Devant l'entrée du Lightman Group, il prit d'abord une grande inspiration, poussa les portes du bâtiment et demanda à Anna où se trouvait ses parents. La réceptionniste lui répondit qu'ils étudiaient une vidéo dans le laboratoire et lui demanda de patienter quelques instants dans le bureau de son père, le temps qu'elle revienne les chercher. Cinq minutes plus tard, Cal et Gillian le rejoignirent et découvrirent leur fils qui les attendait avec une expression désolée. La mère de famille se précipita sur lui pour le prendre avec soulagement dans ses bras.
— Tu nous a fait peur Seth !
— Excuse-moi maman...
Elle se recula légèrement et posa une main tendre sur sa joue.
— Tu vas bien mon chéri ?
— Oui ne t'inquiète pas maman.
L'adolescent tourna son regard sur son père et vit que celui-ci le regardait avec le même soulagement que sa mère.
— Il faut que je vous parle, dit-il avec solennité.
Gillian afficha un air inquiet devant le visage grave qu'affichait son fils. Celui-ci convia ses parents à s'installer sur le canapé alors qu'il prit place sur le fauteuil pour un meilleur échange.
— Tout d'abord, je tenais à m'excuser pour ma fugue et pour mon comportement de ces derniers jours... Beaucoup de choses se sont passées récemment et... je ne savais pas comment gérer ces émotions... C'est l'une des raisons pour laquelle je m'en prenais à vous... Je regrette sincèrement tout ce que je vous ai fait subir.
Cal regarda attentivement le langage du corps de son fils qui semblait être en plein débat intérieur.
— Si je ne vous ai pas encore parlé de ce sujet, c'est que moi-même je n'arrivais pas à comprendre ce qu'il m'arrivait et que j'ai mis un temps avant de l'accepter... J'espère qu'entre nous cela ne changera rien... Ça fait plusieurs années que je mens, à vous et à moi-même... Et aujourd'hui, je sais que je dois me montrer honnête pour pouvoir avancer et pour ne plus ressentir cette colère en moi...
Seth marqua une pause, ferma ses yeux et lâcha :
— La raison pour laquelle j'ai frappé Riley, c'est qu'il injuriait un élève parce qu'il... était gay et... que cet élève, c'était moi.
La révélation lâchée, Seth regarda les expressions de ses parents qui étaient restées inchangées depuis le début de la conversation. Aucune surprise ou colère n'était apparue sur le visage des experts en mensonge. Un doux sourire se dessina sur le visage de Gillian alors qu'elle prit la main de son fils dans la sienne pour le regarder avec tendresse.
— Chéri... Rien ne changera entre nous. Tu es notre fils et nous t'aimons...
L'adolescent posa son regard anxieux sur son père qui n'affichait toujours aucune émotion et craignit pendant un instant que celui-ci ait une mauvaise réaction. Puis, il fut soulagé lorsqu'il le vit étirer un sourire et lui demander de se lever pour le prendre dans ses bras sous les yeux attendris de sa mère.
— Seth, dit-il, je veux que tu saches que je t'aime autant que ton frère et tes sœurs et à l'avenir je veux que tu puisses me parler sans crainte de ce qui te tourmente. Je serai toujours là pour toi, on sera toujours là pour toi. Quoiqu'il advienne. Tu es notre fils. Ne me cache plus rien Seth.
Seth approuva les dires de son père puis se détacha ému de celui-ci.
— L'herbe, c'est terminé ! le prévint-il, en agitant son index devant son visage.
— Oui papa...
— Et les bagarres aussi ! ajouta sa mère.
— Sauf si c'est pour mettre une autre raclée à ce Riley, répliqua Cal.
— Cal...
Seth ria légèrement. Tout d'un coup, Cal afficha une expression d'interrogation et demanda :
— D'ailleurs, comment Riley savait que tu étais...
— Il m'a vu avec un garçon avec lequel je sors, avoua l'adolescent.
— Est-ce la raison de tes disparitions répétées ?
— En partie...
Cal et Gillian sourirent au malaise de leur fils puis le prirent une nouvelle fois dans leurs bras, sans poser plus de questions sur ce mystérieux garçon. Seth se demanda si son père avait toujours su ce qu'il était et s'il lui avait sciemment laissé le temps nécessaire pour leur faire cet aveu. Il préféra ne jamais en connaître la réponse et se dire que son amour filial indéfectible lui suffisait. Pour fêter ces retrouvailles, Cal proposa à son fils d'aller manger quelque chose à l'extérieur. Lorsqu'ils furent de retour chez eux, Seth salua son chien qui était heureux de retrouver son maître puis convia son frère et ses sœurs de se réunir dans le salon pour leur avouer la raison de son comportement et de ses tourments en s'excusant platement d'avoir pu les blesser. Aucun mot ne fut prononcé. Cela inquiéta Seth jusqu'au moment où Emily et Louise le prirent instinctivement dans leurs bras. Nicholas regarda son frère sans un mot puis le prit à son tour dans ses bras en déclarant :
— La prochaine fois que quelqu'un t'embête, laisse-moi aussi participer pour que je lui règle son compte.
— Je je te le promets, ria-t-il légèrement. Si tu fais de même pour moi.
— Promis, p'tit frère.
— On risque de se faire mal aux mains.
— C'est clair ! Vu le nombres d'ennemis que tu te fais !
— Moi ? Tu rigoles t'as plus d'ennemis que moi !
— Le moins dernier tu as mis de la mousse à raser dans au moins trois casiers !
— Pas ma faute, ils avaient traité un premier année de petite merde, fallait bien que je leur règle leur compte !
— Et les papiers toilettes dans les arbres des Peterson !
— Ils ne triaient pas leurs déchets, alors j'ai fait comme eux !
— Quoi ? éclatèrent de rire Louise et Emily.
Non loin, Gillian regarda les quatre enfants rirent de bon cœur et arbora un large sourire en les voyant aussi heureux.
— Tu vois, j'avais raison, souffla Cal, à ses côtés.
— C'est vrai... Merci, Cal.
— Pourquoi ?
— D'être un père génial.
— Oh, c'est un plaisir. J'ai pris exemple sur la mère la plus génial... Mrs. Doubtfire.
À cette plaisanterie, Gillian offrit une légère frappe à son compagnon qui ria à cette remontrance.
— On a de la chance..., dit Cal, en regardant ses enfants.
— C'est vrai.
Gillian embrassa tendrement son mari puis lorsque les deux parents entendirent leur fils Seth se vanter d'avoir enflammer des sacs remplis des crottes de chiens devant la porte des voisins, ceux-ci se lancèrent un regard mutuel et clamèrent :
— Seth t'es punis pour deux semaines !
— Quoi ? s'injuria-t-il. Mais c'est injuste ! Si j'ai fait ça, c'est pour punir ses capitalistes qui pensent que la terre est une poubelle géante !
— Je crois qu'on a retrouvé notre fils, lança Gillian, en tapotant le torse de son compagnon avant de se rendre dans la cuisine.
— Ouais, soupira Cal, en suivant sa femme tout en entendant l'adolescent divaguer sur les droits civiques américains pour clamer son innocence déjà perdu d'avance.
Seth s'était posé beaucoup de questions sur la raison qui faisait de lui ce qu'il était, et le but qu'il devait un jour atteindre dans cette jungle qu'était l'humanité. Qu'importe les sommets qu'il devait gravir où les chemins tortueux qu'il devait emprunter, il rallierait quoiqu'il arrive son foyer. Et même si par moment il se perdait au bord de la route, il savait qu'il pourrait toujours retrouver son chemin auprès des siens. On ne naissait pas tous avec les mêmes chances. Il se savait privilégié d'être si aimé et entouré qu'il se promis un jour de partager et de sauver cet amour et cet espoir que d'autres ne connaissaient pas. On lui avait donné une seconde chance et il allait la saisir sans compromis.
— Bon sang Cal, tu ne changeras jamais, lança Richard avec une pointe de dégoût.
— J'me gave avant le dîner de la semaine prochaine chez ma belle-mère !
— Pas bête, rit l'écrivain. Je devrais prendre ton exemple !
— T'as pas de belle-mère toi.
— Non, mais j'ai une femme et elle est très mauvaise cuisinière !
— Pas faux ! J'ai encore le souvenir de son carpaccio qui me remonte aux tripes !
Les deux hommes rirent à cette anecdote commune.
— Alors, que me vaut cet appel New-Yorkais ?
— Abby harcèle tout le monde pour savoir si on vient à la fête d'anniversaire de Gibbs ce week-end. Et on voulait savoir si la famille Lightman serait de la partie ?
— Je ne louperai ça pour rien au monde !
— Tu dis ça à cause de la tradition n'est-ce pas ?
— Tu me connais si bien !
Richard ria jusqu'au moment où il remarqua l'expression de son ami devenir plus soucieuse. Celui-ci venait de recevoir un message sur son portable.
— Un problème ? s'enquit Richard.
— C'est Gill'. Elle a reçu un message de la principale du lycée...
— Laisse-moi deviner, Seth...
— Yep... Ça va faire la troisième fois qu'on reçoit une alerte. Ce gamin va me tuer.
— Il est en pleine crise d'adolescence Cal, n'oublie pas que toi aussi t'as fait des bêtises quand tu étais jeune.
— Ouais, mais je n'ai jamais dit à mes enfants de suivre mon exemple.
— C'est toi alors l'auteur du "faites ce que je dis mais pas ce que je fais" !
— J'croyais que c'était Dieu, mais peut-être que c'était moi.
Richard ria de nouveau et répliqua :
— Je peux essayer de lui parler si tu veux ? En tant que parrain, peut-être qu'il m'écoutera.
— Vu qu'il fait la sourde oreille avec sa mère et moi, peut-être qu'un écrivain qui fait autant de bêtises que lui peut fonctionner.
— C'est vrai que je m'y connais, Kate m'a punis pas plus tard qu'hier pour avoir mis un serpent en plastique dans le tiroir du bureau de Ryan. Si tu avais vu sa tête, c'était tout simplement hilarant ! Quelle était la dernière bêtise de Seth ?
— Il a frappé l'un de ses camarades de classe.
— Oh... je ne m'attendais pas du tout à ça...
— Hmm...
— Rick ! À table, je viens faire du poulet rôtis ! cria Kate à son mari.
Castle ferma ses yeux et dit :
— Prie pour que je sois encore en vie demain...
— La une risque d'être triste ! se moqua-t-il.
— Arrête de rire, je sens l'odeur de la mort d'ici !
— Rick ça va refroidir ! clama Kate.
— Bon, je te laisse... si on se revoit pas, je te donne toute ma collection de vinyle!
— Sans vouloir t'offenser, les boys band c'est pas trop mon genre.
— Le groupe Take That était super connu au début des années 90 !
— Mouais, bon j'te laisse avec ton poulet congelé, repose en paix !
Cal coupa la conversation et froissa le papier de son sandwich pour le jeter à la poubelle.
De retour au Lightman group, Cal marcha dans les couloirs de l'agence puis s'arrêta devant la salle de conférence en apercevant Gillian lui faire signe par la baie vitrée. Après une heure intense de réunion, elle décida de l'ajourner et demanda à ses employés de travailler sur les points les plus importants. Elle récupéra hâtivement ses affaires et rejoignit son mari dans le couloir.
— Cal, tu as reçu mon message ?
Il pouvait discerner l'angoisse dans sa voix.
— Oui, je suis revenu aussi vite que possible.
Gillian convia son compagnon à se rendre dans son bureau pour discuter en détail de la situation. Elle ferma la porte pour plus d'intimité et se retourna vers Cal avec un air inquiet sur le visage.
— Cal, ça va faire la troisième fois que le lycée nous appelle pour Seth. Et cette fois-ci, il s'est battu avec un autre élève ! Je ne sais pas ce qu'il lui arrive. Je ne le reconnais plus. J'ai... j'ai l'impression que la même histoire se répète... Je pensais qu'avec ce qu'il s'était passé avec Nicholas, on avait résolu nos problèmes... mais là...
— Gill', toi et moi on sait que Seth est un bon garçon. Il traverse probablement une mauvaise passe et c'est à nous de le remettre dans le droit chemin. Si on a réussi pour Nick, il va en être de même pour Seth.
— J'espère que tu as raison...
— J'ai toujours raison, dit-il avec un mince sourire.
Elle lâcha un léger rire et répliqua :
— J'espère que Lou' ne nous causera pas plus de problèmes... Jusqu'à présent, son seul caprice était une nouvelle voiture... que nous avons refuser de lui acheter au vu de son prix très élevé...
— Je crois que les garçons Lightman n'ont jamais totalement bien tourné pendant leur période d'adolescence.
— Pourtant, tu t'es plutôt bien rattraper je trouve.
— Parce que j'ai croisé une Foster qui m'a remis sur le droit chemin.
Elle sourit et Cal ancra son regard tendre dans le sien et déplaça une mèche de cheveux qui lui barrait ses yeux bleus.
— On va l'aider, je te le promets.
Ils se serrèrent dans leurs bras puis Cal ajouta :
— Et puis, Rick s'est proposé de jouer les parrains en détresse. Faut juste espérer qu'il ne lui donne pas de conseils pour plus de bêtises.
Elle ria de nouveau et embrassa furtivement son mari. Il avait toujours eu le dont de la faire sourire, même lorsqu'elle traversait des moments pénibles.
— Tu sais que Kate l'a punis ? lui demanda-t-il.
— Je sais, elle m'en a parlé pendant plus d'une heure au téléphone. Une histoire de serpent d'après ce que j'ai compris...
— À quelle heure est le rendez-vous avec la principale ?
— En fin de journée. Cela nous laissera du temps pour voir M. Wyatt.
Cal opina du chef puis Gillian l'invita à le suivre dans la salle d'analyse.
Plus tard, Cal et Gillian partirent pour le lycée de Seth et entrèrent dans le bureau de la principale Simmons. Celle-ci les saluèrent par une poignée de main solennelle puis les invita à prendre place sur les deux sièges en face de son bureau. Elle s'installa à son tour, croisa ses mains sur son bureau et déclara sur un ton protocolaire :
— Madame et Monsieur Lightman, je vous remercie d'avoir fait le déplacement. Je suis désolée que nous nous retrouvions une fois plus pour une malheureuse circonstance. En effet, le cas de votre fils Seth me préoccupe. Comme vous le savez, il a été plusieurs fois convoqué pour diverses infractions au règlement de notre établissement. Tel que sécher les cours ou aux dernières nouvelles, frapper l'un de ses camarades de classe.
— Connaissez-vous la raison pour laquelle cette bagarre a eu lieu Mme Simmons ? l'interrogea Gillian.
— Non Madame Lightman, mais plusieurs témoins affirment que votre fils aurait été le premier à donner des coups. Il a refusé de nous en donner la raison et je ne vois aucune manière de le punir autrement que par une semaine d'exclusion.
Gillian expia son angoisse par un discret soupir puis Cal, jusqu'à présent silencieux, prit à son tour la parole :
— Cela sera-t-il consigné dans son dossier scolaire ?
— Et bien, si Seth admet sa faute et présente ses excuses auprès de M. Scott. Nous ne consignerons pas ce fait dans son dossier scolaire.
— Il le fera.
— Écoutez, je connais Seth. Malgré ses quelques frasques, c'est un garçon intelligent, voir plus que ça d'après ses notes. Il lui est arrivé de transgresser le règlement pour des blagues potaches, mais c'est la première fois que je le vois user de la violence. Je connais le passif de votre famille et l'histoire de votre fils Nicholas. Y'aurait-il eu un événement quelconque dans la vie de Seth qui aurait participé à ce changement d'attitude ?
— Nous avons réglé les problèmes que nous avions eus avec Nicholas, répondit Gillian, et à vrai dire, je ne vois rien qui aurait pu changer son comportement...
— Je vois... Je vous conseil d'avoir une franche discussion avec votre fils afin de lui faire comprendre que s'il venait à continuer sur ce chemin là, son avenir risque d'y être compromis. Et malgré tout, je reste persuadée qu'il est promis à un brillant avenir.
Le couple remercia la principale pour cette discussion puis récupéra leur voiture sur le parking de l'établissement. Sur le chemin du retour, Cal était au volant de la voiture et aperçut du coin de l'œil sa femme arborer un air soucieux.
— Gilly, on va lui parler et tout rentrera dans l'ordre, ok ?
— Il ne nous parle plus Cal... Quand est-ce que tu l'as-tu vu sourire ou rire ?
Cal ne sut quoi répondre, car il est vrai que cela faisait longtemps qu'il n'avait pas vu son plus jeune fils éprouver autre chose que de la colère ou de la morosité.
— Ce n'est pas normal Cal. Seth a toujours été d'humeur joyeuse. Même quand les choses vont mal, il trouve toujours un moyen de voir les choses d'une autre manière. Tu te souviens... quand ils étaient encore petits et que Lou' avait perdu son doudou. Seth avait eu l'idée de lui fabriquer des personnages avec des aliments et...
— Cela avait terminé en bataille de tomates, termina Cal. Je m'en souviens parfaitement, devine qui a dû tout nettoyer après ça.
— Ce dont je me souviens surtout, c'est que Lou' avait ri et que Seth était venu me voir pour me dire que les larmes de sa sœur avaient disparu. Seth a toujours voulu guérir les personnes qui se sentaient mal... Et aujourd'hui, c'est lui qui ne se sent pas bien et je ne sais pas comment faire pour l'aider à aller mieux...
— On va lui parler, certifia Cal avec conviction.
Gillian esquissa un timide sourire puis perdit son regard sur le paysage défilant devant ses yeux.
De retour à la maison, Cal et Gillian voulurent discuter avec leur benjamin mais, au contraire de son frère et de sa sœur, celui-ci n'était pas encore rentrer. Cela inquiéta les parents qui laissèrent plusieurs sms et messages vocaux sur son portable. Lorsque ce fut l'heure de manger, Louise aida son père à préparer le repas, le temps que Gillian termine de mettre la table avec l'aide de Nicholas. Soudain, elle entendit la porte d'entrée claquée et sut que Seth était enfin de retour. Elle l'appela, mais il fit semblant de ne pas l'entendre. Il gravit à toute vitesse les escaliers et claqua la porte de sa chambre. Cal rejoignit Gillian et lui conseilla d'attendre le lendemain pour entamer une discussion. Elle approuva à contre cœur puis le reste de la famille dina en évitant de poser la question sur la raison de l'absence de Seth à table. Après le repas, chacun alla se préparer pour la journée qui allait suivre puis alla se coucher. Dans leur lit, Cal étudia un dossier sur l'affaire en cours alors que Gillian s'installa à ses côtés sans dire un mot. Ressassant les événements passés, elle céda un léger soupir et laissa divaguer son regard sur le plafond immaculé. Cal la vit faire et arrêta son travail pour se concentrer sur sa compagne tourmentée.
— Tu penses à Seth ?
— Hmm... J'essaye de me souvenir à quel moment il a changé...
— Je crois qu'il n'a jamais changé.
Gillian tourna son regard interrogateur sur son mari qui s'expliqua :
— Ce que je veux dire, c'est que Seth est toujours là. Comme tout adolescent de son âge, il a simplement... des émotions qu'il ne comprend pas et des secrets qu'il ne souhaite pas partager avec ses parents.
— Que crois-tu que c'est ?
— J'en sais rien... mais il a sûrement besoin de temps pour le comprendre lui-même et... il va falloir être patient...
Cal invita Gillian à venir dans ses bras et l'embrassa dans ses cheveux.
— Je voudrais tellement l'aider..., souffla-t-elle.
— Je sais, chérie... pour le moment, il faut que tu dormes, demain on lui parlera.
Allongé dans son lit, Seth n'arrivait pas à trouver le sommeil et se sentait oppressé dans l'obscurité de sa chambre. Il alluma l'écran de son portable : 23H. Un besoin urgent de prendre l'air le submergea. Sans réfléchir, il sauta de son lit pour enfiler une veste à capuche et des baskets sous les yeux attristés de son chien couché sur le sol. Par chance, un treillis menant à la fenêtre de sa chambre permit à l'adolescent d'escalader la façade de sa maison et d'atteindre sans problème la terre ferme du jardin. Il passa le portillon et marcha plusieurs mètres avant d'être envahi par une envie de courir. Il enfonça ses écouteurs dans ses oreilles, commença par des petites foulées puis trouva un rythme régulier. Il courut longtemps, jusqu'à se retrouver sur une colline qui portait un point de vue dégagée sur la ville illuminée. D'ici, il se sentit à la fois invincible et minuscule dans cette ville grouillante de vie. Jamais il ne s'était senti aussi seul. Il aurait voulu pleurer, crier sa colère mais rien ne vint. Plusieurs émotions contraires explosèrent en lui sans qu'il ne puisse les comprendre. Tous ses problèmes paraissaient si futiles face à ce monde froid qui semblait ne pas se soucier de ses enfants en perte de repères. Il se demanda qui pouvait l'aider si eux-mêmes ne savaient pas où ils allaient... Il se sentait perdu, désorienté, au bord du vide, comme si l'univers l'avait dévoré. Las et épuisé, il s'écroula sur l'herbe fraîche de la nuit et resta pendant plus d'une heure sur cette dune à contempler les luminaires qui avaient remplacés les étoiles. Il laissa vagabonder ses réflexions en espérant trouver une paix intérieure. Puis au bout d'une heure, il décida qu'il était temps de retourner chez lui, malgré le fait que sa tristesse était toujours présente.
Le lendemain, les deux experts en mensonge retournèrent au Lightman Group afin d'élucider l'affaire de l'agression qui était en cours. Au même moment, Seth tentait de rester éveillé à un cours de math dont il écoutait vaguement les leçons de son professeur. Lorsque la cloche sonna la fin du cours, Seth s'empressa de ranger ses affaires et de quitter la salle pour rejoindre la cour arrière de l'établissement scolaire. Déambulant dans les couloir, il croisa Riley arborant un coquard violacé sur son œil droit et ne put s'empêcher de sourire à ce détail.
— Qu'est-ce qui te fait marrer Lightman? cracha Riley, accompagné de deux de ses amis.
— Ta tronche d'aubergine, répliqua Seth. Dommage qu'on nous a séparés, j'aurai pu ajouter plus de couleurs sur ta face de Picasso.
Il n'en fallut pas plus à Riley pour foncer sur Seth et les faire tomber tous les deux à terre. À ces heurts, un attroupement d'élèves se regroupèrent rapidement autour des deux combattants pour les encourager dans leur lutte. Après quelques coups bien placés, Seth se sentit être tirer en arrière pour l'empêcher de continuer son combat.
— Calme-toi Seth !
L'adolescent reconnut la voix de son grand frère et se débattit dans ses bras pour se libérer de son emprise. Tout ce qu'il désirait c'était retourner à son duel.
— Lâche-moi ! cria-t-il.
— Non ! D'abord je veux que tu te calmes !
— Qu'est-ce qui se passe ici ? clama une voix autoritaire dans la foule.
Nicholas distingua le directeur du lycée se frayer un chemin jusqu'à eux et s'empressa d'emmener son petit frère loin du grabuge dont il était la cause. Trois couloirs plus loin, il poussa Seth dans les toilettes de l'établissement et vérifia qu'ils étaient seuls.
— Nettoie ton visage, tu as du sang sur tes lèvres, dicta-t-il, à son petit frère.
Seth contempla son visage tuméfié dans le reflet du miroir et constata effectivement une blessure ensanglantée au coin de sa bouche. Il ouvrit le robinet et aspergea son visage d'eau pour effacer toutes traces de l'échauffourée.
— Tu peux me dire pourquoi tu t'es encore battu avec cet abruti de Riley ?
Seth se pencha au lavabo et regarda l'état de son visage à travers son reflet.
— Sa tête ne me revenait pas.
— C'est ça ton excuse ?
— Quoi ? C'est pas suffisant ?
— Seth... Qu'est-ce qui t'arrive ? Tu n'arrêtes pas de te battre, tu sèches les cours, tu ne parles plus à personne... Papa et maman s'inquiètent pour toi, tu le sais ?
— Ils devraient pas, j'vais bien.
Seth commença à partir, mais Nicholas lui fit barrage.
— Tu ne peux pas continuer comme ça, déclara très sérieusement Nicholas. J'étais comme toi à une époque, Seth. J'étais en colère et je me battais contre tout et tout le monde, jusqu'au jour où j'ai compris que la seule manière de s'en sortir s'était de parler.
— Sauf que t'oublie une chose, je ne suis pas comme toi, rétorqua-t-il froidement, en quittant rageusement la pièce.
Nicholas regarda Seth partir et soupira longuement en songeant que s'il ne trouvait pas rapidement une solution, son frère risquerait de se retrouver dans des situations périlleuses.
En fin d'après-midi, Cal était retourné à son domicile alors que sa femme était restée au Lightman Group pour effectuer l'interrogatoire d'un suspect. Il gara sa voiture devant le garage et remarqua le vélo de Seth stationné contre le mur de celui-ci. Il rentra chez lui et entendit de la musique à l'étage. Reconnaissant un air du groupe des Jam, il sut qu'il s'agissait de son plus jeune fils. Il s'apprêta à aller le voir pour avoir une conversation posée sur les événements passés, mais lorsqu'il reçut sur son smartphone un mail du lycée l'informant que Seth avait une nouvelle fois attenté une bagarre contre un élève, une colère fulgurante balaya tout ce qu'il pouvait lui rester de calme. Il s'empressa d'aller le rejoindre et frappa à la porte de sa chambre pour l'avertir de sa présence.
— Seth, c'est moi, il faut que je te parle.
— Deux minutes ! scanda-t-il, derrière la porte.
Cal patienta, entendit du mouvement s'opérer puis après quelques secondes Seth autorisa enfin son père à entrer. Celui-ci découvrit l'adolescent nonchalamment étendu sur son lit avec une BD entre ses mains, puis afficha un léger air de suspicion lorsqu'il discerna chez lui une respiration irrégulière. Il ne s'en formalisa pas et présenta à son fils le mail à charge le concernant :
— Tu peux m'expliquer ?
Affalé sur son lit, Seth afficha un air d'incompréhension.
— Ne joues pas à ça avec moi Seth, répliqua sévèrement son père. C'est un mail de ta principale de ton lycée. Elle dit que tu y es exclu pour deux semaines parce que tu t'es battu avec un élève ! Et que tu aurais récidivé aujourd'hui !
— Il l'avait mérité…
— D'avoir cassé son nez ?
Seth ne répondit pas. Cal inspira et reprit:
— Je veux bien passé l'éponge sur quelques blagues de casiers collés avec de la glue ou de bombes à eau jetées des toits, mais ça, je ne l'accepterai pas ! Je ne te reconnais plus Seth.
— Peut-être parce que tu ne me connais pas, marmonna-t-il.
— Quoi ? Tu peux répéter ? réclama-t-il, sur un ton exaspéré.
— Tu ne me connais pas ! répéta plus fortement l'adolescent.
— Qu'est-ce que tu veux dire ?
Seth garda une fois de plus le silence.
— Tu ne veux rien me dire ? Il va pourtant le falloir. Dis-moi pourquoi tu t'es battu ?
Le jeune homme refusa de répondre. Il contracta ses tempes à plusieurs reprises et détourna son regard de celui accusateur de son père. Cal remarqua que celui-ci avait étrangement dévié plusieurs fois vers sa housse de guitare. D'un froncement de sourcils, il prit l'initiative de s'en approcher et capta l'augmentation de nervosité de son fils à sa simple proximité. Suivant son intuition, il fouilla la housse et trouva avec une grande fureur un petit sachet de cannabis.
— Tu te fous de moi Seth ? s'écria t-il, en agitant le sachet. Depuis quand tu prends cette merde ?
— Tout le monde en prend ! répliqua-t-il avec exaspération.
— Pas sous mon toit !
— J'ai une photo de toi qui prouve le contraire !
— Tu me réponds maintenant ? s'indigna-t-il. Crois-moi que tu vas avoir de sérieux problèmes jeune homme !
— C'est marrant quand c'était Nick, tu ne disais rien et avec moi tu lâches les chiens ? Chez moi, j'appelle ça du favoritisme !
— Ce que tu appelles du favoritisme, j'appelle ça rectifier ses erreurs. Je n'ai pas été là pour ton frère et je le regrette chaque jour. Alors, crois moi quand je te dis que j'vais pas te lâcher ! Comment t'as eu ça ?
Seth s'obstina dans son mutisme, un comportement qui agaça fortement Cal.
— C'est pas en gardant le silence que j'vais abandonner. Je ne vais pas en rester là, crois-moi ! T'es privé de sortie jusqu'à nouvel ordre. Pas de jeux vidéos, ni de portable ! Les seules choses que tu auras le droit de faire c'est d'aller en cours et faire tes devoirs !
— Quoi ? Mais...!
— Y'a pas de mais qui tienne ! Tu te comportes comme un gamin, je te traite comme tel ! Et n'essaye pas d'amadouer ta mère, elle est d'accord avec moi.
— S'te plait, ne le dis pas à maman pour l'herbe. Je veux pas la faire souffrir...
Cal quitta furibond la chambre de son fils et cracha en claquant sa porte :
— Fallait y penser avant !
Seth jeta rageusement sa BD à travers la pièce, poussa un long soupir et s'écroula désespérer dans son lit.
Plus tard, Gillian téléphona à Abby pour confirmer leur venue pour la grande maison, un lieu de rassemblement pour le groupe d'amis, afin de participer à l'anniversaire de leur ami Gibbs. Après quoi, Cal profita que leurs enfants étaient occupés dans leur chambre pour lui révéler ce qu'il venait de découvrir dans la chambre de Seth. Sous le choc, la mère ne formula pas le moindre mot sur cet aveu sans précédent. Cal voulut approfondir la discussion, mais l'heure du dîner ameuta leurs enfants affamés au rez-de-chaussée, excepté Seth qui préféra une fois encore ne pas participer au repas de famille. Après le dîner, Gillian débarrassa la table avec l'aide de son compagnon qui avait remarqué son air peiné depuis la révélation sur leur plus jeune fils. Une assiette à la main, l'expert en mensonge se dirigea jusqu'à l'évier afin d'y mettre le couvert sale.
— Chérie, je sais que cette histoire avec Seth te tourmente mais...
— Il y avait de la drogue dans sa chambre Cal ! le coupa-t-elle, avec agacement. Je... Je suis sa mère comment je n'ai pas pu m'en rendre compte !
— Je sais que ce que je vais te dire ne va pas te plaire, mais c'est un adolescent et ils sont les pros du mensonge. Et puis... Tu sais, il m'est aussi arrivé de fumer de l'herbe quand j'étais jeune et... aujourd'hui je fonctionne à peu près normalement, je te l'accorde.
— Ne minimise pas ses actes Cal, répliqua-t-elle, irritée.
— Ce n'est pas ce que je suis en train de faire. Je dis simplement qu'il n'a pas sombré dans le côté obscur. Il est juste... perdu.
— Pourquoi a-t-il fait ça ? La plupart des jeunes qui en prennent c'est pour fuir la réalité. Je ne vois pas ce qu'il cherche à fuir.
— Tu sais aussi que certains en prennent juste pour s'amuser.
— Seth n'est pas du genre à suivre le troupeau.
— C'est vrai, il préfère le disperser, répliqua quelque peu amusé Cal.
Une réplique qui amusa Gillian et qui détendit l'atmosphère appesanti.
— Gilly, reprit Cal, je sens que Seth à envie de se confier, mais ce qu'il cache semble bien plus complexe que nous le pensons. Seth à parfois besoin de temps pour dire ce qu'il ressent et... Sur ce point là, il te ressemble beaucoup. Je crois que la seule manière pour lui de nous dire ce qu'il ne va pas, c'est de lui parler sans l'incriminer.
— Je suis d'accord avec toi. J'ai juste peur... qu'il se renferme un peu plus et qu'il fasse comme... Nick. Je ne veux pas le voir souffrir, Cal.
— Moi non plus et on va tout faire pour. D'accord ?
Gillian hocha la tête puis Cal l'embrassa avant de poursuivre son nettoyage.
Le soir même, Seth fit de nouveau le mur et courut jusqu'à cette colline qu'il avait autrefois gravie. Il sentit ses poumons brûlés, mais il continua à fournir encore plus d'efforts pour atteindre le sommet. Une fois en haut, il reprit son souffle, son coeur cogna à tout rompre dans sa poitrine, son sang battit dans ses oreilles, puis ne pouvant plus contenir sa rage, il hurla. L'incompréhension, la tristesse, la solitude. Tout lui semblait que mensonge et cruauté dans ce soit disant royaume qu'on appelait civilisation, où personne ne méritait son trône. Injustice était pour lui le mot qui résumait ce qu'il voyait et ressentait envers ces Hommes égoïstes dépourvus de sentiments et de raisons. Des êtres qui pour la plus part ne faisaient que fouler cette terre sans prendre en considération ceux qu'ils côtoyaient. Il se demanda s'il était le seul à avoir cette pensée puis balayant ces amères réflexions, il rebroussa le chemin à la lueur de la lune pour retrouver sa maison.
Le jour suivant, la famille Lightman se prépara à partir pour un week-end de détente à la grande maison. Chacun prépara sa valise puis Cal les rangea une par une dans la voiture. Il s'apprêta à récupérer le sac de Seth, mais celui-ci préféra le mettre de lui-même sur la banquette arrière à ses pieds pour laisser de l'espace dans le coffre pour son chien. Le père regarda son fils entrer dans la voiture avec colère et ferma le coffre avec un soupir d'exaspération lorsque Punk prit sa place. Gillian arriva à ce moment là et posa une main tendre sur son bras pour lui signifier que se mettre en colère n'allait rien arranger.
— Em' nous rejoins là bas ? demanda Nicholas, en ouvrant la porte arrière.
— Oui, répondit Gillian, c'était plus pratique pour elle de partir de l'université.
Nicholas hocha la tête et entra dans la véhicule avec sa sœur. Gillian s'installa derrière le volant alors que Cal prit place sur le siège passager. Prêts à partir, la conductrice enclencha le démarrage de la voiture et s'engagea sur la route. Durant le trajet, elle regarda dans son rétroviseur Nicholas et Louise discuter en riant puis elle tourna son regard sur Seth qui, le visage fermé, regardait le paysage défiler en écoutant de la musique avec ses écouteurs. Cela l'attrista jusqu'au moment où elle sentit une tendre pression sur son bras. C'était la main de son mari qui lui signifiait sa présence. Elle esquissa un sourire puis continua de se concentrer sur sa route. Après une heure de trajet, ils arrivèrent à destination et remarquèrent aux abords de la maison des voitures déjà stationnées, présageant que bon nombres de leurs amis étaient déjà arrivés. Gillian se gara entre un 4X4 et une voiture de collection et devina que les Booth et les Jane devaient être sur les lieux.
— Tient, il y a la voiture de Em', informa Cal.
— Génial ! s'extasia Louise, en sortant rapidement du véhicule avec Nicholas.
Seth fit de même, mais avec beaucoup moins d'entrain.
— Je sens que cela va être un long week-end, soupira Gillian.
— Ça va le détendre, la rassura Cal, avec un sourire.
— Espérons-le, dit-elle, en quittant à son tour la voiture avec son mari.
Une fois dehors, le couple regarda avec joie Emily prendre Louise et Nicholas dans ses bras. Elle remarqua au loin son père et Gillian et s'empressa de venir à leur rencontre pour les embrasser. En retrait, Seth regarda la scène avec contrariété.
— Seth ! Ça va ? dit-elle, en prenant joyeusement son petit frère dans ses bras. Celui-ci esquissa un léger sourire puis se détacha de sa sœur sans dire un mot. Emily ne s'en préoccupa pas, caressa tendrement Punk, et demanda au couple :
— Vous avez fait un bon voyage ?
— Comme d'habitude, répondit Gillian souriante, un peu de bouchons sur la sortie de la capital, mais sinon aucun problème !
— Tant mieux ! Pratiquement tout le monde est déjà arrivé ! Je sais pas si oncle Leroy va apprécier ça, mais il aura beaucoup de cadeaux !
— Peut-être qu'on aura enfin le droit à un sourire de sa part sur les photos, répliqua Cal.
Emily ria alors que Gillian réprimanda son compagnon de sa mauvaise blague. Chacun récupéra son sac dans le coffre puis entra dans l'immense demeure pour les déposer dans leur chambre respective. Après quoi, la famille Lightman rejoignit leurs amis dans le jardin arrière pour saluer la trentaine de personnes qui venaient de faire le déplacement pour participer à l'événement. Tables et chaises avaient été sorties spécialement pour un pic-nique extérieur. Pendant que certains mettaient le couvert, d'autres terminèrent de préparer le repas dans la cuisine. Heureux, Punk profita du grand espace pour courir dans tout le jardin. En amenant des plats, Cal vit les jumeaux Reece et Jake Castle chahuter prêt des flûtes de champagne et les sermonnèrent :
— Les garçons ! Si je vois une seule flûte de champagne à terre, je vous jette dans le lac !
— Oui oncle Cal ! dirent en cœur les deux adolescents, en arrêtant leur course poursuite avant de la reprendre aussitôt lorsque l'expert en mensonge n'était plus dans leur champ de vision.
— Je sens que le gâteau ne va pas faire long feu, souffla Teresa, en voyant les jumeaux Castle en pleine bataille de grains de raisins.
Aidant Teresa à mettre le couvert, Kate suivit le regard de celle-ci et prit ses fils en flagrant délit de bêtises juvéniles.
— Reece, Jake ! arrêter ça toute suite ! s'écria-t-elle.
Les jumeaux s'arrêtèrent aux cris de leur mère jusqu'au moment où un grand homme brun les attaqua avec des cacahuètes.
— Non mais je rêve ! s'exclama-t-elle, en reconnaissant son mari. Rick qu'est-ce que tu fais ?
— Bah euh... les cacahuètes vaut dix point... alors..., bredouilla l'écrivain, avec une une poignée d'arachides dans la main.
— Arrêtez ça toute suite et aller chercher la salade !
— Oui madame..., marmonnèrent les trois Castle, en trainant des pieds jusqu'à la maison jusqu'au moment où ils reçurent des projectiles de tomates cerises sur leur tête.
— 20 points ! s'écrièrent deux jeunes filles hilares.
— C'est pas vrai, Lily et Alexis s'y mettent aussi..., soupira Kate complètement désespérée.
— Laisse-les Kate, ils s'amusent, dit Samantha, en pliant des serviettes en papier pour chaque convive.
— On voit que tu n'as jamais essayé d'enlever des taches de tomates en plus de mayonnaise sur des vêtements !
Sam et Teresa rirent à cette remarque et continuèrent de placer le couvert sur les tables.
Les préparatifs terminés, tout le monde s'était réuni autour des tables et commencèrent le festin dans la bonne humeur.
— 60 ans Leroy ! s'exclama Cal pour son ami en bout de table. Ça va en faire des bougies sur ton gâteau, t'as pas peur qu'il s'effondre !
— Ça ne risque pas d'arriver, renchérit Jack O'Neill, ça sera un gâteau en béton comme la machine qu'il est ! Et ne vous moquez pas de lui, je vous signale qu'on a le même âge...
— Le mystère est levé ! clama House, en se servant généreusement d'haricots-vert. Gibbs est en réalité un homme-machine venu du futur, c'est pour ça qu'il ne montre aucune émotion. Dis moi, tu marches à l'essence ou au sans plomb ? Non, parce que je me suis peut-être trompé pour ton cadeau...
Gibbs leva ses yeux au ciel sous les rires hilare de ses amis masculins.
— Rhoo vous ne pouvez pas le laisser tranquille, les réprimanda Kate. C'est son anniversaire je vous le rappel !
— Bah oui, Kate ! répondit House. Quoi de mieux que des railleries sur son âge de la part de ses meilleurs copains pour le féliciter de sa longue traversée !
— C'est vrai, surtout que House pourra toujours te prêter sa canne lorsque tu en auras besoin ! répliqua Richard.
— Ha-ha très drôle, fit House, avec sarcasme. Si ça ne te dérange pas, je préférais la garder pour faire des croches pattes à des écrivains qui se croient aussi amusant que notre ministre de la santé qui promet plus d'employés pour nos urgences ! Je te laisse deviner qui est le plus drôle des deux... Petit indice l'un gagne mieux sa vie que l'autre.
Richard s'était rembruni à cette attaque personnelle alors que tout le monde s'était mis à rire à ses dépends. Au cours du repas, Gillian partagea diverses anecdotes avec ses amis puis tourna son regard sur Seth pour voir si celui-ci s'était détendu. Malheureusement, l'adolescent gardait toujours cet air renfermé depuis qu'ils avaient quitté leur domicile et semblait refuser toute discussion avec ses amis. Au moment du dessert, Mac Taylor et Horatio Caine amenèrent deux gâteaux décorés de glaçage avec les mots "Joyeux Anniversaire Leroy" et de trente bougies sur chacun d'eux. L'ensemble des invités chantèrent en cœur la célèbre chanson "Happy Birthday" qui se conclut par une bruyante ovation.
— Allez Gibbs souffle tes bougies ! scanda Abby.
— Si tu t'évanouie, mets ta tête dans le gâteau, ça t'évitera une commotion ! ajouta House. Demande à Wilson si tu ne me crois pas !
— Je te signale que c'était toi qui m'avait mis ma tête dans le gâteau à mon dernier anniversaire, jasa Wilson.
— Fantastique journée ! confirma House tout sourire.
Gibbs esquissa un rictus et prit une grande inspiration avant de souffler sur toutes les bougies qui s'éteignirent sous les applaudissements de ses amis.
— Besoin d'un masque à oxygène ? demanda House à Leroy.
— C'est toi qui en aura bientôt besoin si tu continues, répliqua Gibbs, en découpant un morceau de son gâteau pour le gober entièrement.
— O-k, je vois que la vieillesse te rend plus aigri que d'habitude...
— Qui veut du gâteau au chocolat ? proposa Mac, en voyant plusieurs mains qui se levèrent.
Après avoir manger du gâteau, Dinnozo se leva avec un verre de champagne et déclara :
— J'aimerais porter un toast à l'homme qui m'a offert plus de frappes sur la tête qu'il y a de bougies sur ces gâteaux ! Plus sérieusement... tu es le meilleur patron qui m'ait été donné d'avoir et... j'espère être encore là lorsque tu dépasseras la centaine!
— Et moi, ajouta House avec un verre à la main, j'espère que tu garderas encore dans vingt ans cette coupe de cheveux pour comparer ton vieillissement sur les photos !
Sans s'y attendre, le médecin reçut un morceau de gâteau sur son visage, faisant éclater de rire toute l'assistance.
— Je vois, vraiment très adulte Gibbs, marmonna House, alors que Leroy afficha un sourire.
— Allez-y prenez le en photo, il sourit ! s'exclama Richard, alors que Abby s'empressa de prendre une photo de l'agent du NCIS pour capturer ce moment inédit. Au bout d'un moment, Patrick proposa de donner les cadeaux à l'homme du jour, qui fut d'abord très circonspect lorsqu'il reçut un lave vitre pour voiture de la part de Monk. Le détective expliqua avec embarras qu'il trouvait toujours sa voiture de fonction sale en raison de ses missions pour le NCIS et qu'il en faisait des cauchemars répétés. Gibbs eut aussi le droit à des outils de menuiserie de la part de la famille Jane, un nouveau roman écrit par Temperence, des tickets de foot de Seeley, des tickets de Monster Truck de House, des chemises de la famille Castle, de la bière du Minnesota de la part des O'Neill, des dvd de la part de Dinnozo, des vinyles de Rock et Jazz des Lightman et une superbe canne à pêche de la part des Shepherd. Entouré par une avalanche de cadeaux, Leroy ne sut pas quoi dire à part un merci général à tous ceux qui avaient fait le déplacement. Sur quoi, Richard s'était levé avec d'autres garçons pour dire qu'ils avaient une autre surprise pour lui. Craignant le pire, Leroy avait plissé ses yeux de suspicions lorsque le groupe composé de Jack, Cal, Patrick, et Richard l'avait entouré et soulevé avec sa chaise pour le transporter jusqu'au ponton du lac afin de le jeter à l'eau.
— Désolé Gibbs, mais c'est la tradition ! s'exclama Patrick amusé, en regardant son ami nager sur place tout en fusillant ses amis du regard.
— J'peux aller te chercher ta nouvelle canne à pêche pour te sortir de l'eau ! proposa Derek, rieur.
— Et moi la raclette de Monk pour essuyer toute cette eau ! renchérit House.
En réprimande, Gibbs jeta une vague d'eau sur la bande qui éclata de rire avant de nager jusqu'au bord de la rive pour sortir de l'eau.
— Tu veux de l'aide oncle Gibbs ? proposa William Jane, en tendant la main à l'agent du NCIS.
— Mauvaise idée, Will', l'avertit son père alors qu'il avait vu un fin sourire se dessiner sur ses lèvres de Leroy.
Et en effet, une seconde plus tard le jeune Jane se retrouva dans le lac avec le farceur sexagénaire.
— Je te l'avais dit fiston ! ria Patrick.
— L'expression c'est pas tel père tel fils ? demanda House, avant de pousser Patrick dans le lac.
Patrick retourna à la surface de l'eau et passa une main sur son visage mouillé avant de s'exclamer :
— T'as de la chance que j'ai déjà trois costumes de ce genre dans mon placard !
— Tout le monde à l'eau ! cria Reece et Jake, en courant sur le ponton pour sauter dans le lac avec tous les autres adolescents.
De l'autre côté du jardin, Gillian regarda rieuse ses amis et le groupe d'enfants s'amusés dans l'eau jusqu'au moment où elle remarqua que Seth ne participait pas au jeu. Elle le chercha du regard et remarqua que l'adolescent s'était isolé dans un coin du jardin.
— Il y a un problème avec Seth ? demanda Teresa à son amie. Il me semble étrange depuis qu'il est arrivé...
— Seth traverse une période difficile, avoua Gillian, et je ne sais plus trop quoi faire pour qu'il me parle.
— Christine a aussi eu sa période, dit Tempérance.
— Et qu'est-ce que tu as fait ?
— Oh, je l'ai invitée à une conférence de deux heures sur l'anthropologie à Vancouver ! Et elle a adoré !
— Heu... bien que Seth aime les films d'horreur, je crois pas que cela fonctionnera... Temp'.
— Mais Temp' n'a pas tout à fait tort Gill', ajouta Kate, tu pourrais toujours faire quelque chose qui lui plait et peut-être qu'il s'ouvrira plus à vous.
— Peut-être... j'essayerai. Merci les filles, dit Gillian avec un chaleureux sourire.
Alors que la bataille d'eau allait de bon train dans le lac, Nicholas décida d'aller chercher son petit frère pour qu'il participe à la fête. Il le trouva assit sur les marches de la terrasse et l'interpella avec un air enjoué :
— Hey Seth, tu viens ? Tout le monde est en train de jouer dans le lac !
— Non merci.
— Pourtant, y'a oncle Rick qui est en train de poursuivre Patrick dans l'eau ! C'est hilarant, on dirait deux anguilles dans l'eau! Allez viens !
— Je t'ai dit non ! répéta plus durement Seth. Je suis très bien ici.
— Très bien..., fit Nicholas avec désappointement. Si passer ton temps à faire la tête te comble, j'vais pas te gêner.
— Désolé de ne pas avoir de quoi sourire, ma vie n'est pas aussi parfaite que la tienne !
Nicholas réprima sa colère par un sourire contrarié et répliqua :
— Ok, c'est quoi ton problème ?
— Mon problème, c'est que t'es toujours là alors que j'ai rien demandé !
— Écoute, je suis venu te voir parce que je croyais que t'avais envie de passer du bon temps, mais si c'est pour jouer les cons t'aurais peut-être pas dû venir à une fête d'anniversaire.
— Les parents m'ont obligé de venir !
— Ils t'y ont obligé parce qu'ils pensaient que ça te ferait du bien et que ça te changerait les idées, au vu de toutes les conneries que tu n'as pas cessez de faire ces dernières semaines ! D'ailleurs, ça serait pas mal que t'arrête tes bagarres au lycée, où tu vas finir par y être exclu pour toute l'année ! C'est ça que tu veux ? Fumer de l'herbe toute ta vie et quitter le lycée sans avoir de diplôme ?
— T'es pas mon père ! s'exclama Seth agacé, en se levant d'un bon pour faire face à son grand frère.
— En effet, je le suis pas, mais crois pas qu'il va te laisser t'en tirer qu'avec des petites punitions.
— C'est vrai que toi tu as eu l'droit à une voiture, comme quoi certains on des passes droits !
— Qu'est-ce que t'as Seth ?
— Rien fiche moi la paix !
— Non ! Dis-moi c'est quoi ton problème ?
— C'est toi mon problème !
— Quoi ?
— Le fils parfait ! Le fils chéri !
— T'es en colère contre moi ? C'est pour ça que tu fais tous ces trucs débiles ?
Seth ne répondit pas et contracta ses tempes de rage.
— Sérieusement ? Tu fais souffrir maman et papa juste parce que tu crois que les parents me préfèrent à toi ? T'es vraiment un imbécile, tu le sais ça ?
— Va te faire voir !
Ne se contenant plus, Seth fonça sur son frère et provoqua une violente bagarre. Punk rejoignit les combattants et aboya pour les séparer. Alerté par les cris, Mac arriva sur les lieux et sépara les deux frères en plein combat.
— Hey ! Qu'est-ce qui vous arrive tous les deux ?
Seth tenta de se dégager de son emprise, mais s'immobilisa lorsqu'il vit son père arriver à grands pas vers ses fils.
— Je peux savoir ce qu'il se passe ? exigea-t-il sévèrement.
— Ils se battaient, expliqua Mac. Apparement Seth s'est jeté sur Nicholas.
— Pourquoi ? demanda le père à ses enfants qui refusaient de répondre. Très bien, Nick va avec les autres, Seth tu vas dans le bureau du rez-de-chaussée, ta mère et moi on va t'y rejoindre.
Taylor libéra Seth qui fit volte-face à sa famille pour rejoindre la pièce dictée par son père. Celui-ci rejoignit Gillian pour l'avertir de la situation et allèrent tous les deux retrouver leur fils dans le bureau du rez-de-chaussée pour mettre les choses au clair. Il ne pouvait plus continuer ainsi. Dans le bureau, Cal regarda son fils se contrôler pour ne pas exploser et donna un coup de pied dans une chaise en lui ordonnant sèchement :
— Assis-toi, fiston.
Le jeune homme obéit à contre cœur. Les deux parents se tenaient, côte à côte, adossés contre le rebord du bureau et dévisagèrent leur petit dernier avec les bras croisés contre son corps. Il avait le visage fermé et le regard fixé sur ses pieds. Un langage non-verbal particulièrement révélateur sur ses futures intentions. Il allait être difficile de faire la conversation, mais cette fois-ci Cal n'allait certainement pas le ménager.
— Ta mère et moi on a parlé à ta principale, débuta Cal. Elle nous a dit qu'un témoin lui avait révélé que Riley t'avait provoqué lors de la première bagarre, mais il a refusé de lui en donner la raison.
— Quand ça vient d'un autre, tu le crois…, marmonna-t-il avec véhémence.
— Attention, ne commence pas mon grand ! ragea Cal.
— Cal, le tempéra Gillian. Seth, Mme Simmons nous a dit que nous devions te parler pour comprendre la raison de ton geste…
L'adolescent resta silencieux.
— Seth, on s'inquiète beaucoup pour toi, s'attrista sa mère. On voudrait comprendre ce qui ne va pas…
— Depuis quand vous vous intéressez à moi, lâcha-t-il, avec insolence.
— Hé sur un autre ton jeune homme ! l'avertit sévèrement Cal.
— Qu'est-ce que tu veux dire par là, Seth ? s'inquiéta Gillian.
— J'suis l'oublié de la famille ! s'emporta-t-il. Le dernier ! Le looser ! Celui né après Abel et Caïn ! Après le fils légendaire ! Parfait en sport, parfait en étude, parfait avec… les filles ! Le fils parfait !
— Quoi… on a jamais pensé ça… Ton père et moi nous n'avons jamais fait de distinction avec ton frère et tes soeurs. Nous t'aimons de la même manière et…
— Je ne vaux rien ! s'écria-t-il furieusement.
— Seth…, fit Gillian attristée, en posant une main tendre sur son visage perturbé. Je t'en prie parle-nous mon chéri, on peut t'aider…
— Comme pour Nick…, siffla-t-il, en se levant pour s'éloigner de sa mère.
C'était une remarque extrêmement blessante. Gillian en fut particulièrement touchée et ne trouva plus les mots pour continuer cette discussion. De là, Cal s'empressa de se mettre à hauteur du visage de son fils pour rageusement répliquer entre ses dents :
— Tu veux faire du mal à quelqu'un, vas-y défoule toi sur moi, mais pas sur ta mère ! T'as compris ?
Seth ne répondit pas.
— J'te demande si tu as compris ? répéta Cal plus fortement.
Tétanisé, Seth hocha lentement la tête.
— Bien..., dit-il plus posément, on commence enfin à dialoguer.
Le père se redressa et plaça ses mains dans les poches de son jean.
— Pourquoi t'as pris de l'herbe ?
— Je… Je n'en avais besoin…, bredouilla-t-il.
— Pourquoi ? insista Cal, en déplaçant son regard sur le visage de son fils afin de capter la moindre trace de mensonge.
— Pour me sentir bien. Être quelqu'un d'autre…
— Qu'est-ce qui se passe ? Tu n'as jamais eu besoin de ça, tu n'es pas comme ça Seth.
— Comment peux-tu savoir qui je suis ! s'emporta-t-il encore. Je ne le sais même pas moi-même !
— Tu es notre fils…, répondit sa mère peinée.
— J'aurai aimé ne pas l'être, répliqua-t-il, sans dénier regarder les expressions blessées de ses parents.
Il savait que ces paroles étaient des plus blessantes, mais il n'avait pas réussi à ravaler ses mots. Tout ce qu'il voulait c'était qu'on le laisse tranquille, qu'on l'oublie.
— Chérie, laisse nous s'il te plaît, demanda Cal à sa femme, sur un ton neutre.
— Cal, je...
— S'il te plaît Gillian.
Devant le regard appuyé de son mari, Gillian quitta la pièce en jetant un dernier regard attristé à son fils. Une fois seul, Cal prit silencieusement place sur une chaise, regarda son fils fixer rageusement un point invisible et commanda :
— Revient t'assoir.
Seth poussa un soupir et obéit à son père. Celui-ci pointa un doigt inquisiteur sur son fils et dit :
— Tout d'abord, je veux que tu me promettes que plus jamais tu ne manqueras de respect à ta mère, est-ce que c'est bien clair ?
Sans regarder son père, Seth hocha lentement la tête.
— Je veux te l'entendre dire !
— Oui, je te le promets, répondit-il avec agacement, en regardant son père droit dans les yeux.
— Deuxièmement, la prochaine fois que je te vois te battre avec ton frère comme tu l'as fait, tu le regretteras.
— Pourquoi ? Tu vas me frapper ? cracha-t-il.
Cal se maîtrisa face à cette insolence typiquement Lightmanienne.
— Écoute moi bien Seth, je vois bien que tu essayes de te battre contre quelque chose qui te ronge et que tu n'es pas encore prêt à nous en parler. Mais, une chose est sûre, c'est que tu n'as aucun le droit de t'en prendre à ta famille et de réagir comme le dernier des crétins. C'est pas comme ça que ta mère et moi on t'a élevé, alors je te prierai d'avoir plus de considération pour nous. Tu as un toit, une famille qui t'aime, tu ne manques de rien. Et quoique que tu puisses vivre ou faire, jamais je ne te ferai de mal, tu m'entends jamais je ne ferai de mal à l'un de mes enfants. Mon père était le dernier des salauds, mais je ne suis pas comme lui.
À ces derniers mots, Seth regarda son père et vit de la tristesse dans son regard à la simple pensée que son fils puisse imaginer qu'il lèverait un jour la main sur lui.
— Je t'aime mon grand, et je ferai tout pour te protéger, mais il faut que tu nous fasses confiance. Et si tu as besoin de temps pour nous parler, je te le laisse. En contrepartie, je veux que tu respectes chaque membre de cette famille à commencer par ta mère. Je veux aussi que tu arrêtes de sécher les cours et de te battre. Je sais qui tu es Seth, parce que tu es mon fils, alors je suis sûr que tu feras le bon choix.
Cal regarda son fils refouler un flots d'émotions et décida de le laisser tranquille pour qu'il puisse réfléchir à ses agissements. Mais avant de partir, il ajouta :`
— Oh et tu es privé de gâteau et tu resteras toute l'après-midi dans ta chambre pour t'être battu avec Nick.
Une fois son père parti, Seth effaça rageusement une larme qui s'était logée au coin de son œil après cette discussion entre père et fils.
Le soir venu, certains regardèrent un film proposé par Dinnozo alors que d'autres jouèrent à des jeux société. S'inquiétant pour son frère, Emily abandonna une partie de poker avec son amie Alexis pour aller voir comment celui-ci se sentait. Elle se rendit dans sa chambre et frappa à la porte de celle-ci sans entendre de réponse. Plongée dans l'obscurité, elle prit l'initiative d'y entrer et remarqua une silhouette allongée dans un lit.
— Seth ? C'est Em, tu vas bien ?
Sans réponse, la jeune fille s'approcha prudemment de son frère qui avait la tête tournée contre le mur. La faible lueur de la lune éclaira le visage attristé de l'adolescent. Cela brisa le cœur de sa sœur qui s'allongea à ses côtés pour l'envelopper dans ses bras et le réconforter. Étrangement, ce geste eut pour effet de faire pleurer le jeune homme de tout son être. Ravalant sa tristesse, Emily répéta des mots réconfortants à son petit frère éploré. Elle resta ainsi avec lui jusqu'à ce qu'il s'endorme d'épuisement. Déambulant dans les couloirs pour chercher des couvertures, Gillian remarqua la porte entre-ouverte de la chambre de Seth et la poussa légèrement pour voir avec attendrissement Emily endormit au côté de son frère.
— Il va aller mieux, souffla Cal, qui venait d'apparaître à ses côtés.
— Je voudrais tellement qu'il sache à quel point je l'aime..., dit-elle, avec une pointe de tristesse dans la voix.
— Il le sait, chérie, dit-il, en posant une main sur son épaule pour la caresser. Il reviendra.
Gillian regarda avec un pincement au cœur son fils puis Cal la serra contre lui pour la réconforter.
Le dimanche matin, Emily se rendit dans la cuisine et tomba sur Gillian qui était en train de se préparer une tasse de café.
— Bonjour Em' ! dit-elle avec un large sourire. Alors, bien dormi ?
— Bonjour Gillian ! répondit la jeune fille, sur le même ton enjoué. Tu sais bien que c'est toujours mieux de dormir ici, que dans une minuscule chambre d'étudiante avec une coloc' écoutant exclusivement des boys band...
— Ton père comprend parfaitement ce que tu endures depuis son week-end en camping avec ton oncle Rick et sa playlist des années 90 !
Les deux femmes rirent en imaginant Cal vivre ce cauchemar puis Gillian proposa une tasse de thé à la jeune fille qui l'accepta volontiers. Elle s'installa autour de la table et remua sa boisson matinale en arborant un air interrogatif.
— Un problème Emily ? s'inquiéta Gillian.
— C'est... juste que... hier soir je suis allée voir Seth dans sa chambre et... je l'ai vu pleuré.
Étonnée par cet aveu, Gillian prit lentement place autour de la table et demanda avec inquiétude :
— Est-ce qu'il t'a dit ce qu'il n'allait pas ?
— Non... Je suis juste restée avec lui, le temps qu'il se calme. Tu sais comment il est. Seth n'arrive pas toujours à dire ce qu'il ressent et il a besoin de temps pour comprendre ses émotions... Je crois que c'est de famille...
— Oui, en effet..., dit Gillian avec un mince sourire.
— Gillian, Seth semble traverser une période difficile, mais... je sais qu'il va réussir à surmonter ça. Seth est un garçon fort. Tu ne le sais peut-être pas, mais il m'a aidée plusieurs fois à surmonter des épreuves difficiles dans ma vie. Il m'appelle très souvent lorsque je suis à l'université et... il ne m'a jamais lâchée. Je ferai tout ce que je peux pour qu'il aille mieux, c'est mon petit frère et je l'aime...
Gillian fut émue par ses dires. Elle embrassa la jeune fille puis la laissa partir lorsque Alexis lui proposa une balade au bord du lac. Le reste de la journée défila avec plusieurs activités puis en fin d'après-midi chaque famille entreprit de plier bagages afin de retrouver leur domicile et leur quotidien. Sur le chemin du retour, Cal remarqua l'air plus paisible sur le visage de son benjamin et il sut que celui-ci était sur la voie de la réflexion. Les jours suivants, Seth ne provoqua aucun écart de conduite au lycée, ni avec sa famille avec qui il n'échangea pas le moindre mot. Gillian voulut plusieurs fois lui parler, mais Cal l'en dissuada en affirmant qu'il le ferait de lui-même. Elle espéra que cela arrive bientôt et ses prières ne tarda pas à s'exaucer...
Un soir d'orage chez les Castle, Kate entendit sonner à la porte de leur appartement New-Yorkais et interrompit une partie de poker avec sa famille pour aller ouvrir.
— Ne trichez pas ! les prévînt-elle, en les pointant avec son index. Je le saurai si vous avez regarder mes cartes !
— Promis maman ! scandèrent leur jumeaux et leurs filles.
— Compte sur nous ! ajouta Richard, avant de glisser subtilement sa main vers le jeu de sa femme.
— Papa ! Ne triche pas ! le sermonna Lily.
Le père afficha une mine contrite et obéit à sa fille. Parallèlement, Kate déverrouilla la porte et fut surprise de découvrir Seth trempé de la tête aux pieds.
— Seth ? Qu'est-ce que tu fais ici ?
— Je peux entrer ? demanda le jeune Lightman.
Surprise par cette visite improviste, Kate s'effaça de la porte et laissa l'adolescent entrer.
— Tu es trempé, dit-elle, donne-moi ta veste.
Seth s'exécuta puis déclara :
— Je suis désolé de vous déranger comme ça, mais il faut que je parle à oncle Rick.
— Euh... tes parents savent que tu es là ?
L'adolescent ne répondit pas et Kate devina par son expression quelle en était la réponse.
— Seth...
— S'il te plait tante Kate, j'ai vraiment besoin de lui parler. C'est urgent.
Confronté à l'air suppliant du jeune garçon, la lieutenant se plia à sa volonté et l'emmena jusqu'au salon.
— Seth ? s'exclamèrent les membres de la famille Castle.
— Qu'est-ce que tu fais ici ? demanda Richard.
— Ne me dis pas que tu as fait tout ce chemin pour que je te rende ton jeu-vidéo ? demanda Reece.
— Non, réfuta Seth, je... je suis venu voir... oncle Rick. J'ai besoin de te parler.
Richard croisa le regard tout aussi déconcerté de son épouse et dit :
— Euh... bien sûr, suis moi. Allons dans mon bureau, on sera plus tranquille.
Devant les regards intrigués des Castle, Seth suivit son oncle dans son bureau et regarda celui-ci s'installer derrière sa table de travail. Il offrit à son invité de s'assoir mais celui-ci refusa. Richard racla sa gorge et demanda :
— Alors... Que se passe-t-il ? Je suppose que si tu as fait tout ce chemin ce n'est sûrement pas pour connaître la fin de mon prochain roman.
— Non, bien que j'aimerais être le premier à le lire.
— Ton vœux est exaucé, cher neveu, dit l'écrivain avec un fin sourire.
Richard perdit vite son air joyeux lorsqu'il vit apparaître une expression de tristesse sur le visage de Seth.
— Parle-moi Seth. Dis-moi ce qu'il ne va pas.
Le jeune homme resta silencieux, le regard plongé dans le vide.
— Tu sais que tu peux tout me dire.
Seth se détourna et fixa un livre écrit par son père rangé sur l'étagère de son parrain.
— Je... Je crois que rien ne va chez moi en ce moment, souffla-t-il.
— Que veux-tu dire ? Tu parles de tes problèmes au lycée ?
— Si ce n'était que ça, répliqua-t-il avec ironie. J'ai... l'impression que tout s'écroule autour de moi et que je ne peux rien contrôlé. La dernière fois que j'ai ressenti ça, c'était quand mon père était dans le coma. Je le voyais en train de mourir et je ne pouvais strictement rien n'y faire.
— Tu as été là pour lui et c'est tout ce dont il avait besoin.
— Pourtant, la première chose à laquelle j'ai pensé à ce moment là, c'était de faire exactement ce qu'avait fait Nick et... je n'ai rien fait. Je n'ai rien fait pour protéger mon père, ni ma famille. Alors que Nick a osé se mettre en danger pour nous protéger, il a risqué sa vie.
— Nick a fait ça parce qu'il avait peur de perdre votre père. Il a perdu son sang-froid et il aurait pu aussi perdre la vie si Gibbs n'avait pas été là. Toi, tu es resté auprès des tiens, de tes sœurs et de ta mère et tu les as aidées à garder espoir.
— J'aurai voulu faire plus. J'aurai voulu être plus... Nick a toujours été mon model, comme mon père. Ils n'ont peur de rien.
— C'est faux, ton père à constamment peur.
Surpris, Seth se retourna à ces mots et envoya un regard interrogateur à son oncle.
— Il a peur de vous perdre, reprit-il. Chaque jour qui passe, il n'a qu'une seule crainte c'est qu'il puisse arriver quelque chose à un membre de sa famille. Et il n'est pas le seul. Chaque enquête que nous faisons avec Kate, me rappelle la chance que j'ai d'avoir une si belle famille, mais aussi le risque que nous prenons pour la protéger. Beaucoup d'entre nous avons perdu des êtres chers, mais le pire qu'il puisse arriver est de perdre un enfant. Patrick, Jack et Leroy connaissent cette douleur et nous ne pouvons qu'imaginer ce qu'ils endurent. Ton père était présent lorsque Anne-Charlotte est décédée. Il a vu ton oncle Patrick disparaître petit à petit. C'était pour lui, inimaginable. Cal était le parrain de Anne-Charlotte. Elle était comme sa propre fille.
— Papa ne nous parle jamais d'elle.
— Ton père a toujours été très secret sur ses sentiments, mais ta mère l'a aidé à en parler. Cela a demandé du temps, mais aujourd'hui il va mieux, grâce à elle et à vous quatre.
— J'ai toujours pensé que mon père m'estimait moins que mon frère ou mes sœurs.
— Pour quelle raison tu penses ça ?
— Nick est le fils idéal. Je ne peux pas le blâmer. Mais moi... Je me suis toujours senti différent... Hors de tout ce qui m'entoure. Je n'arrive pas à comprendre... les autres... ni à rentrer dans le moule...
— Crois-le ou non, ton père est exactement pareille et il s'en est toujours servi comme d'une force.
— On n'est pas pareille, souffla-t-il, meurtri.
— Vous l'êtes bien plus que tu ne le penses.
— Il y a quelque chose que tu ne sais pas sur moi et ma famille non plus. Quelque chose que je cache depuis plusieurs années.
— Cela a-t-il un rapport avec tes déboires au lycée ?
— Tu sais pourquoi je me suis battu contre cet abruti de Riley ?
Richard secoua négativement la tête.
— Il a osé dire à un élève qu'il n'était qu'une taffiole de mes deux.
— Tu as voulu défendre un camarade, pourquoi ne l'as-tu pas dit à tes parents?
— L'élève c'était moi oncle Rick et si je l'avais dit à mes parents, ils auraient su.
— Quoi donc ?
Seth appuya son regard et Richard comprit.
— Ooh, je vois... Tu... ne l'as jamais dit à personne ?
— Personne n'est au courant.
— Pourquoi n'as-tu rien dit à tes parents?
— J'ai peur...
— Seth, tes parents sont très ouverts sur le sujet, il t'accepteront tel que tu es et...
— Je sais. Ce n'est pas de ça dont j'ai peur. Si je leur dit, alors cela deviendra réel et je ne pourrais plus...
— Te cacher.
— C'est ça. Et je ne sais pas si je pourrais me montrer aussi courageux que mon frère ou mon père.
— Tu es un jeune homme très courageux Seth. Tu as déjà défendu des causes et des camarades en détresses et je sais que tu seras capable de faire fi de ce que les autres peuvent penser de toi. Tes parents t'ont élevé dans l'amour et le respect le plus total. Tu es porteur de leurs valeurs, alors si certains ne s'arrêtent qu'à ta sexualité, ils ne valent pas d'interêt à te connaître. Tu es intelligent, drôle, talentueux, promis à un avenir des plus brillants. Alors, oublie tous ces imbéciles qui n'ont aucune idée de ce qu'ils sont et de ce qu'ils disent. La plupart passeront leur vie sans connaître le sens de savoir aimer, ce qui est pour moi la chose la plus triste qui puisse exister. Tu vaux mieux qu'eux. Et si... certains continuent de s'en prendre à toi, ils risquent de se confronter à une multitude d'agents gouvernementaux...
Touché par ces mots, la gorge de Seth se serra d'émotion alors que Richard se leva pour prendre son neveu dans ses bras.
— Je serai toujours là pour toi, Seth, promit Richard. Tout comme ta famille. Tu n'es pas seul, tu es aimé n'oublie jamais ça. D'accord ?
L'adolescent se détacha de l'écrivain et hocha lentement sa tête.
— Bien..., dit Richard avec un sourire. On va prévenir tes parents que tu es là et... tu vas passer la nuit ici. J'espère que tu aimes la cuisine de ta tante !
Seth afficha une légère grimace qui fit éclater de rire Richard.
— Ne t'inquiète pas, dit-il, on a une plante qui récupère tout ce qu'on ne mange pas !
Le lendemain, Seth était revenu à Washington. Devant l'entrée du Lightman Group, il prit d'abord une grande inspiration, poussa les portes du bâtiment et demanda à Anna où se trouvait ses parents. La réceptionniste lui répondit qu'ils étudiaient une vidéo dans le laboratoire et lui demanda de patienter quelques instants dans le bureau de son père, le temps qu'elle revienne les chercher. Cinq minutes plus tard, Cal et Gillian le rejoignirent et découvrirent leur fils qui les attendait avec une expression désolée. La mère de famille se précipita sur lui pour le prendre avec soulagement dans ses bras.
— Tu nous a fait peur Seth !
— Excuse-moi maman...
Elle se recula légèrement et posa une main tendre sur sa joue.
— Tu vas bien mon chéri ?
— Oui ne t'inquiète pas maman.
L'adolescent tourna son regard sur son père et vit que celui-ci le regardait avec le même soulagement que sa mère.
— Il faut que je vous parle, dit-il avec solennité.
Gillian afficha un air inquiet devant le visage grave qu'affichait son fils. Celui-ci convia ses parents à s'installer sur le canapé alors qu'il prit place sur le fauteuil pour un meilleur échange.
— Tout d'abord, je tenais à m'excuser pour ma fugue et pour mon comportement de ces derniers jours... Beaucoup de choses se sont passées récemment et... je ne savais pas comment gérer ces émotions... C'est l'une des raisons pour laquelle je m'en prenais à vous... Je regrette sincèrement tout ce que je vous ai fait subir.
Cal regarda attentivement le langage du corps de son fils qui semblait être en plein débat intérieur.
— Si je ne vous ai pas encore parlé de ce sujet, c'est que moi-même je n'arrivais pas à comprendre ce qu'il m'arrivait et que j'ai mis un temps avant de l'accepter... J'espère qu'entre nous cela ne changera rien... Ça fait plusieurs années que je mens, à vous et à moi-même... Et aujourd'hui, je sais que je dois me montrer honnête pour pouvoir avancer et pour ne plus ressentir cette colère en moi...
Seth marqua une pause, ferma ses yeux et lâcha :
— La raison pour laquelle j'ai frappé Riley, c'est qu'il injuriait un élève parce qu'il... était gay et... que cet élève, c'était moi.
La révélation lâchée, Seth regarda les expressions de ses parents qui étaient restées inchangées depuis le début de la conversation. Aucune surprise ou colère n'était apparue sur le visage des experts en mensonge. Un doux sourire se dessina sur le visage de Gillian alors qu'elle prit la main de son fils dans la sienne pour le regarder avec tendresse.
— Chéri... Rien ne changera entre nous. Tu es notre fils et nous t'aimons...
L'adolescent posa son regard anxieux sur son père qui n'affichait toujours aucune émotion et craignit pendant un instant que celui-ci ait une mauvaise réaction. Puis, il fut soulagé lorsqu'il le vit étirer un sourire et lui demander de se lever pour le prendre dans ses bras sous les yeux attendris de sa mère.
— Seth, dit-il, je veux que tu saches que je t'aime autant que ton frère et tes sœurs et à l'avenir je veux que tu puisses me parler sans crainte de ce qui te tourmente. Je serai toujours là pour toi, on sera toujours là pour toi. Quoiqu'il advienne. Tu es notre fils. Ne me cache plus rien Seth.
Seth approuva les dires de son père puis se détacha ému de celui-ci.
— L'herbe, c'est terminé ! le prévint-il, en agitant son index devant son visage.
— Oui papa...
— Et les bagarres aussi ! ajouta sa mère.
— Sauf si c'est pour mettre une autre raclée à ce Riley, répliqua Cal.
— Cal...
Seth ria légèrement. Tout d'un coup, Cal afficha une expression d'interrogation et demanda :
— D'ailleurs, comment Riley savait que tu étais...
— Il m'a vu avec un garçon avec lequel je sors, avoua l'adolescent.
— Est-ce la raison de tes disparitions répétées ?
— En partie...
Cal et Gillian sourirent au malaise de leur fils puis le prirent une nouvelle fois dans leurs bras, sans poser plus de questions sur ce mystérieux garçon. Seth se demanda si son père avait toujours su ce qu'il était et s'il lui avait sciemment laissé le temps nécessaire pour leur faire cet aveu. Il préféra ne jamais en connaître la réponse et se dire que son amour filial indéfectible lui suffisait. Pour fêter ces retrouvailles, Cal proposa à son fils d'aller manger quelque chose à l'extérieur. Lorsqu'ils furent de retour chez eux, Seth salua son chien qui était heureux de retrouver son maître puis convia son frère et ses sœurs de se réunir dans le salon pour leur avouer la raison de son comportement et de ses tourments en s'excusant platement d'avoir pu les blesser. Aucun mot ne fut prononcé. Cela inquiéta Seth jusqu'au moment où Emily et Louise le prirent instinctivement dans leurs bras. Nicholas regarda son frère sans un mot puis le prit à son tour dans ses bras en déclarant :
— La prochaine fois que quelqu'un t'embête, laisse-moi aussi participer pour que je lui règle son compte.
— Je je te le promets, ria-t-il légèrement. Si tu fais de même pour moi.
— Promis, p'tit frère.
— On risque de se faire mal aux mains.
— C'est clair ! Vu le nombres d'ennemis que tu te fais !
— Moi ? Tu rigoles t'as plus d'ennemis que moi !
— Le moins dernier tu as mis de la mousse à raser dans au moins trois casiers !
— Pas ma faute, ils avaient traité un premier année de petite merde, fallait bien que je leur règle leur compte !
— Et les papiers toilettes dans les arbres des Peterson !
— Ils ne triaient pas leurs déchets, alors j'ai fait comme eux !
— Quoi ? éclatèrent de rire Louise et Emily.
Non loin, Gillian regarda les quatre enfants rirent de bon cœur et arbora un large sourire en les voyant aussi heureux.
— Tu vois, j'avais raison, souffla Cal, à ses côtés.
— C'est vrai... Merci, Cal.
— Pourquoi ?
— D'être un père génial.
— Oh, c'est un plaisir. J'ai pris exemple sur la mère la plus génial... Mrs. Doubtfire.
À cette plaisanterie, Gillian offrit une légère frappe à son compagnon qui ria à cette remontrance.
— On a de la chance..., dit Cal, en regardant ses enfants.
— C'est vrai.
Gillian embrassa tendrement son mari puis lorsque les deux parents entendirent leur fils Seth se vanter d'avoir enflammer des sacs remplis des crottes de chiens devant la porte des voisins, ceux-ci se lancèrent un regard mutuel et clamèrent :
— Seth t'es punis pour deux semaines !
— Quoi ? s'injuria-t-il. Mais c'est injuste ! Si j'ai fait ça, c'est pour punir ses capitalistes qui pensent que la terre est une poubelle géante !
— Je crois qu'on a retrouvé notre fils, lança Gillian, en tapotant le torse de son compagnon avant de se rendre dans la cuisine.
— Ouais, soupira Cal, en suivant sa femme tout en entendant l'adolescent divaguer sur les droits civiques américains pour clamer son innocence déjà perdu d'avance.
Seth s'était posé beaucoup de questions sur la raison qui faisait de lui ce qu'il était, et le but qu'il devait un jour atteindre dans cette jungle qu'était l'humanité. Qu'importe les sommets qu'il devait gravir où les chemins tortueux qu'il devait emprunter, il rallierait quoiqu'il arrive son foyer. Et même si par moment il se perdait au bord de la route, il savait qu'il pourrait toujours retrouver son chemin auprès des siens. On ne naissait pas tous avec les mêmes chances. Il se savait privilégié d'être si aimé et entouré qu'il se promis un jour de partager et de sauver cet amour et cet espoir que d'autres ne connaissaient pas. On lui avait donné une seconde chance et il allait la saisir sans compromis.