Droit chemin
Un accident de train conduit le Lightman Group à enquêter entre responsabilité et non-dits... En parallèle un ami de Nicholas prend ses distances pour la plus grande inquiétude de celui-ci. Le jeune homme demande de l'aide à son père au passé similaire. Genre: Général Note: Cal et Gillian sont mariés (Nick et Louise ont 17 ans, Seth 14 ans, Emily 23 ans) |
Une rencontre de basket importante avait lieu au lycée de Nicholas. Pour l'occasion, Cal avait invité Seeley Booth, un ami du FBI fanatique de sport. Dans les gradins, les deux hommes regardèrent les joueurs évoluer sur le terrain. L'équipe de Nicholas menait de peu le jeu. Le match était à la fois intense et captivant.
— Quel match ! Merci de m'avoir invité Cal ! s'exclama Booth enthousiaste.
— C'est normal ! sourit Cal. Je connais personne d'autre que toi qui aime autant le sport. Enfin, peut-être Leroy, mais il avait du boulot…
— Gill' n'a pas pu venir ? Elle qui adore le basket !
— Non, elle est sur une affaire. Elle m'a dit d'y aller à sa place. Je ne regrette pas l'échange !
— Tu m'étonnes ! sourit-il avant d'hurler sa joie avec le public alors que Nicholas venait de mettre un panier dans le camp adverse. — Il est génial ton fils !
Cal arbora un large sourire qui s'estompa lorsqu'il remarqua une chose étrange sur le terrain. Un joueur semblait avoir quelques difficultés à se déplacer. L'expert en mensonge lu le nom sur le maillot du joueur et comprit qu'il s'agissait de Matthew Turner. L'un des amis de son fils. Il suivit du regard le jeune homme qui passa en mode attaque sur le terrain pour se retrouver sous le panier de l'équipe adverse.
Nicholas, encerclé par des adversaires, en profita pour donner le ballon à son ami démarqué. Rapidement, Matthew lança le ballon dans le panier, mais rata son tire. À ce geste, Cal capta une grimace de douleur s'afficher sur le visage du joueur. Malgré cela, le match se termina, quelques minutes plus tard, par la victoire in extrémis de l'équipe de Nicholas.
Suite à ce match particulièrement intensif, les joueurs se changèrent et prirent leur douche dans les vestiaires. Le coach de l'équipe vainqueur entra et s'exclama pour l'ensemble des joueurs :
— Bien joué les gars ! Mais je veux qu'on force sur la défense la prochaine fois !
Le coach passa devant Matthew, assis sur un banc, et le sermonna :
— Matt, tu étais trop distrait sur le terrain. Il faut que tu viennes plus souvent à l'entrainement. Les bons joueurs s'entrainement tous les jours. Si tu veux une bourse universitaire, il faut que tu te défonces sur le terrain.
— Oui coach…, approuva Matt, sans réelle conviction. S'habillant d'un nouveau t-shirt, Nicholas capta l'expression dépitée de son ami, lassant expressément ses chaussures.
— Bien, je veux voir tout le monde demain à l'entrainement ! Les retardataires feront 50 pompes !
Le coach partit, Nicholas jeta un regard intrigué à son ami Matthew et s'approcha de lui.
— Matt ? Ça va ?
— Ouais, ça va, dit-il, avec un drôle de sourire.
— T'as manqué beaucoup d'occasions aujourd'hui. C'est pas ton genre.
— Je suis un peu fatigué en ce moment… c'est pour ça…, répondit évasivement le blond.
Nicholas comprit que son ami n'en dirait pas plus et dit :
— J'comprends. Chris et moi, on va faire un tour au parc tout à l'heure. Tu veux venir avec nous ?
— Heu… j'peux pas, j'ai ma petite soeur qui m'attend. Une prochaine fois peut-être.
Matthew se leva et récupéra son sac de sport sous les yeux déconcertés de Nicholas.
— Tu ne prends pas ta douche ?
— Je la prendrai chez moi. À plus, Nick.
D'une petite moue de sa bouche, Nicholas regarda son ami partir et ferma pensivement la porte de son cassier de vestiaire.
À l'extérieur, Cal attendit son fils avec Seeley. Il aperçut Matthew quitter le bâtiment scolaire. D'un regard aiguisé, il capta une expression de colère sur son visage lorsque le jeune homme regarda l'écran de son téléphone portable.
— Ton fils est là ! indiqua Seeley.
Cal détourna son regard. Il arbora un large sourire à la vue de son fils qui s'avança dans leur direction.
— Voilà le champion ! scanda Booth tout sourire.
— On a gagné de peu ! souleva Nicholas.
— Vous avez quand même gagné !
— Et ça mérite bien un dessert au Royal Diner ! proposa Cal, les yeux remplis de fierté pour son fils.
— C'est moi qui paye ! répliqua Booth. Cal s'apprêta à refuser, mais Seeley ajouta : — Tu m'as invité laisse-moi te rendre la pareille.
Les trois hommes prirent la voiture pour se rendre au diner du centre ville. Une fois arrivée, le groupe s'installa à une table près de la vitrine donnant sur la rue. Nicholas proposa d'aller prendre leur commande à la serveuse au bar. Habitué du lieu, il entama une discussion avec la serveuse ravis de revoir le jeune homme. Booth profita de l'absence momentanée de l'adolescent afin d'avoir une discussion privilégiée avec son ami expert en mensonge.
— Ça va toi en ce moment ?
— Ouais, tout baigne. Et toi ? répondit Cal.
— Ça va, parfois un peu surmené par le boulot, mais je ne me pleins pas.
— 'Faut bien payer les factures, plaisanta t-il.
— Ouais, sourit-il.
Tout d'un coup, Seeley émit une mine pensive comme s'il hésitait à prendre la parole. La tête penchée sur le côté, Cal le remarqua et demanda :
— T'as un truc à me dire ?
On ne pouvait rien lui cacher. Booth toussota et déclara sur un ton incertain :
— Hum… Tu sais, Temp' et moi on se dit tout. Elle trouvait que Gillian était fatiguée ces derniers temps. Alors… elle lui a posé des questions et tu connais Bones, elle ne lâche pas l'affaire tant qu'elle n'a pas de réponse concrète.
Cal hocha la tête.
— Et elle m'a dit qu'en ce moment vous aviez des problèmes d'argent…
Un bras contre le dossier de sa chaise, Cal émit une petite moue de sa bouche et objecta d'un geste de la main :
— C'est qu'une passade.
— Cal, la dernière fois que vous étiez autant dans le rouge, tu as tellement travaillé que tu as failli avoir une crise cardiaque !
— Je… Je n'ai pas fait de crise cardiaque ! Ok ?! s'offensa t-il avec une grimace vexée.
— Tu es tombé dans les vapes et tu es allé à l'hôpital ! répliqua Booth avec sérieux. Le médecin t'avais dit de ralentir ou les choses deviendraient plus sérieuses !
— Ça s'est passé il y a plus de 10 ans maintenant ! Et j'étais parti aidé Patrick sur une affaire en Californie en pleine saison estival ! Je n'avais pas prévu la crème solaire et si tu envoies un anglais sous un soleil de 35 degrés, c'est normal qu'il fonctionne plus en fin de journée ! En plus, je ne sais pas comment tu peux savoir ça ! J'avais dit à Patrick d'en parler à personne !
Booth appuya son regard pour toute réponse.
— Mouais… Il t'a tout raconté… Gill' n'est pas au courant ?
— Je ne crois pas.
— Tu ne lui dit pas un mot, le prévint-il d'un air grave avec un doigt menaçant. J'veux pas qu'elle s'inquiète pour une chose qui n'a plus lieu d'être.
— Mmh…, bredouilla Booth.
— Seeley !
— Promis, je ne lui dirai rien ! approuva t-il contrarié.
— Bien…
— Tu sais, si tu as des problèmes d'argent, on peut vous donner…, débuta innocemment l'agent du FBI.
Sans attendre, Cal comprit où son ami voulait en venir et refusa catégoriquement :
— Non ! Pas d'argent entre amis.
— Ok, pas de prêt, mais laisse moi au moins t'aider. Le FBI serait ravi que tu travailles comme consultant sur des affaires. Je sais que tu ne portes pas le FBI dans ton coeur, mais le directeur Dilon est plus pondéré qu'autrefois. Il sait le talent que tu as et si tu veux la vérité, je crois qu'il regrette beaucoup de t'avoir mis de côté.
— Il n'a pas appelé Rader à la rescousse pour se consoler…, maugréa Cal contre son rival.
— J'ai fait en sorte qu'il ne passe pas les portes des bureaux.
Cal lâcha un léger rire. Booth l'imita et ajouta plus sérieusement :
— Si tu acceptes, je dirai à Dilon que tu travailles seulement avec moi ou pour le service d'Aaron. Comme ça tu te feras de l'argent, sans être embêté par les bureaucrates, et moi… je pourrais veiller sur toi.
— Laisse-moi y réfléchir.
— Ok, tu sais où me contacter.
Cal acquiesça puis indiqua à son ami de ne plus parler de ce sujet alors que Nicholas était revenu avec leur commande. L'adolescent posa respectivement les deux desserts glacés devant son père et Seeley et prit place autour de la table. Les yeux gourmands, il piqua sa cuillère dans sa coupe de glace exclusivement chocolatée pour en prendre une bouchée.
— Glace au chocolat avec un supplément de crème chantilly, sourit son père. Tu t'es fait plaisir.
— C'est oncle Seeley qui paye alors j'en profite ! sourit Nicholas.
— Qu'est-ce que t'as choisi ? demanda Cal à son ami, d'un regard suspicieux sur sa glace.
— Glace à l'ananas, j'adore ça ! jubila Seeley.
L'expert en mensonge émit une expression de dégout et répliqua :
— T'as toujours eu mauvais goût en dessert !
— C'est toi qui dit ça ?! Tu choisis des parfums qui n'existent même pas ! Glace au thé et pourquoi pas glace aux pruneaux pendant qu'on y est !
— Ça a des vertus pour le corps ! Il faut protéger son transit.
— Mouais…
Nicholas s'amusa de la dispute enfantine des deux hommes, qui dériva rapidement sur leur préférence respective entre le football européen et américain. Il n'y avait pas une seule chose sur laquelle les deux amis étaient d'accord et pourtant leur amitié résistait toujours au temps.
Au Lightman Group, l'équipe travaillait, avec l'aide de Reynolds, sur une mince affaire d'accident de train. Lors d'un trajet pourtant habituel, le train avait fait une sortie de route et causé deux morts ainsi que plusieurs blessés. Dans cette histoire, l'agence avait été sollicitée par le maire de la ville. Celui-ci voulait obtenir le maximum d'éléments afin de les présenter au procureur général, avant le jugement au tribunal entre la société de chemin de fer et les plaignants qui étaient victimes de la collision. Le Lightman Group ne devait prendre position pour aucune des deux parties. Il devait seulement départager le vrai du faux et savoir si la société était entièrement responsable de cet accident.
Ria et Loker avaient été envoyés sur les lieux de l'accident pendant que Gillian analysait, dans le laboratoire, les différentes vidéos envoyées par la société des chemins de fer. Devant l'écran, un détail gêna la psychologue qui repassa la séquence.
— Tu te fais une séance de film pendant tes heures de travail ? plaisanta une voix masculine derrière elle.
— J'aurai préféré un film romantique…, soupira t-elle, en arrêtant la vidéo. Elle se retourna et regarda son mari s'approcher d'elle pour l'embrasser furtivement sur les lèvres. Elle arbora un sourire et lui demanda sur un ton particulièrement joyeux :
— Alors, comment était le match ?
— Génial, ton fils a encore mené son équipe à la victoire !
— C'est vrai ! J'aurai tellement voulu être là…, dit-elle, d'une petite moue boudeuse. Cal s'amusa de son air enfantin et la rassura d'un fin sourire :
— Il y aura d'autres matchs.
— Mmh...
— Alors, ça avance votre affaire de train ?
— Je suis en train d'analyser une vidéo que la société m'a envoyé… J'ai l'impression qu'il y a quelque chose d'étrange…
— Montre-moi ça, dit-il, en focalisant son regard sur l'écran. Gillian activa la vidéo. Sur celle-ci, un train fonça à tout allure jusqu'à faire une embardée et se renverser violemment sur le flanc.
— Le train a respecté la limite de vitesse, indiqua Gillian, mais j'ai comparé ce moment avec un autre jour. Regarde.
Elle activa une autre vidéo. Cal fixa toute son attention sur les images qui défilaient sous ses yeux.
— Le train ralentit, souligna t-il perplexe.
— Exact, et j'ai remarqué qu'il le faisait à chaque fois. Excepté ce jour où il y a eu l'accident.
— Le chauffeur a survécu ?
— Oui, il n'a eu qu'un bras cassé. Il a eu beaucoup de chance.
— De la chance, je ne sais pas, mais heureux d'être en vie, surement. Vous l'avez interrogé ?
— Il va venir au Lightman Group.
— J'peux t'aider si tu veux.
— Ria et Loker sont allés poser des questions au sous-directeur de la société. J'attends leur retour.
Cal acquiesça et décida de changer de conversation :
— J'ai vu Seeley. Je l'ai invité au match.
— Il va bien ?
— Ouais… il m'a dit qu'il s'inquiétait pour nous. Temp' lui aurait dit qu'on avait des problèmes d'argent…
— Oh non ! s'affola t-elle. J'avais dit à Temperance de ne pas en parler…
— C'est son mari, et Temp' ne connait pas vraiment la notion de confidentialité, sourit-il.
— Je suis désolée Cal, s'excusa t-elle peinée. Elle me posait des questions et je ne savais pas quoi lui répondre…
— Ce n'est pas grave chérie. Il m'a proposé de faire quelques consultations pour le FBI. Je n'ai pas encore accepté, mais ça peut mettre du beurre dans les épinards…
— Ça peut être une solution, seulement si cela reste occasionnelle. Tu travailles déjà assez comme ça au Lightman Group.
— Et c'est toi qui dit ça, s'amusa t-il.
— Je travaille, mais je sais m'arrêter quand il le faut. Toi, tu es capable de travailler même la nuit.
— Sauf, si je sais que tu m'attends pour faire des choses plus intéressantes…, répliqua t-il, en se rapprochant aguicheusement de sa femme.
— Cal, souffla t-elle rieuse, par leur soudaine proximité.
— Ce soir, on pourrait réserver notre soirée… qu'est-ce que tu en dit…
— J'en dis que cela me semble d'être un bon programme, mais que je ne peux rien te promettre…
— On peut toujours le faire dans mon bureau, y'a un canapé…
Il pencha sa tête vers son visage. Un fin sourire carnassier se dessina sur ses lèvres. Il caressa sa bouche avec la sienne dans le but de la faire languir. Elle ria intérieurement de ses manières séductrices et lui répondit suavement :
— Alors là, tu rêves chéri.
— Comment tu sais, répliqua t-il amusé, avant de capturer ses lèvres pour échanger un baiser. Ils s'embrassèrent tendrement avant d'être brusquement séparés par leur réceptionniste à la porte d'entrée.
— Dr. Lightman ! proclama Anna. Les deux experts en mensonge tournèrent d'un même chef leur regards sur la réceptionniste. Face à leurs expressions interrogatives, Anna comprit qu'ils ne savaient pas à quel Lightman elle s'adressait.
— Enfin… Gillian, se rectifia Anna. Le chauffeur du train accidenté est arrivé.
— Très bien, merci Anna, dit Gillian d'un air embarrassé. Anna regarda suspicieusement ses deux patrons. Cal passa une main sur sa bouche alors que Gillian laissa divaguer son regard sur le sol. Ils n'étaient vraiment pas des professionnels de la dissimulation. Anna leva un sourcil et tourna les talons. Déconcertée, Gillian ferma ses yeux et soupira :
— Maintenant tu sais pourquoi je ne veux pas qu'on fasse l'amour au bureau !
— Il suffit juste de fermer la porte à clé ! rétorqua t-il, avec les bras écartés.
— T'es incroyable…, soupira t-elle, en se dirigeant vers la sortie avec son compagnon sur les talons.
— Quoi ? En plus on l'avait déjà fait !
— C'était bien avant la naissance des enfants et… tu avais été insupportable toute la journée parce que Rick avait planté ton ordinateur pour jouer dessus…
— Je peux l'être aujourd'hui !
— Pas de sexe au travail, clarifia t-elle.
— T'es pas drôle…, bougonna t-il.
Gillian secoua sa tête et entra, avec son mari particulièrement déçu, dans une pièce aseptisée. À l'intérieur, le chauffeur du train attendait patiemment la psychologue dans le cube lumineux. Ce dernier était anxieux, inspirait profondément et caressait le dos de sa main de manière répétitive comme pour se rassurer. Gillian entra, seule, dans le cube. En retrait, Cal resta derrière les parois transparentes pour observer la scène. À côté de lui, Killian, un employé, se trouvait derrière un ordinateur pour capter toutes les fuites émotionnelles de l'interrogé. Un procédé extrêmement précis rendu possible grâce aux caméras placées dans la cage de verre. Gillian prit posément place en face du conducteur et le salua avec un sourire chaleureux :
— Bonjour M. Olson.
— Hum, bonjour…
— Vous savez qui nous sommes ?
— On m'a dit que vous étiez des professionnels dans la détection de mensonge.
— C'est exact. Je vais vous poser quelques questions au sujet de l'accident. Vous êtes prêt ?
— Allez-y.
— Vous vous appelez bien, Gary Olson ?
— Oui, confirma t-il.
Désormais, Gillian avait une base pour travailler la suite de l'interrogatoire.
— Depuis combien de temps travaillez-vous pour la compagnie ?
— Ça fait plus de vingt ans que je suis conducteur de train et je n'ai jamais eu d'accident.
Derrière la vitre, Cal déclara :
— Il élude la question…
Gillian remarqua la même chose que son mari, mais elle avait aussi capté l'anxiété débordante du conducteur de train. Un sentiment qui pouvait biaiser l'entretien si elle n'avait pas su à quoi cela était dû.
— M. Olson, dit-elle, d'une voix douce. Notre agence ne prend partie ni pour la compagnie, ni pour la partie civil. Nous donnons seulement les éléments au procureur général qui donnera ensuite notre étude au tribunal. Tout ce que nous souhaitons, c'est la vérité.
— Ce travail c'est toute ma vie…, répondit Olson avec émotion. J'ai conduis des trains dans le nord du pays pendant toute ma carrière, mais le jour où ma femme est morte, j'ai décidé de me rapprocher de ma fille. Elle vient d'avoir un petit garçon… Alors, quand j'ai su que cette compagnie cherchait des chauffeurs, j'ai pris le job…
— Avez-vous fait une dépression ou avez-vous déjà eu des pensées suicidaires ?
— Non ! réfuta Olson presque offensé. Enfin... j'étais déprimé à la mort de ma femme, mais jamais je n'ai songé au suicide ! Vous savez, il ne me restait plus qu'un an à tirer avant de prendre ma retraite… Je… deux personnes sont mortes à cause de moi…, termina t-il, le visage affligé.
Gillian exprima sa compassion puis se retourna vers Killian pour lui faire signe à travers la vitre. Le jeune homme comprit le message et apporta un ordinateur portable qu'il déposa sur la table. La psychologue remercia l'employé puis présenta à Olson les mêmes vidéos qu'elle avait montré plus tôt à son mari.
— Savez-vous pourquoi le train pouvait ralentir à cet endroit ?
— Je… Je ne sais pas, répondit Olson, d'un froncement de sourcils. Normalement, il ne devrait pas. Nous avons des limites à respecter à cause des horaires de départs et d'arrivées. Si un train venait à ralentir, à chaque fois sur la ligne, cela entraînerait des retards et des pertes d'argent et même des accidents…
— Auriez-vous vu des problèmes techniques qui aurait pu conduire à causer cet accident ?
— Non, affirma Olson. Je peux vous assurer que si la compagnie le savait, elle aurait rectifié le tire. Cette ligne est l'une des plus fréquentées du réseau. Elle n'aurait jamais pris le risque de la mettre hors d'usage.
Gillian remercia Olson pour ses réponses sincères et retrouva Cal et Killian à l'extérieur du cube.
— Olson ne mentait pas, conclut-elle. Il ne sait pas ce qui a pu faire dérailler le train.
— Pourtant, il y avait du remord sur son visage, releva Killian.
Cal lança un regard blasé à son employé et répliqua :
— Vous en auriez aussi si c'était vous qui aviez conduit un train tuant deux personnes.
À cette remontrance, Killian mima une expression contrite. Il devait vraiment apprendre à tenir sa langue ou il finirait comme Loker.
— Olson est à ce poste depuis moins d'une semaine, indiqua Gillian. Il faudrait interroger les conducteurs précédents qui ont conduit sur cette ligne. Killian, recherchez-les et faites les venir ici dès demain.
— Oui Dr. Lightman, s'exécuta l'employé, en prenant le chemin de la salle d'analyse. Seul avec son mari, Gillian souffla mélancoliquement :
— Il était à un an de sa retraite.
— On va trouver les responsables, promis Cal. Ça te dit un Slush à l'orange ?
Il la connaissait par coeur. La psychologue esquissa un sourire et sortit avec son compagnon à l'extérieur de l'agence pour une pause sucrée bien méritée.
Au même moment, Eli et Ria étaient au siège de la compagnie pour réclamer des réponses, concernant l'accident de train aux conséquences mortelles. Les deux collègues se trouvaient dans le bureau du sous-directeur de la compagnie ferroviaire. Il s'appelait Franck Cobbs. C'était un homme avec un léger embonpoint et les cheveux dégarnis. Il portait un beau costume qui contrastait avec les uniformes de ses employés. Derrière son grand bureau, il regarda ses nouveaux invités avec un air plutôt contrarié. Une caméra était cadrée sur son visage et filmait tout le déroulement de l'entretien. Aucun indice ne devait être manqué.
— Savez-vous ce qui aurait pu entrainer l'accident du train ? demanda Loker.
— Erreur humaine, répondit Cobbs. Cela arrive. Olson était un nouveau chauffeur. Il est probable qu'il ne connaissait pas la ligne et qu'il a fait une mauvaise manipulation.
— M. Olson a plus de vingt ans d'expérience et d'après son dossier, il n'a eu aucun accident, contra Ria.
— Comme on dit, il était là au mauvais endroit au mauvais moment.
— Comme les deux passagers qui sont morts dans cet accident, vous voulez dire ?
Le directeur esquissa un rictus de mépris. Torres tentait de le repousser dans ses retranchements. Cobbs se leva pour s'assoir sur le rebord de son bureau. D'un raclement de gorge, il déclara :
— Écoutez… La compagnie est prête à vous donner tout ce que vous désirez dans cette enquête. Nous n'avons rien à cacher Mlle Torres.
Ria regarda la position des mains de Cobbs placées devant son entrejambe. D'un mince sourire, elle signifia avec un regard sur ses mains :
— Pourtant, vos mains disent le contraire.
Cobbs jeta un regard intrigué à Ria et décroisa rapidement ses mains en comprenant l'allusion.
Après cette infructueuse entrevue, Torres et Loker décidèrent d'aller voir le chef de la maintenance, M. Moran. L'employé était dans un immense entrepôt où toutes les pièces détachées et trains hors services étaient réparés. En plein travail, Moran marchait activement en répondant aux questions des deux jeunes experts en mensonge.
— Connaissiez-vous Gary Olson ? l'interrogea Loker.
— Pas très bien, répondit fortement Moran, pour se faire entendre des machines bruyantes environnantes. Je l'ai vu une fois pour son premier jour. Il avait l'air d'un gars sympa et appliqué. On est nombreux sur le site. On voit les conducteurs lorsqu'il faut faire un point sur la sécurité.
— Et vous ne l'aviez pas fait avec Olson ?
— Ce n'est pas moi qui m'en occupait ce jour-là !
— Qui était-ce ? réclama Ria.
Moran s'arrêta et désigna d'un mouvement de tête un homme occupé à souder des parties métalliques.
— Ethan Brock ! Il travaille ici depuis cinq ans comme employé de la maintenance des chemins de fer.
— M. Moran ! l'appela au loin un ouvrier.
— Il faut que je vous laisse, s'excusa Moran. Si vous avez d'autres questions, vous savez ou me trouver.
Loker et Ria acquiescèrent et tournèrent leur regard sur Brock qui utilisait désormais un chalumeau avec beaucoup de dextérité.
— Il n'a pas l'air commode, grimaça Eli. On devrait peut-être attendre l'heure du déjeuner…
Ria jeta un regard blasé à son collègue et s'avança vers Brock avec détermination.
— Comme tu veux…, soupira t-il, en suivant les pas de la brune. Si t'as pas peur de finir en steak grillé…
— Ethan Brock ! l'appela Ria, afin que l'employé arrête son activité. Ce dernier arrêta son outil et tourna son regard acéré sur Torres.
— Qui l'demande ?
— Nous travaillons pour le Lightman Group. On a des questions à vous poser au sujet de l'accident de train.
— J'ai pas grand choses à vous dire…, réfuta Brock, en reprenant son activité.
— Votre patron, M. Moran, nous a dit que ce jour là vous étiez responsable de la maintenance de la ligne.
— On est plusieurs à travailler dessus.
— Ça ne veut pas dire que vous n'êtes pas autant responsable, répliqua Ria.
Tiquant à ces mots, Brock fusilla Torres du regard et ragea :
— Vous êtes en train de me dire que c'est de ma faute si le train a déraillé ?!
— Non, répliqua rapidement Eli, effrayé à l'idée que Brock puisse utilisé ses outils contre eux. — On cherche simplement la vérité.
— C'est pas c'que avait l'air de dire votre copine.
— Elle ne s'est pas levée du bon pied c'est pour ça…
— Vous avez vérifié l'état des lieux avant que le train démarre, enchaina Ria.
— Ouais, moi et mon équipe on a rien trouvé.
— Pourtant, je vois que quelque chose vous gène.
— P'être que c'est vous, contra t-il, avec un rictus de mépris.
— Aussi, mais je crois que vous croyez à vos propres mensonges.
— Si vous le dites, persiffla Brock, d'un haussement d'épaules. J'ai du travail.
— Vous arrivez à dormir la nuit en sachant que deux personnes sont mortes dans cet accident ? demanda Ria, revêche que Brock ne présente pas plus de sentiments.
— Des personnes meurent tous les jours ! Si j'dors pas la nuit, c'est parce que je me demande comment je vais payer les médicaments de ma femme avec le salaire de misère qu'on reçoit ! À votre place, je chercherai les vrais coupables!
— Qui sont les coupables pour vous ? l'interrogea Loker. Cobbs dit qu'Olson aurait fait une erreur.
Brock émit une expression de désaccord avec les propos d'Eli. Ria discerna l'émotion et répondit à sa place :
— Vous n'y croyez pas. Cobbs vous dégoûte, pourquoi ?
Brock lâcha un long soupir. Les deux experts en mensonge ne partiraient pas tant qu'il n'aurait pas répondu. L'air méprisant, il déclara :
— Y'a des gens qui seraient prêts à faire n'importe quoi pour faire du bénéfice. C'est tout ce que j'ai à dire.
Brock jeta un dernier regard à Loker et Torres et s'éloigna pour s'occuper d'autres réparations.
— Cobbs a dû faire quelque chose, argua Ria.
Les deux collègues s'échangèrent un regard entendu et contactèrent Gillian afin de lui faire parvenir les derniers éléments de l'enquête.
En fin de journée, l'équipe ne pouvait plus travailler sur l'enquête en cours et reporta leur travail au lendemain. Cal et Gillian congédièrent leurs employés puis retrouvèrent leur foyer. Ils profitèrent de l'absence de leurs enfants, encore au lycée, pour travailler le budget du Lightman Group. Cloisonnés dans leur salle à manger, ils tentèrent de trouver un moyen afin de faire rebondir l'agence au bord du dépôt de bilan. Le résultat était sans appel. Il allait falloir faire des économies drastiques. L'agence était onéreuse et les investisseurs se faisaient moins nombreux. Les deux experts en mensonge étaient littéralement submergés sous la paperasse administrative. Face à un tel ras de marré bureaucratique, Gillian retint sa tête entre ses mains et soupira désespérée :
— Cal… Je ne sais vraiment pas ce qu'on va faire cette fois-ci...
— Chérie… C'est qu'une mauvaise passe. On a déjà vécu ce genre de situation.
— Pas de cette envergure ! Bientôt on devra licencier des employés ! En plus de ça Nick et Lou' vont bientôt être à l'université... Et Seth au lycée... Avec les frais... Je ne sais même pas si on pourra...
La psychologue se refusa de terminer sa phrase. Cal contempla le visage affligé de sa femme. Le coeur serré, il se leva et se plaça derrière elle afin de l'entourer tendrement avec ses bras.
— Je te promets qu'on va s'en sortir Gill'…, souffla t-il. Toi et moi, on a surmonté des épreuves bien plus difficiles. Tu verras, on va remonter la pente.
Gillian lâcha un léger soupir et acquiesça. Il avait toujours su la réconforter même dans les pires moments. Cal l'embrassa tendrement puis lui proposa :
— Ça te dit un pouding au chocolat ?
-- Tu sais à force de vouloir me consoler, je vais prendre deux kilos, Cal ! s'amusa t-elle.
— Sauf, si on fait du sport dans notre chambre…, répliqua t-il, avec un sous-entendu. Elle ria et Cal se rendit dans la cuisine lorsqu'il entendit des voix juvéniles dans l'entrée. Un instant plus tard, il découvrit ses deux fils et sa fille revenir des cours accueillis par leur chien Punk. Ils embrassèrent leur mère et rejoignirent leur père dans la cuisine pour prendre quelque chose à grignoter. Gillian commença à ressembler les documents sur la table en demandant à ses enfants :
— Vous avez passé une bonne journée les enfants ?
— Ça peut aller, répondit Louise en embrassant son père. Elle prit place autour de l'ilot central et ajouta :
-- Mme. Crowell nous a rendu nos contrôles. J'ai eu un B.
— Et toi ? quémanda Cal à Nicholas, qui attrapa une boite de cookie.
— A + c'était trop facile !
— Évidement, t'es bon en math ! jasa sa soeur.
— Pas que, en physique, en histoire, en sport…, énuméra malicieusement Nicholas, dans l'unique but de faire rager sa soeur.
— Pfff, tu révises même pas alors que moi je suis obligée de travailler plus que toi !
— Hé ouais ! C'est l'aîné le plus intelligent ! proclama t-il, en croquant dans son gâteau qui s'émietta malencontreusement sur le sol.
— Faut voir, riposta son petit frère rieur.
Nicholas lâcha un rire.
— Prend une assiette Nick, le sermonna sa mère.
Il mangeait vraiment comme son père, songea t-elle désespérée. Le jeune homme s'excusa et récupéra une assiette, donnée par son père, pour éviter d'autres saletés.
— N'importe quoi ! s'outragea Louise.
— Si ! Il est prouvé scientifiquement que l'ainé développe un QI plus élevé ! argua son frère avec les même gestes évasifs de ses mains que son père. Heureusement qu'ils se sont arrêtés à deux, sinon tu serais condamnée à rester à jamais dans ta chambre !
— Je te signale que je suis arrivée cinq minutes après toi !
— C'est largement suffisant pour que ton cerveau se soit rétracté à la taille de ce cookie !
— Rhoo tai toi Nick !
Seth ria à nouveau de la joute verbale entre son frère et sa soeur en caressant son chien qui était heureux de revoir son maître.
— Seth, le rappella à l'ordre sa mère.
— Laisse ta soeur tranquille, Nick, le réprimanda son père qui cherchait une cuillère pour le pouding de sa femme. Le jeune homme ne sembla pas vouloir écouter les remontrances de son père qui continua sa plaidoirie inutile :
— Et encore je suis gentil ! Parce qu'il y a des jumeaux qui aspire leur frère ou soeur et en grandissant ils deviennent comme un petit furoncle sur la peau ! Et j'aurai eu juste à appuyer dessus pour t'éclater ! J'aurai eu une plus grande chambre… Tu devrais me remercier ! Grâce à moi, le seul bouton que je peux éclater c'est lui qui est en train d'apparaitre sur ton nez ! indiqua t-il, en pointant du doigt, avec un malin plaisir, le nez de sa soeur.
La jeune fille toucha mécaniquement le bout de son nez et sentit un petit bouton qui avait fait son apparition. Effrayée, elle s'était vite enfermée dans la salle de bain pour trouver un moyen de camoufler cet ornement disgracieux. Seth ria et s'exclama :
— Avant de l'éclater assure toi que ce n'est pas un membre de la famille !
— Seth ! le gronda sa mère, d'un regard réprobateur.
— Quoi ? s'exclama t-il, la bouche en coeur alors que son grand frère ria à ne plus s'en arrêter. Cal ria lui aussi légèrement de la situation, mais pas assez discrètement pour que sa femme le sermonne à son tour.
— Cal !
— J'suis désolé chérie…, s'excusa t-il, avec un sourire qu'il essayait tant bien que mal de réprimer. Les garçons, vous vous excuserez auprès de votre soeur.
— Ok…, soupirèrent t-ils.
— J'ai largement le temps de finir mes devoirs avant qu'elle sorte de la salle de bain, plaisanta Seth.
À ces mots l'adolescent s'éclipsa, avec son chien, dans sa chambre en quatrième vitesse devant les regards blasés de ses parents qui lui commandèrent d'aller travailler au plus vite.
— Au fait, Matt va passer à la maison pour prendre des devoirs en retard, signala Nicholas.
Le jeune homme croqua dans son gâteau puis s'assit nonchalamment autour de la table de la salle à manger. D'un regard perplexe, il observa les quelques documents encore éparpillés.
— Qu'est-ce que vous faites ?
— On travaille, répondit son père. Chose que tu devrais aussi faire.
Nicholas omit les paroles de son père et récupéra une feuille pour l'étudier. D'un froncement de sourcils, il leva son regard intrigué sur le visage de sa mère et demanda :
— Vous avez des problèmes de fric ?
Nicholas capta l'anxiété sur le visage de sa mère. Celle-ci s'apprêta à lui répondre lorsque son mari récupéra rapidement le document des mains de son fils intrusif.
— T'occupe pas de ça. Va faire tes devoirs Nick.
— Comme tu veux, souffla t-il face au regard appuyé de son père. Nicholas se leva et se dirigea vers l'escalier pour rejoindre sa chambre à l'étage.
— Et je veux que tu révises ! ordonna Cal. Pas seulement les chapitres qui t'intéressent !
— Dis ça au bouton qui pousse sur le nez de Lou' !
Cal leva ses yeux au ciel. Ces gosses étaient irrécupérables. À se demander de qui ils tenaient ça…
— Cal, l'interpella Gillian, en rangeant tous les papiers dans une chemise. Les enfants ne doivent pas être au courant pour nos problèmes d'argent. Je ne veux pas qu'ils s'inquiètent. Ils ont déjà traversé trop de choses l'année dernière…
— Ils ne le sauront pas parce qu'on va s'en sortir, la rassura t-il, en l'embrassant dans ses cheveux. Il déposa devant elle un petit pot de pouding au chocolat. La psychologue émit un faible sourire. Elle tendit le dossier à son mari afin qu'il puisse le ranger loin des regards indiscrets de leurs enfants.
Une heure plus tard, Matthew passa, comme prévu, chez les Lightman. Au pas de la porte, Nicholas invita son ami à entrer. Il lui commanda de rester au pied de l'escaliers et disparut à l'étage pour aller lui chercher les devoirs souhaités. Cal passa saluer leur invité en serrant joyeusement sa main :
— Matt ! Ça fait longtemps qu'on ne s'était pas vu, comment tu vas ?
— Bien et vous, M. Lightman ?
Cal discerna une expression négative sur le visage du garçon, bien qu'il répondit :
— De même. Je t'ai vu au match !
— Ah, vous avez dû apprécier, Nick a encore fait des miracles, sourit-il.
— Il a de qui tenir !
Matt ria légèrement.
— D'ailleurs…, poursuivit Cal, avec inquiétude. Tu ne semblais pas en grande forme. J'ai l'impression que tu avais du mal à te déplacer sur le terrain…
— Hum, ouais… Les courbatures ça peut faire souffrir n'importe quel sportif, même les meilleurs ! répondit l'adolescent, en massant mécaniquement son cou.
— Je vois ce que tu veux dire. Je faisais du 110 mètres haies quand j'étais jeune !
— Vraiment ? demanda surprit Matthew.
— Demande à Nick, si tu ne me crois pas !
Au même instant, Nicholas arriva avec une pile de devoirs entre ses mains.
— Qu'est-ce que mon père te raconte encore ! plaisanta Nicholas.
— Il ne me croit pas quand je lui ai dit que j'étais un champion du 110 mètres haies !
— Ouais…, soupira son fils.
— Tu vois ! clama Cal pour Matt.
— Pour fuir les flics de la Dame de fer ! Aussi rapide qu'un lapin…, ajouta t-il sournoisement.
Cal leva ses yeux au ciel. Gillian apparut dans le couloir et salua à son tour le nouveau venu avec enthousiasme :
— Oh ! Bonjour Matthew ! Tu vas bien ?
— Bien, Mme Lightman ! Vous êtes toujours aussi ravissante, complimenta le jeune homme.
— Merci Matthew, sourit-elle. Pourquoi tu ne me dis pas ça toi ! bredouilla t-elle contre son conjoint.
— Parce que si je te le disais tous les jours, à un moment donné tu me traiterais de menteur…
— Mouais…, fit-elle avec suspicion.
Nicholas se déchargea de son poids à son ami et signala :
— Tiens, c'est tout ce que tu as à rattraper pour cette semaine.
— Merci, Nick.
— Ben dit donc… Tu chomes pas toi ! proclama Cal, d'un haussement de sourcils.
— J'étais malade cette semaine, expliqua Matthew, d'une voix légèrement aiguë.
Cal fronça ses sourcils d'interrogation au ton employé par le jeune homme. Il ne put se poser plus de questions sur ces étrangetés non-verbales que ce dernier s'exclama :
— Bon, je vais vous laisser. J'ai des devoirs à rattraper !
— Tu veux que je te raccompagne chez toi ? proposa Nicholas.
— Non, je vais prendre le bus ! objecta rapidement son ami.
— Ça me dérange pas tu sais !
— Non, c'est bon ! Je ne vais pas te déranger, en plus il faut que je passe au supermarché !
— Comme tu veux, laisse-moi au moins attendre le bus avec toi !
Matthew accepta l'offre et les deux amis quittèrent la maison. Gillian passa dans la cuisine, suivit de son compagnon, pour préparer le repas de ce soir.
— T'as vu ? l'interrogea Cal.
Elle sortit les aliments de frigo pour les disposer sur l'ilot central et réclama intriguée :
— Quoi donc ?
— Matthew mentait. Il n'était pas malade cette semaine.
— Il a peut-être séché les cours. C'est un ado tu sais…, répondit-elle, d'un haussement d'épaules.
— Un ado n'aurait pas honte de ça.
— Sauf, s'il le cache à ses parents…
— Dit l'élève modèle, jasa Cal.
Gillian ria et commença sa recette. Une main appuyée contre la table, l'expert en mensonge l'observa pensivement avant d'alléguer :
— J'me demande si tu m'aurais accosté si on avait été dans le même lycée…
— J'étais dans ma période Grease. Tu avais une chance si tu étais un de ces garçons avec un blouson noir !
— J'étais un de ces garçons solitaires et hors la loi, argua t-il avec un air mystérieux.
Elle ria encore et plaisanta :
— Le genre à fumer dans les toilettes et à passer tous ses samedis en salle de retenue !
— On m'appelait le Loup de Londres ! Toutes les filles étaient à mes pieds, mais pour toi j'aurai repris le droit chemin !
— N'importe quoi ! gloussa t-elle.
— Oh yeah baby, scanda t-il, avant de prendre sa femme dans ses bras pour la faire danser. — J't'invite au bal du lycée !
Dans ses bras, Gillian entra dans son jeu en répliquant rieuse :
— Mon père ne veut pas que je traine avec des voyous.
— Je te ramènerai avant qu'il ne s'aperçoive que tu es passée par le treillis de la fenêtre de ta chambre…
Ils rirent puis Cal captura sa bouche pour l'embrasser. Gillian passa ses deux bras autour de son cou pour approfondir l'échange lorsqu'une voix féminine les interrompit :
— Vous avez une chambre pour ça !
Cal jeta un regard blasé à sa fille, Louise, puis répliqua :
— Je sais ! Mais son père refuse que je m'enferme avec elle !
— Quoi ? demanda t-elle perdue.
— Ton père dit des bêtises..., soupira Gillian. D'ailleurs, il en dirait moins s'il m'aidait à faire la cuisine !
— Tu n'arrêtes pas de dire que je cuisine aussi bien que Teresa ! Y'a de quoi se vexer !
Face au regard appuyé de sa femme, Cal attrapa rapidement un sac de pomme de terres pour commencer à les éplucher. Louise ria et entreprit de mettre le couvert pour le repas du soir.
Un peu plus tard, Gillian se mit à la tache de faire une machine à lavée. Elle tria le linge dans la panière familiale lorsqu'un petit objet se déroba des poches d'un jean masculin. Elle se pencha pour le ramasser et se tétanisa lorsqu'elle comprit de quoi il s'agissait. Oubliant la tache ménagère, elle s'empressa de chercher son mari et le trouva dans le salon à regarder la télé avec Louise dans ses bras. À l'encadrement, Gillian l'interpella :
— Chéri, tu peux venir une minute, s'il te plait.
Cal aperçut l'air ennuyé de sa femme et leva un sourcil lorsqu'elle effectua d'étranges signes pour qu'il vienne plus vite. Perplexe, il s'exécuta pour la suivre dans le couloir.
— Qu'est-ce qui se passe ?
— J'ai trouvé ça ! dit-elle d'une voix basse, en présentant à son mari un préservatif dans son emballage. Cal sourit et répondit de manière séductrice :
— Tu ne veux pas attendre ce soir pour le sport de chambre…
— Non ! Ce n'est pas à moi !
— Comment ça ? fit-il, entre inquiétude et colère. Ne me dis pas que c'est Lou' parce que…
— J'ai trouvé ça dans les affaires de sport de Nicholas ! le coupa sa femme, avant que son mari ne crie sur leur fille sans raison valable. Tout d'un coup, la colère sur le visage de Cal disparut pour une expression entre amusement et fierté. Cela horrifia la mère qui chuchota agacée :
— Pourquoi tu souries ?!
— Pour rien…, réfuta t-il, en raclant sa gorge pour dissimuler son expression amusée.
— Cal ! C'est sérieux ! Il n'a que 17 ans ! Tu sais les conséquences que cela peut avoir !
— J'avais deux ans moins que lui quand j'ai commencé…, répliqua Cal, d'un haussement d'épaules.
— Donc pour Em' et Lou', tu veux appeler le FBI et l'armée, mais pour ton fils, tu veux les honneurs ?!
— Je… Je pense simplement qu'on ne doit pas en faire une affaire d'état, la tempéra t-il, avec des gestes évasifs de ses mains. C'est tout…
— J'hallucine ! s'agaça t-elle. Elle le pointa avec un index inquisiteur et le menaça : — Écoute moi bien Cal, il est hors de question que je devienne grand-mère dans les mois qui suivent ! Donc, tu vas parler à ton fils et tu vas lui dire que… s'il continu, il pourra dire adieu à la voiture !
Cal réfréna un rire et demanda interloqué :
— T'es sûre que tu es psy ?
Bras croisés contre son corps, Gillian déclara déterminée :
— Tu vas lui parler sinon on ne fait rien ce soir !
— T'aurais dû commencer par ça…
Gillian jeta un regard noir à son compagnon puis lui indiqua la direction de la porte d'entrée. Comprenant le message, ce dernier soupira et sortit de la maison pour retrouver son fils en train de bricoler la veille voiture de collection dans leur garage. Les mains dans les poches, il découvrit deux pieds dépassés sous l'armature de la voiture avec à proximité une boite à outil. Il s'accroupit à sa hauteur et l'interpella :
— Nick !
— Papa ? Tu peux me passer la clé sur le toit de la voiture s'te plait !
Le père s'exécuta et demanda :
— Tu peux sortir une minute.
— Yep ! dit-il, en quittant sa cachette pour rejoindre son père. Une fois sur ses deux pieds, il nettoya ses mains tachées de graisse avec un chiffon usagé. Face à l'expression préoccupée de son père, Nicholas pencha sa tête sur le côté et demanda intrigué :
— Tu voulais me dire quelque chose ?
— Hum… oui…, bafouilla t-il. Il chercha ses mots et argua mal à l'aise, avec des gestes évasifs de ses mains :
— Tu vois, tu… Tu as 17 ans, tu es un sportif et je sais qu'à ton âge on peut avoir envie de découvrir de nouveau terrain et de nouveau sport… pour satisfaire certaine envie… mais parfois ses envies peuvent conduire à faire un score qu'on ne s'attendait pas à faire…
Nicholas s'empêcha d'éclater de rire devant l'embarras plus que visible de son père. Il savait parfaitement où il voulait en venir avec ses allusions sportives. Cal n'avait jamais vraiment su parler de ces choses là de la vie. Aux huit ans de son fils, Cal avait essayé de lui faire croire que les enfants naissaient dans les choux, ou dans les haricots en boite dans sa version alambiquée, avant que sa mère n'intervienne d'exaspération et lui dévoile la réelle vérité sur le secret de la vie. Ne souhaitant pas le vexer, il arbora un air sérieux et attendit patiemment qu'il termine ses insinuations. Tout d'un coup, Cal plissa ses yeux d'appréhension et demanda subitement :
— Est-ce que tu t'es déjà entrainé ?
— Si j'ai bien suivi… Tu me demandes si j'ai déjà couché avec une fille ?
Face à la franchise de son fils, Cal entre-ouvrit sa bouche et se sentit sur le coup un peu stupide. Ses enfants avaient vraiment le don de mettre les gens dans l'embarras. Encore une fois, il se demanda bien de qui ils pouvaient tenir ça ! Le père émit une petite moue de sa bouche et approuva :
— Heu ouais…
— Oui, c'est déjà arrivé.
Cal ne s'attendit pas à cette réponse. Perturbé, il s'adossa contre le flanc de la voiture pour ne pas s'écrouler. Le regard perdu dans le vide, il souffla :
— Tu as déjà…
— Ça va ? s'inquiéta Nicholas de sa réaction.
— Ouais… c'est juste…, bafouilla t-il avant de retourner son regard surpris sur son fils. — Ça fait longtemps ?
— L'année dernière…
— L'année…, souffla t-il, perdu dans ses pensées. Il essaya de savoir comment il n'avait pas pu remarquer ce grand changement dans la vie de son unique fils et songea que c'était l'époque où ils avaient pris leur distance.
L'adolescent pinça ses lèvres puis demanda :
— Y'a une raison particulière à ce que tu me poses ce genre de question ?
Reprenant ses esprits, Cal montra le contraceptif à son fils.
— Hum… ta mère a trouvé ça dans tes poches…
— Oh…
— Elle s'inquiète pour toi… Je lui ai dit que j'allais te parler… Je ne pensais pas que tu avais déjà… enfin… mis un panier…, termina t-il, avec un sourire nerveux. Nicholas esquissa un léger sourire et ajouta pour le rassurer :
— Je ne l'ai pas refait… si c'est ce que tu te demandes. C'est Luke, un joueur de basket, qui me l'a donné en me disant que je pourrais m'en servir pour la prochaine fête qu'il allait organiser… Je ne comptais pas l'utiliser. Je l'ai seulement pris pour qu'il me laisse tranquille.
— Bien…, soupira son père, plus soulagé. Tu sais que ce ne sont pas des choses anodines… et que cela peut avoir des conséquences.
— Je sais…
— Tu… Tu t'es protégé au moins ?
— Oui, ne t'inquiète pas.
— Ok… Je te fais confiance Nick.
— Tu peux.
— Ta mère n'est pas encore prête à devenir grand-mère. Alors si un jour, tu sens que ça urge… bah tu penses à grand-mère Elizabeth…
Nicholas ria à la plaisanterie de son père qui l'accompagna dans son amusement. Songeur, il contempla son fils, avec un fin sourire, qui avait bien grandi depuis ses explications sur la naissance des enfants dans les haricots. Cal secoua sa tête, se détacha du véhicule puis demanda non sûr de lui :
— Au fait, tu sais si ta soeur a déjà…
— Lou' et moi, on est proche mais pas à ce point là, papa…
— Mouais… J'vais dire à ta mère de ne plus s'inquiéter…
Il s'éloigna lorsque son fils l'arrêta :
— Papa ! Je… Je voulais te demander quelque chose…
— Dis-moi.
— Tu sais mon ami Matt...
— Yep ?
— Je le trouve un peu bizarre en ce moment. Il vient rarement en cours et il rate beaucoup d'entrainements. À chaque fois que je l'appelle, il me dit qu'il est occupé… mais je sais pertinemment qu'il ment. Je ne sais pas pourquoi, mais je sens qu'il se passe quelque chose.
— Ouais, je vois ce que tu veux dire…, dit Cal, en repensant au jeune homme. Tu veux qu'on passe chez lui demain ?
Nicholas hocha positivement la tête.
— Bien. On fera ça.
OoO
À l'heure du couché, Cal entra dans sa chambre après avoir pris une douche et s'être mis en pyjama. Il rejoignit sa femme déjà sous les couvertures avec un livre entre ses mains. Son mari à ses côtés, elle posa son ouvrage, écrit par une certaine Temperance Brenan, sur le côté et demanda :
— Tu as parlé à Nick ?
— Oui, tu n'as pas à t'inquiéter.
Gillian s'apprêta à soupirer son soulagement avant que Cal n'ajoute :
— Parce qu'il l'a déjà fait depuis longtemps.
— Quoi ?! s'affola t-elle. Tu… tu en sûr ?
— C'est lui qui me l'a dit.
Abasourdie, Gillian renversa sa tête contre son oreiller. Cal s'amusa de sa réaction et employa une voix douce :
— Gill'… Il sait tout ce qu'il y a à savoir sur le sujet. Il m'a dit qu'il n'avait pour le moment pas l'intention de le refaire. On peut lui faire confiance.
— Je lui fais confiance… C'est juste que… les choses peuvent vite changer sans qu'on ne s'en rende compte…
— Mmh je sais, souffla t-il, en prenant sa compagne dans ses bras.
— Ils grandissent trop vite, Cal…
— Tu ne me croyais pas lorsque je disais ça pour Lou'… Pourtant, ils ont le même âge.
— Ne te moque pas de moi, s'amusa t-elle.
Il sourit, l'embrassa dans ses cheveux et dit :
— Pour te rassurer, j'ai donné la méthode de contraception imparable pour Nick.
— C'est quoi ?
— Je lui ai dit de penser à ta mère.
— Cal ! s'offusqua t-elle.
— Quoi ?! Ça marche bien pour moi !
— T'es irrécupérable !
— Et plus encore ! argua t-il, en se plaçant sur le corps de sa femme avec un large sourire. Il embrassa voluptueusement son cou puis mordilla sensuellement son oreille. Comprenant ce qu'il désirait, Gillian répliqua rieuse:
— Toi, tu n'es pas fatiguée…
— Nop ! Un deal est un deal… Et puis, il serait dommage de ne pas l'utiliser, dit-il, en sortant de nulle part le préservatif subtilisé à son fils.
— Je trouve ça un peu étrange..., déclara t-elle, d'un regard incertain vers le petit objet.
— On n'est pas obligé de l'utiliser…
— On a eu des jumeaux neuf mois après notre mariage ! Avec toi, je m'attends à avoir des triplés, alors met en deux !
Cal ria et embrassa son épouse qui se laissa complètement aller dans ses bras.
Le jour suivant au Lightman Group, Cal et Gillian avait trié tous les conducteurs de train qui avaient déjà pris cette ligne. Deux d'entre eux avaient démontré des signes d'angoisses plus fortes que la normale. Cal commanda à Reynolds de les interroger en même temps dans le cube lumineux. Le premier était M. Burgess et le second M. Silva. La quarantaine passée, ils travaillaient depuis très longtemps sur cette ligne. Assis en face des deux suspects, le couple d'experts en mensonge se tenaient côte à côte avec le dossier de l'affaire entre leurs mains.
— D'après votre fichier M. Silva, vous travaillez depuis de nombreuses années sur cette ligne ? l'interrogea Gillian.
— Oui…, répondit faiblement Silva.
— Vous pouvez répéter, quémanda Cal, d'un geste de main. Parce que votre oui ne semblait pas très convainquant ! Vous êtes sûr d'avoir déjà travaillé sur cette ligne ?
— Oui, répéta plus fortement Burgess pour Silva. Cal jeta un curieux regard à Burgess, mais garda ses impressions pour lui. Gillian continua son interrogatoire, tout en étudiant le dossier :
— Et je vois M. Silva… que vous avez pris une retraite anticipée que la compagnie a acceptée.
— Une retraite anticipée de plusieurs années… C'est pas avec vous qu'on va combler le déficit ! jasa Cal.
— Il a le droit de faire ce qu'il veut ! objecta Burgess, rageur. Notre métier est très difficile par moment !
— Comme tous les métiers, contra Lightman, en se penchant sur la table, ce que j'aimerai comprendre c'est pourquoi vous laissez répondre M. Burgess à votre place, M. Silva ? Vous aimez être dominé ou… c'est juste qu'on vous ennui avec nos questions ?
— Je… Je suis simplement stressé, dit Silva.
— Il n'y a pas raison de l'être, si vous n'avez rien à vous reprocher…, répliqua Cal, en ancrant son regard incisif dans celui dilaté de peur de Silva.
— Nous n'avons rien à nous reprocher, affirma Burgess, en croisant ses bras contre son corps.
— Oh il passe de "il" à "nous", releva Cal, avec un large sourire. Je crois que vous avez bien plus à vous reprocher qu'on ne le croit… Vous savez ce qui a fait déraillé le train n'est-ce pas ?
Cal capta la colère chez Burgess et la honte chez Silva.
— Oui, vous le savez…
— M. Silva dites nous ce que vous savez, exigea Gillian, moins compatissante. Si la compagnie nous cache des éléments et qu'on découvre que vous avez participé à la dissimulation de preuves d'un homicide, vous pourrez être sévèrement jugé.
— Oui, les victimes, proclama Cal, l'air menaçant. Un père de famille et un jeune homme de 20 ans qui s'apprêtait à se rendre dans une nouvelle université. Deux vies gâchées et peut-être à cause de vous…
— Je… Je ne sais pas ce qui a pu causer cet accident, bafouilla Silva.
— Olson a dû faire une erreur ! proclama Burgess.
— Vous avez l'esprit d'équipe chez les chemineaux, railla Cal. Vous rejetez tout sur le nouveau venu ! D'ailleurs… Cobbs a dit la même chose que vous…
Au nom de Cobbs, Silva détourna son regard et arbora une expression de mépris.
— Oulà ! Vous n'aimez pas beaucoup Cobbs…, déclara l'expert en mensonge, son regard fixé sur le visage de Silva. Il vous dégoûte même…
Cal se retourna vers un agent de police à l'extérieur du cube et exigea qu'on fasse sortir Burgess. Ce dernier se débattit oralement et lança un regard meurtrier à Silva avant de quitter le cube de force. Gillian resta à sa place, alors que Cal se leva pour dominer Silva.
— Pourquoi Cobbs vous dégoute ? réclama Cal.
— Je n'ai rien contre Cobbs, c'est un bon patron, mentit-il.
— Mon cul, jura l'expert en mensonge, tout ce que vous avez dit depuis que vous avez franchi cette porte, ne sont que des bobards !
Cal se pencha vers Silva pour se retrouvez qu'à quelques centimètres de son visage.
— Quand allez-vous arrêter de mentir et vous conduire en homme !
Silva baissa les yeux. Exaspéré, Cal sortit les photos des victimes pour les poser face à Silva qui n'osa pas y jeter un seul regard.
— Ces deux personnes, qui avaient la vie devant-elles, sont mortes dans un accident qui aurait peut-être pu être évité. Si vous nous aidez pas à trouver la vérité, d'autres personnes pourront aussi mourir. Vous ne pourrez jamais vivre avec cette culpabilité. Burgess peut-être, mais pas vous. Je sais que vous avez une morale, sinon vous n'auriez pas quitté votre job si vite. Vous êtes un père de famille. Si un de vos enfants avait pris ce train, comment vous sentiriez-vous ?
Silva déglutit. Une expression de tristesse passa sur son visage.
— Olson vivra tous les jours avec la mort de ces deux victimes, même si cela n'est pas de sa faute ! argua Cal, en pointant du doigt les clichés.
Gillian vit Silva pincer ses lèvres et demanda sur un ton plus tempéré :
— Vous savez quelque chose M. Silva. Dites-le nous.
Silva ferma un instant ses yeux lorsqu'il avoua :
— Je sais juste que la compagnie voulait faire des économies sur nos salaires. Les syndicats ont gueulé, alors ils ont trouvé un moyen d'en faire ailleurs…
— Sur la sécurité, devina Cal dépité alors que Silva cautionna ses dires.
— Je… Un jour sur le terrain, j'ai remarqué que des boulons devaient être changés. Je m'apprêtais à en faire la commande mais Burgess l'a annulée. Je suis allé voir Cobbs. Il m'a dit que c'était normal et que je ne devais pas m'inquiéter. Qu'un jour de plus ou de moins, cela n'allait rien changer.
— Mouais et voilà le résultat, railla l'expert en mensonge.
— Pourquoi n'avez-vous pas alerté votre haut dirigent ? l'interrogea Gillian.
— Olson et lui sont amis…
— Il vous a menacé, conclut Cal.
Silva ne répondit pas, mais son visage parla pour lui.
Après l'interrogatoire, Cal, Gillian et Reynolds se retrouvèrent dans le couloir pour une mise au point.
— Alors ? demanda Ben.
— Silva est effrayé par Burgess et Cobbs, argua Cal. Ce sont eux qui tiennent les ficelles.
— Burgess faisait tout pour que Silva ne parle pas, l'appuya Gillian.
— Vous pensez que Silva a démissionné pour éviter de se confronter à Burgess et Cobbs ?
— J'en suis persuadé ! confirma l'expert en mensonge. Ils ont dû avoir une totale emprise sur lui et la seule façon de s'en sortir pour lui, c'était la fuite…
— Il y a donc un lien entre eux.
— Mouais, il faut juste trouver lequel, signala Cal. Il vérifia l'heure sur son téléphone portable et dit : — Il faut que je vous laisse. J'ai promis à Nick de faire quelque chose.
— D'accord, approuva Gillian. Je vais analyser les dernières vidéos de Ria et Eli et attendre leur retour.
— Je vais programmer l'interrogatoire de Cobbs pour demain, ajouta Reynolds.
Gillian acquiesça et s'éloigna en direction de la salle d'analyse. Ben s'apprêta à partir lui aussi, mais Cal le retint sur place.
— Vous pouvez rester dans les parages ? J'aurais sans doute besoin de vous…
— Ça dépend pour quoi ? demanda l'agent avec suspicion. Avec vous je m'attends à tout.
— Vous avez le physique d'un videur de boite de nuit ! Vous savez bien comment faire sortir les poltrons sans ménagement non ?
Ben jeta un regard déconcerté à Lightman. Ce dernier discerna son incompréhension et répliqua blasé :
— Laissez tomber, rester simplement dans le coin !
L'agent du FBI regarda l'expert en mensonge s'éloigner et songea qu'il allait devoir rester sur ses gardes. Rien n'était moins sûr lorsque Lightman avait des idées derrière la tête. La plus part conduisaient, toutes ou presque, à l'hôpital.
Dans l'après-midi, Cal et Nicholas se rendirent au domicile de Matthew. Le jeune homme habitait dans une petite maison en banlieue dans un quartier peu sécurisé. Sur le porche, Cal jeta un regard à son fils inquiet puis frappa contre la porte. Du bruit s'opéra.
— Va voir qui c'est ! s'écria un homme à l'intérieur.
Une seconde plus tard, Matthew apparut à l'entrebâillement en découvrant les deux Lightman avec perplexité.
— Nick ? Qu'est-ce que tu fais ici ?
— Salut Matt', dit Nicholas. Mon père et moi on allait voir un match, on se demandait si ça te disait de venir avec nous?
— Heu… c'est sympa, mais en ce moment j'suis un peu occupé… Tu devrais proposer ça à Chris, répondit Matthew de manière évasive.
Cal observa le visage de Matthew et déclara :
— Tout va comme tu veux à l'intérieur ?
— Hum, oui ça va…, affirma le jeune homme, d'un léger hochement négatif de sa tête.
— J'ai bu un litre d'eau avant de venir ici, ça te dérange si j'utilise tes toilettes ? demanda Cal, en indiquant sa maison d'un geste de la main.
— Je… Je suis désolé, mais c'est pas…
Tout d'un coup, la porte s'ouvrit en grand et Cal fit face à un adulte particulièrement en colère.
— Qu'est-ce que tu fiches ?! beugla l'homme contre Matthew. Ça fait vingt minutes que j'attends mon repas !
— Je discutais papa, répondit Matt.
M. Turner focalisa son regard brumeux sur les nouveaux visiteur et réclama furibond :
— Qui êtes vous ?
— Cal Lightman, je suis le père de Nicholas. Votre fils et le miens sont amis. Et il s'inquiétait de ne pas le voir depuis plusieurs jours. Alors, on est venu voir ce qu'il se passait.
— Il se passe rien, alors j'vous conseil de partir, rétorqua Turner menaçant.
— Votre fils n'a pas l'air d'accord avec vous, objecta Cal.
— Quoi ?!
— J'ai dit que votre fils ne veut pas qu'on parte, répéta t-il plus fortement. Je vois de la peur sur son visage et de la colère aussi. Il est effrayé par vous, exposa t-il, en désignant Matthew.
Totalement déconnecté, par les dires de Cal, M. Turner beugla :
— Qu'est-ce que vous racontez ?!
Cal comprit que l'homme était bien trop soûl pour assimiler la moindre de ses paroles. Il jeta un regard par dessus son épaule afin de s'adresser directement à Matthew :
— Il te fait du mal, Matt ?
Matthew ne répondit pas, mais Cal capta une expression qui voulait dire oui.
— Je vois. Tu peux venir avec nous tu sais.
M. Turner fit barrage à l'expert en mensonge et s'exclama :
— Personne n'emmènera mon gosse !
N'étant nullement impressionné par l'adulte, Cal s'approcha de celui-ci et rétorqua entre ses dents :
— Sinon quoi ? Vous allez me cogner comme pour lui ?
Le père de Matt ne répondit pas, mais présenta une grande colère et serra ses poings.
— Vous tournez à quoi ? Whisky, scotch, bière ?
Turner ne répondit toujours pas.
— Ouais, un peu tout ça à la fois. La vie ne vous a pas donné ce que vous vouliez alors vous vous vengez sur votre gamin !
— Dégagez de chez moi, ou je vais chercher mon fusil et vous regretterez d'être venu.
Cal arbora un sourire mauvais et railla :
— Les types comme vous me font plus pitié qu'autre chose.
Matthew capta l'extrême de son père et sut que s'il n'agissait pas maintenant, il y aurait un bain de sang.
— Laisse papa, je m'en occupe.
Aux paroles de son fils, le père jeta un dernier regard haineux à Cal et rentra dans sa maison sans réclamer son reste.
— Matthew ! l'appela une voix féminine.
— J'arrive Abby ! scanda le jeune homme avant de se retourner vers les deux Lightman :
— Vous devriez partir.
— On va partir, mais je te promets qu'on va revenir, jura Cal, en le pointant avec son index.
Matthew ne répondit pas et ferma sa porte. Cal et Nicholas descendirent du porche pour retourner à leur voiture.
— Qu'est-ce qu'on fait ?
— On va le sortir de cet enfer, répondit Cal, d'un air déterminé.
Suite aux derniers éléments, Ria et Loker examinèrent les lieux de l'accident. Quelques débris étaient encore présents sur le sol. Torres leva son regard et indiqua :
— Il y a trois caméras. D'après les vidéos, le train a déraillé à cet endroit.
Loker sillonna les débris en suivant les railles. Un détail l'intrigua. Il s'accroupit au niveau du sol et découvrit des soudures fraiches.
— Ria, vient voir ça.
Torres rejoignit son collègue. Celle-ci regarda l'étrange réparation et demanda :
— Tu crois que cela a été fait avant ou après l'accident ?
— Je crois qu'on va devoir demander d'autres vidéos des caméras de surveillance, allégua Loker, en regardant l'une d'entre elles tournée dans leur direction.
De retour au Lightman Group, Cal avait demandé à son fils de le suivre dans son bureau. Il avait convié Gillian et Reynolds à venir le rejoindre et exposa sa rencontre avec M. Turner. Mains sur les hanches, l'agent du FBI demanda :
— Vous êtes sûr que ce type frappe son fils ?
Nonchalamment assis sur un fauteuil, Cal certifia :
— À 100% je connais ce genre de personne et croyez moi, Matthew vit un enfer.
— J'aurai dû le voir plus tôt, souffla Nicholas dépité, installé sur le canapé avec sa mère.
Attristée, Gillian posa une main réconfortante sur celle de son fils et souffla :
— Chéri… Ce n'est pas de ta faute.
— C'est l'un de mes meilleurs amis !
Cal comprit la culpabilité de Nicholas et l'apaisa :
— Nick, certaines personnes cachent des choses, par honte ou parce qu'ils pensent qu'ils peuvent gérer la situation, même aux personnes qui nous sont les plus proches.
— Et sa mère ? réclama Ben.
— Elle est morte lorsqu'il avait 8 ans…, répondit Nicholas. Il a une petite soeur de 10 ans… Abbigael. C'est lui qui s'en occupe. Matt ne m'a jamais parlé du problème de son père…
— Je crois que c'est pour ça qu'il n'est pas parti…, soupira Cal.
— Comment ça ?
— Il attend d'être majeur pour avoir la garde de sa soeur.
— Tout ce qu'on peut faire, c'est appeler les services sociaux, proposa Reynolds.
— Matthew ne se laissera pas faire, contra Cal. Il voudra protéger sa soeur et il pourrait s'enfuir avec elle.
— Qu'est-ce que vous proposez ?
— J'irai lui parler… Je sais comment il fonctionne.
Cal et Gillian s'échangèrent un regard entendu. Nicholas regarda son père de manière intriguée, mais ne s'opposa pas à son idée. Il lui faisait une totale confiance.
Dans la salle d'analyse, Ria et Eli visionnèrent les vidéos des caméras de surveillance quelques heures après l'accident et découvrirent quelque chose de stupéfiant. Sans tarder, ils retrouvèrent leur patron pour faire partager ce nouvel élément qui allait tout changer.
Le soir, Cal prit sa voiture et se gara devant une boite de nuit. Une musique électro pouvait s'entendre à trois kilomètres à la ronde. Il quitta son véhicule et entra dans le bâtiment. Des centaines de personnes dansaient sur la piste et buvaient sans modération. Les publicités du gouvernent ne devaient pas être entendues. Cal se fraya un chemin jusqu'au bar où il interpella un serveur.
— Matthew Turner ?! exigea t-il en criant presque pour se faire entendre de cette musique infernale. Où était passé le bon rock et le blues !
Le barman indiqua la porte de service. Cal se dirigea vers la direction pointée et sortit pour se retrouver à l'arrière du bâtiment. Sans surprise, il découvrit Matthew, adossé contre un mur, fumant une cigarette. Mains dans les poches, Cal s'approcha du jeune homme et déclara :
— T'es pas un peu jeune pour travailler ?
Matthew ravala une expression surprise à l'apparition de l'expert en mensonge et répliqua :
— La loi autorise à partir de 16.
— T'as commencé plus tôt, dit Cal.
— 'Faut bien se nourrir.
— Ton père ne travaille pas ?
— Y'a pas de taf'. La crise…, expliqua t-il, en expirant une bouffée de sa cigarette.
— Une boite de nuit. On est loin des livres et du terrain de basket.
— Ça paye mieux.
— Pas sur le long terme, rétorqua t-il, en se plaçant à ses côtés. Ton père doit être content. Tu peux lui ramener des bouteilles gratos et lui donner ton fric…
Cal releva une contradiction dans le langage corporelle de Matthew et dit :
— Oh, à moins que tu te gardes un peu d'argent de côté…
L'adolescent ne répondit pas, mais Cal avait deviné juste. Ce dernier se plaça devant lui et déclara, avec un extrême sérieux, presque menaçant :
— Tu crois que tu es grand et que tu peux gérer la situation, mais c'est faux. T'es qu'un gamin Matt. Tu as besoin d'aide. Si tu continues comme ça, tu vas très mal finir…
— Vous jouez les psy', mais vous savez pas d'quoi vous parlez.
Cal émit une petite moue de sa bouche et quémanda avec un geste de la main :
— Ton père préfère quoi ? Les marques de cigarettes, les poings, les coups de ceinture… Le mien c'était les trois à la fois lorsqu'il avait fini de boire ses deux bouteilles de whisky ! Aujourd'hui, rien que cette odeur me donne la nausée !
Comme preuve, Cal présenta son dos avec des cicatrices qui ne s'étaient pas effacées avec le temps.
— Est-ce qu'il t'es arrivé de ne plus pouvoir te relever tellement qu'il t'avait cogné ! De prier à un dieu que tu ne crois plus de te venir en aide ! De vouloir te réveiller de tes cauchemars pour aller le tuer de tes propres mains !
Le jeune homme continua de garder le silence. Cal comprit qu'il avait vécu la même chose que lui.
— Matt… Ce que tu vis est un cauchemar ! Et si tu veux te réveiller, il faut que tu partes !
— Vous n'avez pas déjà un fils dont vous pouvez vous occuper, maugréa Matt méprisant.
— Exact, et c'est lui qui m'a demandé de te venir en aide !
— J'en ai pas besoin, réfuta t-il, en écrasant sa cigarette pour retourner dans la boite de nuit. Cal arrêta le jeune homme et souleva son t-shirt pour voir les marques violacées sur son corps juvénile.
— Dis moi le contraire, le défia Cal.
Matt jeta un regard méprisant à l'expert en mensonge et se dégagea de son emprise pour retourner à son poste. L'expert en mensonge soupira et comprit qu'il allait devoir passer à l'étape supérieure.
Le lendemain, Cobbs attendait, bras croisés, qu'on vienne l'interroger dans le cube lumineux. Il tourna en rond comme un lion enfermé dans une cage jusqu'au moment où Cal décida de faire son entrée.
— Veuillez m'excuser… Y'avait plus de thé dans la salle de restauration, s'excusa t-il, avec un mug à la main.
— Ça fait trente minute que j'attends ! s'énerva Cobbs.
— C'est aussi ce que j'ai dit à mon employé lorsqu'il est parti aller m'en chercher au bar du coin ! Bref ! Alors, si on vous a fait venir c'était pour vous montrer un petit film !
— Quoi ?!
— On se tait et on regarde ! réclama Cal, en appuyant sur le bouton d'une télécommande pour activer une télé accrochée en l'air. Cobbs regarda la vidéo où on pouvait apercevoir un homme venir sur les lieux pour réparer les railles du train.
— Alors, comment avez-vous trouvé ce film ? Étonnant, n'est-ce pas ? Enfin… sauf pour vous apparement ! Je ne vois aucune surprise sur votre visage. Attendez…
Cal zooma sur l'écran où on pouvait parfaitement discerner le visage de Burgess.
— C'est votre cher ami Burgess qui, deux heures après l'accident, est arrivé sur les lieux du crime pour souder la partie endommagée des railles. Ce qui s'appelle dans le jargon des flics, un vice de procédure et dans le mien un salopard !
Cal contempla le visage de Cobbs.
— À ce que je vois, vous étiez aussi au courant pour ça… c'est même vous qui en avez eu l'idée… Hou le vilain garçon! Même pas capable de faire le sale boulot !
— Je ne sais pas ce que vous racontez. Je n'ai jamais dit à Burgess de faire ça !
— Vous mentez ! Silva nous a dit que vous aviez fait un marché avec Burgess et la compagnie. Pour éviter de baisser les salaires, vous avez décidé de faire un rabat sur la maintenance ! Ce que j'aimerai savoir, c'est si le grand patron est au courant de vos petites manigances…, quémanda Cal sournoisement, avec des gestes de ses mains.
Cobbs détourna le regard.
— Oh… non il ne l'est pas. Vous êtes dans de beau drap.
— Vous n'avez aucune preuve ! Silva ne m'aime pas parce que j'ai dû baisser son salaire et il est parti de son plein grès !
— Non, il ne vous aime pas parce que vous l'avez menacé et que vous êtes un meurtrier ! contra Cal, d'un doigt inquisiteur.
— Olson a conduit ce train !
Cal esquissa un rictus et demanda à faire entrer Olson. À son entrée, l'expert en mensonge présenta le conducteur de manière théâtrale :
— Voilà M. Olson ! Un employé exemplaire ! Maintenant, dites lui en face que c'est de sa faute si cet accident a eu lieu.
Cobbs ne prononça pas le moindre mot.
— Hein, fit Cal méprisant, plus facile à mettre des couteaux dans le dos… Elle est belle la hiérarchie… M. Olson, étiez-vous au courant qu'il y avait des défauts sur la ligne ?
— Non, personne ne m'en a fait par.
— Vous voyez ! Lui, il ne ment pas ! allégua Cal, en désignant Olson. Vous êtes prêt à envoyer un innocent en prison juste pour sauver votre peau !
— Je n'étais pas au courant ! Burgess a pris cette iniative de lui-même !
— Burgess a décidé de lui-même d'interférer sur une enquête policière ?
— Oui ! Il a surement dû vouloir cacher son travail imprécis !
— Ouais, ça peut être vrai ! lui accorda Cal, d'une petite moue pensive. Il bu une gorgée de son thé et proclama : Et si, on lui demandait ! Faites entrez M. Burgess je vous pris.
L'air contrarié, Burgess entra dans le cube avec Reynolds.
— J'ai l'impression d'être dans un cirque ! sourit Cal. Il dévisagea Burgess et dit : — Vous avez entendu ce que votre patron a dit sur vous ! Il rejette toute la responsabilité de l'accident sur vous ! Après Olson, il s'en prend à vous. Maintenant, il ne s'agit plus de savoir qui est le coupable, mais quelle est le degré de responsabilité dans cette affaire et qui va écoper le plus d'années en prison ! Vous êtes toujours prêt à protéger votre cher patron ?
— C'est lui qui m'a dit de faire ça ! ragea Burgess.
— C'est faux ! rétorqua Cobbs. Vous êtes allez seul, de votre plein grès !
— Vous m'avez dit de rectifier les railles pour ne pas que la police suspect quoique ce soit ! Les conducteurs étaient tous au courant, ils ralentissaient tous à ce passage ! Ils savaient qu'il pouvait y avoir un accident ! Olson n'était pas au courant !
— C'est pour ça que Silva avait pris sa retraite, souleva Cal. Il ne voulait plus jouer les pions dans votre organisation !
— Vous n'avez aucune preuve ! contra Cobbs.
— Moi, j'en ai ! répliqua Burgess. J'ai des documents qui prouve que Cobbs annulait toutes les commandes des nouvelles pièces et qu'il plaçait cet argent dans nos salaires !
Cal s'approcha de Cobbs, refoulant sa rage, analysa son visage et dit :
— Pas que… J'ai l'impression qu'une partie était placée dans votre petit compte d'épargne. Vous souhaitiez un petit pécule pour votre retraite ? Le Mexique ? Non… le Brasil ! Beau choix ! Mais tout ce que vous verrez ces prochaines années ce sont les quatre murs de votre cellule.
— On va tout vérifier et tout sera donné au procureur, déclara Reynolds.
— Embarqué moi ces deux criminels…
Un policier et Reynolds embarquèrent Cobbs et Burgess sous les yeux dégoutés de Cal.
OoO
Le soir même, Cal demanda à Reynolds de l'accompagner rendre une petite visite aux Turner. Dans la voiture de Cal, Reynolds, installé sur le siège passager, jeta un regard inquiet au domicile et demanda :
— Vous êtes sûr de vous ?
— Non, mais c'est le seul moyen...
Ils quittèrent le véhicule et s'approchèrent de la maison. Devant la porte d'entrée, ils entendirent des hurlements. Les deux hommes s'échangèrent un regard entendu lorsque Ben défonça la porte. Ils se précipitèrent vers les cris et entrèrent dans la cuisine où M. Turner avait pris à parti son fils pour le frapper de toutes ses forces.
— Sale petit fumier ! Arrête de mentir, j'sais que c'est toi qui m'a volé une bouteille !
Cal se rua sur M. Turner avant qu'il n'ai pu encore levé la main sur son fils et enchaina un combat au corps à corps. Il reçut un coin de poing sur son visage qui le lui rendit. Turner s'écroula au sol alors que Reynolds s'empressa de le menotter.
— Comment va le gamin ? demanda Reynolds.
Cal se précipita sur Matthew rétamé sur le sol. Ce dernier se redressa et essuya d'un revers de main du sang perlant de son nez.
— Ça va ?
— J'ai eu pire…, souffla Matthew.
— J'en doute pas, répondit Cal de manière saccadée.
— Matthew ? l'interpella apeurée une petite fille de 10 ans.
L'adolescent tourna son regard sur sa petite soeur et ouvrit implicitement ses bras pour qu'il puisse la consoler. La petite fille courut dans les bras de son frère qui la serra aussi fort qu'il pu. Cal regarda les deux enfants enlacés puis Reynolds embarquer M. Turner en garde à vue. Les choses calmées, il commanda à Matt de prendre des affaires pour l'emmener chez lui pour la soirée. Sur le chemin de la maison, Cal résuma les faits à Gillian qui avait préparé une chambre pour les deux enfants.
Cal entra dans le salon où Gillian les attendait avec Nicholas. À la vue de son mari en sang, elle s'empressa de venir à lui :
— Oh mon dieu chéri !
— J'vais bien, ne t'inquiète pas pour moi… Occupe toi plutôt de lui, dit-il, alors que Matthew fit son apparition. Gillian arbora une mine horrifiée à la vue du jeune homme blessé. Elle demanda à Louise de s'occuper d'Abby et convia Matthew à prendre place autour de la table de la salle à manger. Un instant plus tard, Seth ramena une trousse de secours pour sa mère qui allait s'improviser infirmière. Depuis le temps, elle pouvait même prétendre au titre de médecin, au vu des nombreuses fois où elle avait dû recoudre son mari.
— Vous avez tout ce qu'il faut, sourit Matthew à la vue de la trousse de secours plus que complète.
— 'Faut bien, vu la famille, plaisanta Nicholas.
Matt émit un soupir rieur. Gillian s'installa à ses côtés et soigna l'adolescent tuméfié. Après ça, Cal et Seth apportèrent une boisson chaude au jeune homme et prit place sur un siège pour aborder une sérieuse conversation.
— Ça fait longtemps que les violences ont commencé ? l'interrogea Gillian.
— Après la mort de ma mère…, répondit Matthew. Elle est morte dans un accident peu après la naissance d'Abby… Mon père ne l'a pas supporté. Il ne savait pas comment gérer la situation alors il a commencé… à boire… jusqu'à ce que cela devienne une habitude… Il m'a reproché ses malheurs… Au départ, c'était juste des coups occasionnels puis il est devenu de plus en plus imaginatif… J'ai toujours fait en sorte pour qu'il se venge sur moi et de protéger Abby…
— Pourquoi tu ne m'as rien dit Matt ? demanda Nicholas peiné par cette histoire.
— T'avais tes propres problèmes… Et j'ai toujours su me débrouiller tout seul…
— Tu ne l'es plus maintenant…, ajouta Gillian, d'une main rassurante sur celle de l'adolescent.
— On va t'aider, signala Nicholas, en jetant un regard à son père silencieux. N'est-ce pas papa ?
— Bien sûr.
Gillian mima un air compatissant et dit :
— Matt, il faut que tu comprennes que tu ne peux plus continuer comme ça. Tu ne peux pas subvenir aux besoins de ta petite soeur et en même temps te faire un avenir.
— Mon avenir, je suis un idiot à l'école !
— Ne dit pas ça, Matt..., souffla Gillian attristée.
— Tu as du retard à cause de tes problèmes à la maison, rectifia Cal. Non pas parce que tu penses que tu n'as pas les capacités à être au même niveau que les autres.
— Peu importe... J'aurai bientôt 18 ans et je me suis fait assez d'argent comme barman !
— Tu vas tenir 3 mois voir 6 au maximum et après ? quémanda Cal. Qu'est-ce que tu feras ? Imagine que ta soeur tombe malade ou que tu ne trouves plus de boulot ?
— Je… Je trouverai un moyen ! Je l'ai toujours fait ! Si vous appelez les services sociaux, je sais parfaitement ce qu'il va se passer, vous m'enverrez en foyer et vous me séparerez de ma soeur !
— Personne ne t'enlèvera ta sœur, je te le garanti…, certifia Cal.
— Matthew…, dit Gillian. Je connais une personne qui travaille pour les services sociaux. Elle fera tout pour que tu restes avec ta soeur et que tu te retrouves dans une famille d'accueil prête à vous garder tous les deux. Tu garderas le même environnement et tu pourras reprendre le chemin de l'école et obtenir ton diplôme… Pour ça, il faut que tu nous fasses confiance…
Tout d'un coup, Abby apparut avec Louise pour se réfugier dans les bras de son grand frère. Gillian sourit tendrement à ce tableau familial alors que Cal déclara d'un geste de la main pour l'adolescent :
— Il faut aussi que tu penses à l'avenir de ta soeur… Tu ne peux plus décider que pour toi maintenant…
Sa soeur dans les bras, Matt sembla réfléchir aux paroles de Cal jusqu'au moment où il acquiesça pour approuver ses dires.
Plus tard, Nicholas emmena son ami dans sa chambre alors que sa soeur dormit dans celle de Louise. Épuisé, Seth souhaita une bonne soirée à ses parents se retira dans sa chambre. Cal et Gillian s'isolèrent dans le salon. Installés sur le canapé, Gillian obligea son mari à faire soigner la plaie sur son front sous les yeux de Punk. Au moment où elle désinfecta celle-ci, Cal crispa sa mâchoire de douleur. Elle prit un pansement et le colla sur la blessure.
— Il faudra penser à racheter des pansements…, signala Gillian.
— Depuis le temps, ils pourraient nous faire une ristourne…
Elle lâcha un léger rire puis contempla pensivement le visage de son compagnon.
— Tu as bien su gérer la situation avec Matt…
— J'peux être un bon psy' quand je veux.
— J'en doute pas…
— C'est juste un gamin perdu. Il faut qu'il retrouve le droit chemin, après ça… tout ira mieux pour lui.
— Il faut des personnes pour le guider, ajouta t-elle, d'une main tendre sur sa joue.
Cal comprit que Gillian faisait allusion à sa propre enfance tumultueuse. Ils n'avaient pas besoin d'en parler pour savoir ce que l'autre pensait.
— Ouais…, souffla t-il, avec un léger sourire. Cal caressa le visage bienveillant de sa femme puis s'approcha d'elle pour l'embrasser tendrement.
Le jour suivant, Gillian avait contacté son amie qui travaillait pour les services sociaux. Un arrangement avait été trouvé. Matthew et sa soeur avaient été envoyés dans une famille d'accueille prête à les accueillir tous les deux dans le centre ville de Washington. Désormais, Matthew pouvait reprendre son cursus scolaire sans être effrayé par un lendemain incertain. En sachant qu'il était déjà passé par là, Nicholas lui promit de l'aider à rattraper son retard.
Dans le couloir du Lightman Group, Matthew était passé remercier Cal et Gillian de leur aide.
— Merci pour tout M. et Mme Lightman.
— Appelle moi Cal, répliqua l'expert en mensonge.
— Et moi Gillian !
— Très bien, sourit-il. Rien n'est encore gagné, mais sans vous, je crois que j'aurai mal fini…
— Concentre toi sur ce que tu as aujourd'hui, dit Cal. Tu vas t'en sortir, crois moi Matt.
— Et si jamais tu as le moindre problème, n'hésite pas à venir nous voir, ajouta Gillian.
Matthew acquiesça. Il remercia encore une fois le couple et s'éloigna pour en rejoindre un autre qui allait devenir sa nouvelle famille. Nicholas apparut aux côtés de ses parents et souffla en regardant son ami faire connaissance avec le couple :
— J'espère que ça va aller.
— Y'a pas de raison…, répondit Cal.
— Il mérite d'avoir une famille… comme la notre.
Le père de famille esquissa un sourire et passa un bras autour des épaules de son fils pour le faire avancer vers la sortie de l'entreprise.
— Une glace pour fêter ça ?
— Tu commences à t'engraisser papa ! Il faut que tu ralentisses sur les sucreries…
— Hey ! fit-il faussement vexé. Non mais tu l'entends ! D'où te viens cette impertinence !
— On se le demande, soupira Gillian, en levant ses yeux au ciel.
Nicholas ria ainsi que Cal qui pris sa femme par la taille pour l'embrasser.
FIN*
— Quel match ! Merci de m'avoir invité Cal ! s'exclama Booth enthousiaste.
— C'est normal ! sourit Cal. Je connais personne d'autre que toi qui aime autant le sport. Enfin, peut-être Leroy, mais il avait du boulot…
— Gill' n'a pas pu venir ? Elle qui adore le basket !
— Non, elle est sur une affaire. Elle m'a dit d'y aller à sa place. Je ne regrette pas l'échange !
— Tu m'étonnes ! sourit-il avant d'hurler sa joie avec le public alors que Nicholas venait de mettre un panier dans le camp adverse. — Il est génial ton fils !
Cal arbora un large sourire qui s'estompa lorsqu'il remarqua une chose étrange sur le terrain. Un joueur semblait avoir quelques difficultés à se déplacer. L'expert en mensonge lu le nom sur le maillot du joueur et comprit qu'il s'agissait de Matthew Turner. L'un des amis de son fils. Il suivit du regard le jeune homme qui passa en mode attaque sur le terrain pour se retrouver sous le panier de l'équipe adverse.
Nicholas, encerclé par des adversaires, en profita pour donner le ballon à son ami démarqué. Rapidement, Matthew lança le ballon dans le panier, mais rata son tire. À ce geste, Cal capta une grimace de douleur s'afficher sur le visage du joueur. Malgré cela, le match se termina, quelques minutes plus tard, par la victoire in extrémis de l'équipe de Nicholas.
Suite à ce match particulièrement intensif, les joueurs se changèrent et prirent leur douche dans les vestiaires. Le coach de l'équipe vainqueur entra et s'exclama pour l'ensemble des joueurs :
— Bien joué les gars ! Mais je veux qu'on force sur la défense la prochaine fois !
Le coach passa devant Matthew, assis sur un banc, et le sermonna :
— Matt, tu étais trop distrait sur le terrain. Il faut que tu viennes plus souvent à l'entrainement. Les bons joueurs s'entrainement tous les jours. Si tu veux une bourse universitaire, il faut que tu te défonces sur le terrain.
— Oui coach…, approuva Matt, sans réelle conviction. S'habillant d'un nouveau t-shirt, Nicholas capta l'expression dépitée de son ami, lassant expressément ses chaussures.
— Bien, je veux voir tout le monde demain à l'entrainement ! Les retardataires feront 50 pompes !
Le coach partit, Nicholas jeta un regard intrigué à son ami Matthew et s'approcha de lui.
— Matt ? Ça va ?
— Ouais, ça va, dit-il, avec un drôle de sourire.
— T'as manqué beaucoup d'occasions aujourd'hui. C'est pas ton genre.
— Je suis un peu fatigué en ce moment… c'est pour ça…, répondit évasivement le blond.
Nicholas comprit que son ami n'en dirait pas plus et dit :
— J'comprends. Chris et moi, on va faire un tour au parc tout à l'heure. Tu veux venir avec nous ?
— Heu… j'peux pas, j'ai ma petite soeur qui m'attend. Une prochaine fois peut-être.
Matthew se leva et récupéra son sac de sport sous les yeux déconcertés de Nicholas.
— Tu ne prends pas ta douche ?
— Je la prendrai chez moi. À plus, Nick.
D'une petite moue de sa bouche, Nicholas regarda son ami partir et ferma pensivement la porte de son cassier de vestiaire.
À l'extérieur, Cal attendit son fils avec Seeley. Il aperçut Matthew quitter le bâtiment scolaire. D'un regard aiguisé, il capta une expression de colère sur son visage lorsque le jeune homme regarda l'écran de son téléphone portable.
— Ton fils est là ! indiqua Seeley.
Cal détourna son regard. Il arbora un large sourire à la vue de son fils qui s'avança dans leur direction.
— Voilà le champion ! scanda Booth tout sourire.
— On a gagné de peu ! souleva Nicholas.
— Vous avez quand même gagné !
— Et ça mérite bien un dessert au Royal Diner ! proposa Cal, les yeux remplis de fierté pour son fils.
— C'est moi qui paye ! répliqua Booth. Cal s'apprêta à refuser, mais Seeley ajouta : — Tu m'as invité laisse-moi te rendre la pareille.
Les trois hommes prirent la voiture pour se rendre au diner du centre ville. Une fois arrivée, le groupe s'installa à une table près de la vitrine donnant sur la rue. Nicholas proposa d'aller prendre leur commande à la serveuse au bar. Habitué du lieu, il entama une discussion avec la serveuse ravis de revoir le jeune homme. Booth profita de l'absence momentanée de l'adolescent afin d'avoir une discussion privilégiée avec son ami expert en mensonge.
— Ça va toi en ce moment ?
— Ouais, tout baigne. Et toi ? répondit Cal.
— Ça va, parfois un peu surmené par le boulot, mais je ne me pleins pas.
— 'Faut bien payer les factures, plaisanta t-il.
— Ouais, sourit-il.
Tout d'un coup, Seeley émit une mine pensive comme s'il hésitait à prendre la parole. La tête penchée sur le côté, Cal le remarqua et demanda :
— T'as un truc à me dire ?
On ne pouvait rien lui cacher. Booth toussota et déclara sur un ton incertain :
— Hum… Tu sais, Temp' et moi on se dit tout. Elle trouvait que Gillian était fatiguée ces derniers temps. Alors… elle lui a posé des questions et tu connais Bones, elle ne lâche pas l'affaire tant qu'elle n'a pas de réponse concrète.
Cal hocha la tête.
— Et elle m'a dit qu'en ce moment vous aviez des problèmes d'argent…
Un bras contre le dossier de sa chaise, Cal émit une petite moue de sa bouche et objecta d'un geste de la main :
— C'est qu'une passade.
— Cal, la dernière fois que vous étiez autant dans le rouge, tu as tellement travaillé que tu as failli avoir une crise cardiaque !
— Je… Je n'ai pas fait de crise cardiaque ! Ok ?! s'offensa t-il avec une grimace vexée.
— Tu es tombé dans les vapes et tu es allé à l'hôpital ! répliqua Booth avec sérieux. Le médecin t'avais dit de ralentir ou les choses deviendraient plus sérieuses !
— Ça s'est passé il y a plus de 10 ans maintenant ! Et j'étais parti aidé Patrick sur une affaire en Californie en pleine saison estival ! Je n'avais pas prévu la crème solaire et si tu envoies un anglais sous un soleil de 35 degrés, c'est normal qu'il fonctionne plus en fin de journée ! En plus, je ne sais pas comment tu peux savoir ça ! J'avais dit à Patrick d'en parler à personne !
Booth appuya son regard pour toute réponse.
— Mouais… Il t'a tout raconté… Gill' n'est pas au courant ?
— Je ne crois pas.
— Tu ne lui dit pas un mot, le prévint-il d'un air grave avec un doigt menaçant. J'veux pas qu'elle s'inquiète pour une chose qui n'a plus lieu d'être.
— Mmh…, bredouilla Booth.
— Seeley !
— Promis, je ne lui dirai rien ! approuva t-il contrarié.
— Bien…
— Tu sais, si tu as des problèmes d'argent, on peut vous donner…, débuta innocemment l'agent du FBI.
Sans attendre, Cal comprit où son ami voulait en venir et refusa catégoriquement :
— Non ! Pas d'argent entre amis.
— Ok, pas de prêt, mais laisse moi au moins t'aider. Le FBI serait ravi que tu travailles comme consultant sur des affaires. Je sais que tu ne portes pas le FBI dans ton coeur, mais le directeur Dilon est plus pondéré qu'autrefois. Il sait le talent que tu as et si tu veux la vérité, je crois qu'il regrette beaucoup de t'avoir mis de côté.
— Il n'a pas appelé Rader à la rescousse pour se consoler…, maugréa Cal contre son rival.
— J'ai fait en sorte qu'il ne passe pas les portes des bureaux.
Cal lâcha un léger rire. Booth l'imita et ajouta plus sérieusement :
— Si tu acceptes, je dirai à Dilon que tu travailles seulement avec moi ou pour le service d'Aaron. Comme ça tu te feras de l'argent, sans être embêté par les bureaucrates, et moi… je pourrais veiller sur toi.
— Laisse-moi y réfléchir.
— Ok, tu sais où me contacter.
Cal acquiesça puis indiqua à son ami de ne plus parler de ce sujet alors que Nicholas était revenu avec leur commande. L'adolescent posa respectivement les deux desserts glacés devant son père et Seeley et prit place autour de la table. Les yeux gourmands, il piqua sa cuillère dans sa coupe de glace exclusivement chocolatée pour en prendre une bouchée.
— Glace au chocolat avec un supplément de crème chantilly, sourit son père. Tu t'es fait plaisir.
— C'est oncle Seeley qui paye alors j'en profite ! sourit Nicholas.
— Qu'est-ce que t'as choisi ? demanda Cal à son ami, d'un regard suspicieux sur sa glace.
— Glace à l'ananas, j'adore ça ! jubila Seeley.
L'expert en mensonge émit une expression de dégout et répliqua :
— T'as toujours eu mauvais goût en dessert !
— C'est toi qui dit ça ?! Tu choisis des parfums qui n'existent même pas ! Glace au thé et pourquoi pas glace aux pruneaux pendant qu'on y est !
— Ça a des vertus pour le corps ! Il faut protéger son transit.
— Mouais…
Nicholas s'amusa de la dispute enfantine des deux hommes, qui dériva rapidement sur leur préférence respective entre le football européen et américain. Il n'y avait pas une seule chose sur laquelle les deux amis étaient d'accord et pourtant leur amitié résistait toujours au temps.
Au Lightman Group, l'équipe travaillait, avec l'aide de Reynolds, sur une mince affaire d'accident de train. Lors d'un trajet pourtant habituel, le train avait fait une sortie de route et causé deux morts ainsi que plusieurs blessés. Dans cette histoire, l'agence avait été sollicitée par le maire de la ville. Celui-ci voulait obtenir le maximum d'éléments afin de les présenter au procureur général, avant le jugement au tribunal entre la société de chemin de fer et les plaignants qui étaient victimes de la collision. Le Lightman Group ne devait prendre position pour aucune des deux parties. Il devait seulement départager le vrai du faux et savoir si la société était entièrement responsable de cet accident.
Ria et Loker avaient été envoyés sur les lieux de l'accident pendant que Gillian analysait, dans le laboratoire, les différentes vidéos envoyées par la société des chemins de fer. Devant l'écran, un détail gêna la psychologue qui repassa la séquence.
— Tu te fais une séance de film pendant tes heures de travail ? plaisanta une voix masculine derrière elle.
— J'aurai préféré un film romantique…, soupira t-elle, en arrêtant la vidéo. Elle se retourna et regarda son mari s'approcher d'elle pour l'embrasser furtivement sur les lèvres. Elle arbora un sourire et lui demanda sur un ton particulièrement joyeux :
— Alors, comment était le match ?
— Génial, ton fils a encore mené son équipe à la victoire !
— C'est vrai ! J'aurai tellement voulu être là…, dit-elle, d'une petite moue boudeuse. Cal s'amusa de son air enfantin et la rassura d'un fin sourire :
— Il y aura d'autres matchs.
— Mmh...
— Alors, ça avance votre affaire de train ?
— Je suis en train d'analyser une vidéo que la société m'a envoyé… J'ai l'impression qu'il y a quelque chose d'étrange…
— Montre-moi ça, dit-il, en focalisant son regard sur l'écran. Gillian activa la vidéo. Sur celle-ci, un train fonça à tout allure jusqu'à faire une embardée et se renverser violemment sur le flanc.
— Le train a respecté la limite de vitesse, indiqua Gillian, mais j'ai comparé ce moment avec un autre jour. Regarde.
Elle activa une autre vidéo. Cal fixa toute son attention sur les images qui défilaient sous ses yeux.
— Le train ralentit, souligna t-il perplexe.
— Exact, et j'ai remarqué qu'il le faisait à chaque fois. Excepté ce jour où il y a eu l'accident.
— Le chauffeur a survécu ?
— Oui, il n'a eu qu'un bras cassé. Il a eu beaucoup de chance.
— De la chance, je ne sais pas, mais heureux d'être en vie, surement. Vous l'avez interrogé ?
— Il va venir au Lightman Group.
— J'peux t'aider si tu veux.
— Ria et Loker sont allés poser des questions au sous-directeur de la société. J'attends leur retour.
Cal acquiesça et décida de changer de conversation :
— J'ai vu Seeley. Je l'ai invité au match.
— Il va bien ?
— Ouais… il m'a dit qu'il s'inquiétait pour nous. Temp' lui aurait dit qu'on avait des problèmes d'argent…
— Oh non ! s'affola t-elle. J'avais dit à Temperance de ne pas en parler…
— C'est son mari, et Temp' ne connait pas vraiment la notion de confidentialité, sourit-il.
— Je suis désolée Cal, s'excusa t-elle peinée. Elle me posait des questions et je ne savais pas quoi lui répondre…
— Ce n'est pas grave chérie. Il m'a proposé de faire quelques consultations pour le FBI. Je n'ai pas encore accepté, mais ça peut mettre du beurre dans les épinards…
— Ça peut être une solution, seulement si cela reste occasionnelle. Tu travailles déjà assez comme ça au Lightman Group.
— Et c'est toi qui dit ça, s'amusa t-il.
— Je travaille, mais je sais m'arrêter quand il le faut. Toi, tu es capable de travailler même la nuit.
— Sauf, si je sais que tu m'attends pour faire des choses plus intéressantes…, répliqua t-il, en se rapprochant aguicheusement de sa femme.
— Cal, souffla t-elle rieuse, par leur soudaine proximité.
— Ce soir, on pourrait réserver notre soirée… qu'est-ce que tu en dit…
— J'en dis que cela me semble d'être un bon programme, mais que je ne peux rien te promettre…
— On peut toujours le faire dans mon bureau, y'a un canapé…
Il pencha sa tête vers son visage. Un fin sourire carnassier se dessina sur ses lèvres. Il caressa sa bouche avec la sienne dans le but de la faire languir. Elle ria intérieurement de ses manières séductrices et lui répondit suavement :
— Alors là, tu rêves chéri.
— Comment tu sais, répliqua t-il amusé, avant de capturer ses lèvres pour échanger un baiser. Ils s'embrassèrent tendrement avant d'être brusquement séparés par leur réceptionniste à la porte d'entrée.
— Dr. Lightman ! proclama Anna. Les deux experts en mensonge tournèrent d'un même chef leur regards sur la réceptionniste. Face à leurs expressions interrogatives, Anna comprit qu'ils ne savaient pas à quel Lightman elle s'adressait.
— Enfin… Gillian, se rectifia Anna. Le chauffeur du train accidenté est arrivé.
— Très bien, merci Anna, dit Gillian d'un air embarrassé. Anna regarda suspicieusement ses deux patrons. Cal passa une main sur sa bouche alors que Gillian laissa divaguer son regard sur le sol. Ils n'étaient vraiment pas des professionnels de la dissimulation. Anna leva un sourcil et tourna les talons. Déconcertée, Gillian ferma ses yeux et soupira :
— Maintenant tu sais pourquoi je ne veux pas qu'on fasse l'amour au bureau !
— Il suffit juste de fermer la porte à clé ! rétorqua t-il, avec les bras écartés.
— T'es incroyable…, soupira t-elle, en se dirigeant vers la sortie avec son compagnon sur les talons.
— Quoi ? En plus on l'avait déjà fait !
— C'était bien avant la naissance des enfants et… tu avais été insupportable toute la journée parce que Rick avait planté ton ordinateur pour jouer dessus…
— Je peux l'être aujourd'hui !
— Pas de sexe au travail, clarifia t-elle.
— T'es pas drôle…, bougonna t-il.
Gillian secoua sa tête et entra, avec son mari particulièrement déçu, dans une pièce aseptisée. À l'intérieur, le chauffeur du train attendait patiemment la psychologue dans le cube lumineux. Ce dernier était anxieux, inspirait profondément et caressait le dos de sa main de manière répétitive comme pour se rassurer. Gillian entra, seule, dans le cube. En retrait, Cal resta derrière les parois transparentes pour observer la scène. À côté de lui, Killian, un employé, se trouvait derrière un ordinateur pour capter toutes les fuites émotionnelles de l'interrogé. Un procédé extrêmement précis rendu possible grâce aux caméras placées dans la cage de verre. Gillian prit posément place en face du conducteur et le salua avec un sourire chaleureux :
— Bonjour M. Olson.
— Hum, bonjour…
— Vous savez qui nous sommes ?
— On m'a dit que vous étiez des professionnels dans la détection de mensonge.
— C'est exact. Je vais vous poser quelques questions au sujet de l'accident. Vous êtes prêt ?
— Allez-y.
— Vous vous appelez bien, Gary Olson ?
— Oui, confirma t-il.
Désormais, Gillian avait une base pour travailler la suite de l'interrogatoire.
— Depuis combien de temps travaillez-vous pour la compagnie ?
— Ça fait plus de vingt ans que je suis conducteur de train et je n'ai jamais eu d'accident.
Derrière la vitre, Cal déclara :
— Il élude la question…
Gillian remarqua la même chose que son mari, mais elle avait aussi capté l'anxiété débordante du conducteur de train. Un sentiment qui pouvait biaiser l'entretien si elle n'avait pas su à quoi cela était dû.
— M. Olson, dit-elle, d'une voix douce. Notre agence ne prend partie ni pour la compagnie, ni pour la partie civil. Nous donnons seulement les éléments au procureur général qui donnera ensuite notre étude au tribunal. Tout ce que nous souhaitons, c'est la vérité.
— Ce travail c'est toute ma vie…, répondit Olson avec émotion. J'ai conduis des trains dans le nord du pays pendant toute ma carrière, mais le jour où ma femme est morte, j'ai décidé de me rapprocher de ma fille. Elle vient d'avoir un petit garçon… Alors, quand j'ai su que cette compagnie cherchait des chauffeurs, j'ai pris le job…
— Avez-vous fait une dépression ou avez-vous déjà eu des pensées suicidaires ?
— Non ! réfuta Olson presque offensé. Enfin... j'étais déprimé à la mort de ma femme, mais jamais je n'ai songé au suicide ! Vous savez, il ne me restait plus qu'un an à tirer avant de prendre ma retraite… Je… deux personnes sont mortes à cause de moi…, termina t-il, le visage affligé.
Gillian exprima sa compassion puis se retourna vers Killian pour lui faire signe à travers la vitre. Le jeune homme comprit le message et apporta un ordinateur portable qu'il déposa sur la table. La psychologue remercia l'employé puis présenta à Olson les mêmes vidéos qu'elle avait montré plus tôt à son mari.
— Savez-vous pourquoi le train pouvait ralentir à cet endroit ?
— Je… Je ne sais pas, répondit Olson, d'un froncement de sourcils. Normalement, il ne devrait pas. Nous avons des limites à respecter à cause des horaires de départs et d'arrivées. Si un train venait à ralentir, à chaque fois sur la ligne, cela entraînerait des retards et des pertes d'argent et même des accidents…
— Auriez-vous vu des problèmes techniques qui aurait pu conduire à causer cet accident ?
— Non, affirma Olson. Je peux vous assurer que si la compagnie le savait, elle aurait rectifié le tire. Cette ligne est l'une des plus fréquentées du réseau. Elle n'aurait jamais pris le risque de la mettre hors d'usage.
Gillian remercia Olson pour ses réponses sincères et retrouva Cal et Killian à l'extérieur du cube.
— Olson ne mentait pas, conclut-elle. Il ne sait pas ce qui a pu faire dérailler le train.
— Pourtant, il y avait du remord sur son visage, releva Killian.
Cal lança un regard blasé à son employé et répliqua :
— Vous en auriez aussi si c'était vous qui aviez conduit un train tuant deux personnes.
À cette remontrance, Killian mima une expression contrite. Il devait vraiment apprendre à tenir sa langue ou il finirait comme Loker.
— Olson est à ce poste depuis moins d'une semaine, indiqua Gillian. Il faudrait interroger les conducteurs précédents qui ont conduit sur cette ligne. Killian, recherchez-les et faites les venir ici dès demain.
— Oui Dr. Lightman, s'exécuta l'employé, en prenant le chemin de la salle d'analyse. Seul avec son mari, Gillian souffla mélancoliquement :
— Il était à un an de sa retraite.
— On va trouver les responsables, promis Cal. Ça te dit un Slush à l'orange ?
Il la connaissait par coeur. La psychologue esquissa un sourire et sortit avec son compagnon à l'extérieur de l'agence pour une pause sucrée bien méritée.
Au même moment, Eli et Ria étaient au siège de la compagnie pour réclamer des réponses, concernant l'accident de train aux conséquences mortelles. Les deux collègues se trouvaient dans le bureau du sous-directeur de la compagnie ferroviaire. Il s'appelait Franck Cobbs. C'était un homme avec un léger embonpoint et les cheveux dégarnis. Il portait un beau costume qui contrastait avec les uniformes de ses employés. Derrière son grand bureau, il regarda ses nouveaux invités avec un air plutôt contrarié. Une caméra était cadrée sur son visage et filmait tout le déroulement de l'entretien. Aucun indice ne devait être manqué.
— Savez-vous ce qui aurait pu entrainer l'accident du train ? demanda Loker.
— Erreur humaine, répondit Cobbs. Cela arrive. Olson était un nouveau chauffeur. Il est probable qu'il ne connaissait pas la ligne et qu'il a fait une mauvaise manipulation.
— M. Olson a plus de vingt ans d'expérience et d'après son dossier, il n'a eu aucun accident, contra Ria.
— Comme on dit, il était là au mauvais endroit au mauvais moment.
— Comme les deux passagers qui sont morts dans cet accident, vous voulez dire ?
Le directeur esquissa un rictus de mépris. Torres tentait de le repousser dans ses retranchements. Cobbs se leva pour s'assoir sur le rebord de son bureau. D'un raclement de gorge, il déclara :
— Écoutez… La compagnie est prête à vous donner tout ce que vous désirez dans cette enquête. Nous n'avons rien à cacher Mlle Torres.
Ria regarda la position des mains de Cobbs placées devant son entrejambe. D'un mince sourire, elle signifia avec un regard sur ses mains :
— Pourtant, vos mains disent le contraire.
Cobbs jeta un regard intrigué à Ria et décroisa rapidement ses mains en comprenant l'allusion.
Après cette infructueuse entrevue, Torres et Loker décidèrent d'aller voir le chef de la maintenance, M. Moran. L'employé était dans un immense entrepôt où toutes les pièces détachées et trains hors services étaient réparés. En plein travail, Moran marchait activement en répondant aux questions des deux jeunes experts en mensonge.
— Connaissiez-vous Gary Olson ? l'interrogea Loker.
— Pas très bien, répondit fortement Moran, pour se faire entendre des machines bruyantes environnantes. Je l'ai vu une fois pour son premier jour. Il avait l'air d'un gars sympa et appliqué. On est nombreux sur le site. On voit les conducteurs lorsqu'il faut faire un point sur la sécurité.
— Et vous ne l'aviez pas fait avec Olson ?
— Ce n'est pas moi qui m'en occupait ce jour-là !
— Qui était-ce ? réclama Ria.
Moran s'arrêta et désigna d'un mouvement de tête un homme occupé à souder des parties métalliques.
— Ethan Brock ! Il travaille ici depuis cinq ans comme employé de la maintenance des chemins de fer.
— M. Moran ! l'appela au loin un ouvrier.
— Il faut que je vous laisse, s'excusa Moran. Si vous avez d'autres questions, vous savez ou me trouver.
Loker et Ria acquiescèrent et tournèrent leur regard sur Brock qui utilisait désormais un chalumeau avec beaucoup de dextérité.
— Il n'a pas l'air commode, grimaça Eli. On devrait peut-être attendre l'heure du déjeuner…
Ria jeta un regard blasé à son collègue et s'avança vers Brock avec détermination.
— Comme tu veux…, soupira t-il, en suivant les pas de la brune. Si t'as pas peur de finir en steak grillé…
— Ethan Brock ! l'appela Ria, afin que l'employé arrête son activité. Ce dernier arrêta son outil et tourna son regard acéré sur Torres.
— Qui l'demande ?
— Nous travaillons pour le Lightman Group. On a des questions à vous poser au sujet de l'accident de train.
— J'ai pas grand choses à vous dire…, réfuta Brock, en reprenant son activité.
— Votre patron, M. Moran, nous a dit que ce jour là vous étiez responsable de la maintenance de la ligne.
— On est plusieurs à travailler dessus.
— Ça ne veut pas dire que vous n'êtes pas autant responsable, répliqua Ria.
Tiquant à ces mots, Brock fusilla Torres du regard et ragea :
— Vous êtes en train de me dire que c'est de ma faute si le train a déraillé ?!
— Non, répliqua rapidement Eli, effrayé à l'idée que Brock puisse utilisé ses outils contre eux. — On cherche simplement la vérité.
— C'est pas c'que avait l'air de dire votre copine.
— Elle ne s'est pas levée du bon pied c'est pour ça…
— Vous avez vérifié l'état des lieux avant que le train démarre, enchaina Ria.
— Ouais, moi et mon équipe on a rien trouvé.
— Pourtant, je vois que quelque chose vous gène.
— P'être que c'est vous, contra t-il, avec un rictus de mépris.
— Aussi, mais je crois que vous croyez à vos propres mensonges.
— Si vous le dites, persiffla Brock, d'un haussement d'épaules. J'ai du travail.
— Vous arrivez à dormir la nuit en sachant que deux personnes sont mortes dans cet accident ? demanda Ria, revêche que Brock ne présente pas plus de sentiments.
— Des personnes meurent tous les jours ! Si j'dors pas la nuit, c'est parce que je me demande comment je vais payer les médicaments de ma femme avec le salaire de misère qu'on reçoit ! À votre place, je chercherai les vrais coupables!
— Qui sont les coupables pour vous ? l'interrogea Loker. Cobbs dit qu'Olson aurait fait une erreur.
Brock émit une expression de désaccord avec les propos d'Eli. Ria discerna l'émotion et répondit à sa place :
— Vous n'y croyez pas. Cobbs vous dégoûte, pourquoi ?
Brock lâcha un long soupir. Les deux experts en mensonge ne partiraient pas tant qu'il n'aurait pas répondu. L'air méprisant, il déclara :
— Y'a des gens qui seraient prêts à faire n'importe quoi pour faire du bénéfice. C'est tout ce que j'ai à dire.
Brock jeta un dernier regard à Loker et Torres et s'éloigna pour s'occuper d'autres réparations.
— Cobbs a dû faire quelque chose, argua Ria.
Les deux collègues s'échangèrent un regard entendu et contactèrent Gillian afin de lui faire parvenir les derniers éléments de l'enquête.
En fin de journée, l'équipe ne pouvait plus travailler sur l'enquête en cours et reporta leur travail au lendemain. Cal et Gillian congédièrent leurs employés puis retrouvèrent leur foyer. Ils profitèrent de l'absence de leurs enfants, encore au lycée, pour travailler le budget du Lightman Group. Cloisonnés dans leur salle à manger, ils tentèrent de trouver un moyen afin de faire rebondir l'agence au bord du dépôt de bilan. Le résultat était sans appel. Il allait falloir faire des économies drastiques. L'agence était onéreuse et les investisseurs se faisaient moins nombreux. Les deux experts en mensonge étaient littéralement submergés sous la paperasse administrative. Face à un tel ras de marré bureaucratique, Gillian retint sa tête entre ses mains et soupira désespérée :
— Cal… Je ne sais vraiment pas ce qu'on va faire cette fois-ci...
— Chérie… C'est qu'une mauvaise passe. On a déjà vécu ce genre de situation.
— Pas de cette envergure ! Bientôt on devra licencier des employés ! En plus de ça Nick et Lou' vont bientôt être à l'université... Et Seth au lycée... Avec les frais... Je ne sais même pas si on pourra...
La psychologue se refusa de terminer sa phrase. Cal contempla le visage affligé de sa femme. Le coeur serré, il se leva et se plaça derrière elle afin de l'entourer tendrement avec ses bras.
— Je te promets qu'on va s'en sortir Gill'…, souffla t-il. Toi et moi, on a surmonté des épreuves bien plus difficiles. Tu verras, on va remonter la pente.
Gillian lâcha un léger soupir et acquiesça. Il avait toujours su la réconforter même dans les pires moments. Cal l'embrassa tendrement puis lui proposa :
— Ça te dit un pouding au chocolat ?
-- Tu sais à force de vouloir me consoler, je vais prendre deux kilos, Cal ! s'amusa t-elle.
— Sauf, si on fait du sport dans notre chambre…, répliqua t-il, avec un sous-entendu. Elle ria et Cal se rendit dans la cuisine lorsqu'il entendit des voix juvéniles dans l'entrée. Un instant plus tard, il découvrit ses deux fils et sa fille revenir des cours accueillis par leur chien Punk. Ils embrassèrent leur mère et rejoignirent leur père dans la cuisine pour prendre quelque chose à grignoter. Gillian commença à ressembler les documents sur la table en demandant à ses enfants :
— Vous avez passé une bonne journée les enfants ?
— Ça peut aller, répondit Louise en embrassant son père. Elle prit place autour de l'ilot central et ajouta :
-- Mme. Crowell nous a rendu nos contrôles. J'ai eu un B.
— Et toi ? quémanda Cal à Nicholas, qui attrapa une boite de cookie.
— A + c'était trop facile !
— Évidement, t'es bon en math ! jasa sa soeur.
— Pas que, en physique, en histoire, en sport…, énuméra malicieusement Nicholas, dans l'unique but de faire rager sa soeur.
— Pfff, tu révises même pas alors que moi je suis obligée de travailler plus que toi !
— Hé ouais ! C'est l'aîné le plus intelligent ! proclama t-il, en croquant dans son gâteau qui s'émietta malencontreusement sur le sol.
— Faut voir, riposta son petit frère rieur.
Nicholas lâcha un rire.
— Prend une assiette Nick, le sermonna sa mère.
Il mangeait vraiment comme son père, songea t-elle désespérée. Le jeune homme s'excusa et récupéra une assiette, donnée par son père, pour éviter d'autres saletés.
— N'importe quoi ! s'outragea Louise.
— Si ! Il est prouvé scientifiquement que l'ainé développe un QI plus élevé ! argua son frère avec les même gestes évasifs de ses mains que son père. Heureusement qu'ils se sont arrêtés à deux, sinon tu serais condamnée à rester à jamais dans ta chambre !
— Je te signale que je suis arrivée cinq minutes après toi !
— C'est largement suffisant pour que ton cerveau se soit rétracté à la taille de ce cookie !
— Rhoo tai toi Nick !
Seth ria à nouveau de la joute verbale entre son frère et sa soeur en caressant son chien qui était heureux de revoir son maître.
— Seth, le rappella à l'ordre sa mère.
— Laisse ta soeur tranquille, Nick, le réprimanda son père qui cherchait une cuillère pour le pouding de sa femme. Le jeune homme ne sembla pas vouloir écouter les remontrances de son père qui continua sa plaidoirie inutile :
— Et encore je suis gentil ! Parce qu'il y a des jumeaux qui aspire leur frère ou soeur et en grandissant ils deviennent comme un petit furoncle sur la peau ! Et j'aurai eu juste à appuyer dessus pour t'éclater ! J'aurai eu une plus grande chambre… Tu devrais me remercier ! Grâce à moi, le seul bouton que je peux éclater c'est lui qui est en train d'apparaitre sur ton nez ! indiqua t-il, en pointant du doigt, avec un malin plaisir, le nez de sa soeur.
La jeune fille toucha mécaniquement le bout de son nez et sentit un petit bouton qui avait fait son apparition. Effrayée, elle s'était vite enfermée dans la salle de bain pour trouver un moyen de camoufler cet ornement disgracieux. Seth ria et s'exclama :
— Avant de l'éclater assure toi que ce n'est pas un membre de la famille !
— Seth ! le gronda sa mère, d'un regard réprobateur.
— Quoi ? s'exclama t-il, la bouche en coeur alors que son grand frère ria à ne plus s'en arrêter. Cal ria lui aussi légèrement de la situation, mais pas assez discrètement pour que sa femme le sermonne à son tour.
— Cal !
— J'suis désolé chérie…, s'excusa t-il, avec un sourire qu'il essayait tant bien que mal de réprimer. Les garçons, vous vous excuserez auprès de votre soeur.
— Ok…, soupirèrent t-ils.
— J'ai largement le temps de finir mes devoirs avant qu'elle sorte de la salle de bain, plaisanta Seth.
À ces mots l'adolescent s'éclipsa, avec son chien, dans sa chambre en quatrième vitesse devant les regards blasés de ses parents qui lui commandèrent d'aller travailler au plus vite.
— Au fait, Matt va passer à la maison pour prendre des devoirs en retard, signala Nicholas.
Le jeune homme croqua dans son gâteau puis s'assit nonchalamment autour de la table de la salle à manger. D'un regard perplexe, il observa les quelques documents encore éparpillés.
— Qu'est-ce que vous faites ?
— On travaille, répondit son père. Chose que tu devrais aussi faire.
Nicholas omit les paroles de son père et récupéra une feuille pour l'étudier. D'un froncement de sourcils, il leva son regard intrigué sur le visage de sa mère et demanda :
— Vous avez des problèmes de fric ?
Nicholas capta l'anxiété sur le visage de sa mère. Celle-ci s'apprêta à lui répondre lorsque son mari récupéra rapidement le document des mains de son fils intrusif.
— T'occupe pas de ça. Va faire tes devoirs Nick.
— Comme tu veux, souffla t-il face au regard appuyé de son père. Nicholas se leva et se dirigea vers l'escalier pour rejoindre sa chambre à l'étage.
— Et je veux que tu révises ! ordonna Cal. Pas seulement les chapitres qui t'intéressent !
— Dis ça au bouton qui pousse sur le nez de Lou' !
Cal leva ses yeux au ciel. Ces gosses étaient irrécupérables. À se demander de qui ils tenaient ça…
— Cal, l'interpella Gillian, en rangeant tous les papiers dans une chemise. Les enfants ne doivent pas être au courant pour nos problèmes d'argent. Je ne veux pas qu'ils s'inquiètent. Ils ont déjà traversé trop de choses l'année dernière…
— Ils ne le sauront pas parce qu'on va s'en sortir, la rassura t-il, en l'embrassant dans ses cheveux. Il déposa devant elle un petit pot de pouding au chocolat. La psychologue émit un faible sourire. Elle tendit le dossier à son mari afin qu'il puisse le ranger loin des regards indiscrets de leurs enfants.
Une heure plus tard, Matthew passa, comme prévu, chez les Lightman. Au pas de la porte, Nicholas invita son ami à entrer. Il lui commanda de rester au pied de l'escaliers et disparut à l'étage pour aller lui chercher les devoirs souhaités. Cal passa saluer leur invité en serrant joyeusement sa main :
— Matt ! Ça fait longtemps qu'on ne s'était pas vu, comment tu vas ?
— Bien et vous, M. Lightman ?
Cal discerna une expression négative sur le visage du garçon, bien qu'il répondit :
— De même. Je t'ai vu au match !
— Ah, vous avez dû apprécier, Nick a encore fait des miracles, sourit-il.
— Il a de qui tenir !
Matt ria légèrement.
— D'ailleurs…, poursuivit Cal, avec inquiétude. Tu ne semblais pas en grande forme. J'ai l'impression que tu avais du mal à te déplacer sur le terrain…
— Hum, ouais… Les courbatures ça peut faire souffrir n'importe quel sportif, même les meilleurs ! répondit l'adolescent, en massant mécaniquement son cou.
— Je vois ce que tu veux dire. Je faisais du 110 mètres haies quand j'étais jeune !
— Vraiment ? demanda surprit Matthew.
— Demande à Nick, si tu ne me crois pas !
Au même instant, Nicholas arriva avec une pile de devoirs entre ses mains.
— Qu'est-ce que mon père te raconte encore ! plaisanta Nicholas.
— Il ne me croit pas quand je lui ai dit que j'étais un champion du 110 mètres haies !
— Ouais…, soupira son fils.
— Tu vois ! clama Cal pour Matt.
— Pour fuir les flics de la Dame de fer ! Aussi rapide qu'un lapin…, ajouta t-il sournoisement.
Cal leva ses yeux au ciel. Gillian apparut dans le couloir et salua à son tour le nouveau venu avec enthousiasme :
— Oh ! Bonjour Matthew ! Tu vas bien ?
— Bien, Mme Lightman ! Vous êtes toujours aussi ravissante, complimenta le jeune homme.
— Merci Matthew, sourit-elle. Pourquoi tu ne me dis pas ça toi ! bredouilla t-elle contre son conjoint.
— Parce que si je te le disais tous les jours, à un moment donné tu me traiterais de menteur…
— Mouais…, fit-elle avec suspicion.
Nicholas se déchargea de son poids à son ami et signala :
— Tiens, c'est tout ce que tu as à rattraper pour cette semaine.
— Merci, Nick.
— Ben dit donc… Tu chomes pas toi ! proclama Cal, d'un haussement de sourcils.
— J'étais malade cette semaine, expliqua Matthew, d'une voix légèrement aiguë.
Cal fronça ses sourcils d'interrogation au ton employé par le jeune homme. Il ne put se poser plus de questions sur ces étrangetés non-verbales que ce dernier s'exclama :
— Bon, je vais vous laisser. J'ai des devoirs à rattraper !
— Tu veux que je te raccompagne chez toi ? proposa Nicholas.
— Non, je vais prendre le bus ! objecta rapidement son ami.
— Ça me dérange pas tu sais !
— Non, c'est bon ! Je ne vais pas te déranger, en plus il faut que je passe au supermarché !
— Comme tu veux, laisse-moi au moins attendre le bus avec toi !
Matthew accepta l'offre et les deux amis quittèrent la maison. Gillian passa dans la cuisine, suivit de son compagnon, pour préparer le repas de ce soir.
— T'as vu ? l'interrogea Cal.
Elle sortit les aliments de frigo pour les disposer sur l'ilot central et réclama intriguée :
— Quoi donc ?
— Matthew mentait. Il n'était pas malade cette semaine.
— Il a peut-être séché les cours. C'est un ado tu sais…, répondit-elle, d'un haussement d'épaules.
— Un ado n'aurait pas honte de ça.
— Sauf, s'il le cache à ses parents…
— Dit l'élève modèle, jasa Cal.
Gillian ria et commença sa recette. Une main appuyée contre la table, l'expert en mensonge l'observa pensivement avant d'alléguer :
— J'me demande si tu m'aurais accosté si on avait été dans le même lycée…
— J'étais dans ma période Grease. Tu avais une chance si tu étais un de ces garçons avec un blouson noir !
— J'étais un de ces garçons solitaires et hors la loi, argua t-il avec un air mystérieux.
Elle ria encore et plaisanta :
— Le genre à fumer dans les toilettes et à passer tous ses samedis en salle de retenue !
— On m'appelait le Loup de Londres ! Toutes les filles étaient à mes pieds, mais pour toi j'aurai repris le droit chemin !
— N'importe quoi ! gloussa t-elle.
— Oh yeah baby, scanda t-il, avant de prendre sa femme dans ses bras pour la faire danser. — J't'invite au bal du lycée !
Dans ses bras, Gillian entra dans son jeu en répliquant rieuse :
— Mon père ne veut pas que je traine avec des voyous.
— Je te ramènerai avant qu'il ne s'aperçoive que tu es passée par le treillis de la fenêtre de ta chambre…
Ils rirent puis Cal captura sa bouche pour l'embrasser. Gillian passa ses deux bras autour de son cou pour approfondir l'échange lorsqu'une voix féminine les interrompit :
— Vous avez une chambre pour ça !
Cal jeta un regard blasé à sa fille, Louise, puis répliqua :
— Je sais ! Mais son père refuse que je m'enferme avec elle !
— Quoi ? demanda t-elle perdue.
— Ton père dit des bêtises..., soupira Gillian. D'ailleurs, il en dirait moins s'il m'aidait à faire la cuisine !
— Tu n'arrêtes pas de dire que je cuisine aussi bien que Teresa ! Y'a de quoi se vexer !
Face au regard appuyé de sa femme, Cal attrapa rapidement un sac de pomme de terres pour commencer à les éplucher. Louise ria et entreprit de mettre le couvert pour le repas du soir.
Un peu plus tard, Gillian se mit à la tache de faire une machine à lavée. Elle tria le linge dans la panière familiale lorsqu'un petit objet se déroba des poches d'un jean masculin. Elle se pencha pour le ramasser et se tétanisa lorsqu'elle comprit de quoi il s'agissait. Oubliant la tache ménagère, elle s'empressa de chercher son mari et le trouva dans le salon à regarder la télé avec Louise dans ses bras. À l'encadrement, Gillian l'interpella :
— Chéri, tu peux venir une minute, s'il te plait.
Cal aperçut l'air ennuyé de sa femme et leva un sourcil lorsqu'elle effectua d'étranges signes pour qu'il vienne plus vite. Perplexe, il s'exécuta pour la suivre dans le couloir.
— Qu'est-ce qui se passe ?
— J'ai trouvé ça ! dit-elle d'une voix basse, en présentant à son mari un préservatif dans son emballage. Cal sourit et répondit de manière séductrice :
— Tu ne veux pas attendre ce soir pour le sport de chambre…
— Non ! Ce n'est pas à moi !
— Comment ça ? fit-il, entre inquiétude et colère. Ne me dis pas que c'est Lou' parce que…
— J'ai trouvé ça dans les affaires de sport de Nicholas ! le coupa sa femme, avant que son mari ne crie sur leur fille sans raison valable. Tout d'un coup, la colère sur le visage de Cal disparut pour une expression entre amusement et fierté. Cela horrifia la mère qui chuchota agacée :
— Pourquoi tu souries ?!
— Pour rien…, réfuta t-il, en raclant sa gorge pour dissimuler son expression amusée.
— Cal ! C'est sérieux ! Il n'a que 17 ans ! Tu sais les conséquences que cela peut avoir !
— J'avais deux ans moins que lui quand j'ai commencé…, répliqua Cal, d'un haussement d'épaules.
— Donc pour Em' et Lou', tu veux appeler le FBI et l'armée, mais pour ton fils, tu veux les honneurs ?!
— Je… Je pense simplement qu'on ne doit pas en faire une affaire d'état, la tempéra t-il, avec des gestes évasifs de ses mains. C'est tout…
— J'hallucine ! s'agaça t-elle. Elle le pointa avec un index inquisiteur et le menaça : — Écoute moi bien Cal, il est hors de question que je devienne grand-mère dans les mois qui suivent ! Donc, tu vas parler à ton fils et tu vas lui dire que… s'il continu, il pourra dire adieu à la voiture !
Cal réfréna un rire et demanda interloqué :
— T'es sûre que tu es psy ?
Bras croisés contre son corps, Gillian déclara déterminée :
— Tu vas lui parler sinon on ne fait rien ce soir !
— T'aurais dû commencer par ça…
Gillian jeta un regard noir à son compagnon puis lui indiqua la direction de la porte d'entrée. Comprenant le message, ce dernier soupira et sortit de la maison pour retrouver son fils en train de bricoler la veille voiture de collection dans leur garage. Les mains dans les poches, il découvrit deux pieds dépassés sous l'armature de la voiture avec à proximité une boite à outil. Il s'accroupit à sa hauteur et l'interpella :
— Nick !
— Papa ? Tu peux me passer la clé sur le toit de la voiture s'te plait !
Le père s'exécuta et demanda :
— Tu peux sortir une minute.
— Yep ! dit-il, en quittant sa cachette pour rejoindre son père. Une fois sur ses deux pieds, il nettoya ses mains tachées de graisse avec un chiffon usagé. Face à l'expression préoccupée de son père, Nicholas pencha sa tête sur le côté et demanda intrigué :
— Tu voulais me dire quelque chose ?
— Hum… oui…, bafouilla t-il. Il chercha ses mots et argua mal à l'aise, avec des gestes évasifs de ses mains :
— Tu vois, tu… Tu as 17 ans, tu es un sportif et je sais qu'à ton âge on peut avoir envie de découvrir de nouveau terrain et de nouveau sport… pour satisfaire certaine envie… mais parfois ses envies peuvent conduire à faire un score qu'on ne s'attendait pas à faire…
Nicholas s'empêcha d'éclater de rire devant l'embarras plus que visible de son père. Il savait parfaitement où il voulait en venir avec ses allusions sportives. Cal n'avait jamais vraiment su parler de ces choses là de la vie. Aux huit ans de son fils, Cal avait essayé de lui faire croire que les enfants naissaient dans les choux, ou dans les haricots en boite dans sa version alambiquée, avant que sa mère n'intervienne d'exaspération et lui dévoile la réelle vérité sur le secret de la vie. Ne souhaitant pas le vexer, il arbora un air sérieux et attendit patiemment qu'il termine ses insinuations. Tout d'un coup, Cal plissa ses yeux d'appréhension et demanda subitement :
— Est-ce que tu t'es déjà entrainé ?
— Si j'ai bien suivi… Tu me demandes si j'ai déjà couché avec une fille ?
Face à la franchise de son fils, Cal entre-ouvrit sa bouche et se sentit sur le coup un peu stupide. Ses enfants avaient vraiment le don de mettre les gens dans l'embarras. Encore une fois, il se demanda bien de qui ils pouvaient tenir ça ! Le père émit une petite moue de sa bouche et approuva :
— Heu ouais…
— Oui, c'est déjà arrivé.
Cal ne s'attendit pas à cette réponse. Perturbé, il s'adossa contre le flanc de la voiture pour ne pas s'écrouler. Le regard perdu dans le vide, il souffla :
— Tu as déjà…
— Ça va ? s'inquiéta Nicholas de sa réaction.
— Ouais… c'est juste…, bafouilla t-il avant de retourner son regard surpris sur son fils. — Ça fait longtemps ?
— L'année dernière…
— L'année…, souffla t-il, perdu dans ses pensées. Il essaya de savoir comment il n'avait pas pu remarquer ce grand changement dans la vie de son unique fils et songea que c'était l'époque où ils avaient pris leur distance.
L'adolescent pinça ses lèvres puis demanda :
— Y'a une raison particulière à ce que tu me poses ce genre de question ?
Reprenant ses esprits, Cal montra le contraceptif à son fils.
— Hum… ta mère a trouvé ça dans tes poches…
— Oh…
— Elle s'inquiète pour toi… Je lui ai dit que j'allais te parler… Je ne pensais pas que tu avais déjà… enfin… mis un panier…, termina t-il, avec un sourire nerveux. Nicholas esquissa un léger sourire et ajouta pour le rassurer :
— Je ne l'ai pas refait… si c'est ce que tu te demandes. C'est Luke, un joueur de basket, qui me l'a donné en me disant que je pourrais m'en servir pour la prochaine fête qu'il allait organiser… Je ne comptais pas l'utiliser. Je l'ai seulement pris pour qu'il me laisse tranquille.
— Bien…, soupira son père, plus soulagé. Tu sais que ce ne sont pas des choses anodines… et que cela peut avoir des conséquences.
— Je sais…
— Tu… Tu t'es protégé au moins ?
— Oui, ne t'inquiète pas.
— Ok… Je te fais confiance Nick.
— Tu peux.
— Ta mère n'est pas encore prête à devenir grand-mère. Alors si un jour, tu sens que ça urge… bah tu penses à grand-mère Elizabeth…
Nicholas ria à la plaisanterie de son père qui l'accompagna dans son amusement. Songeur, il contempla son fils, avec un fin sourire, qui avait bien grandi depuis ses explications sur la naissance des enfants dans les haricots. Cal secoua sa tête, se détacha du véhicule puis demanda non sûr de lui :
— Au fait, tu sais si ta soeur a déjà…
— Lou' et moi, on est proche mais pas à ce point là, papa…
— Mouais… J'vais dire à ta mère de ne plus s'inquiéter…
Il s'éloigna lorsque son fils l'arrêta :
— Papa ! Je… Je voulais te demander quelque chose…
— Dis-moi.
— Tu sais mon ami Matt...
— Yep ?
— Je le trouve un peu bizarre en ce moment. Il vient rarement en cours et il rate beaucoup d'entrainements. À chaque fois que je l'appelle, il me dit qu'il est occupé… mais je sais pertinemment qu'il ment. Je ne sais pas pourquoi, mais je sens qu'il se passe quelque chose.
— Ouais, je vois ce que tu veux dire…, dit Cal, en repensant au jeune homme. Tu veux qu'on passe chez lui demain ?
Nicholas hocha positivement la tête.
— Bien. On fera ça.
OoO
À l'heure du couché, Cal entra dans sa chambre après avoir pris une douche et s'être mis en pyjama. Il rejoignit sa femme déjà sous les couvertures avec un livre entre ses mains. Son mari à ses côtés, elle posa son ouvrage, écrit par une certaine Temperance Brenan, sur le côté et demanda :
— Tu as parlé à Nick ?
— Oui, tu n'as pas à t'inquiéter.
Gillian s'apprêta à soupirer son soulagement avant que Cal n'ajoute :
— Parce qu'il l'a déjà fait depuis longtemps.
— Quoi ?! s'affola t-elle. Tu… tu en sûr ?
— C'est lui qui me l'a dit.
Abasourdie, Gillian renversa sa tête contre son oreiller. Cal s'amusa de sa réaction et employa une voix douce :
— Gill'… Il sait tout ce qu'il y a à savoir sur le sujet. Il m'a dit qu'il n'avait pour le moment pas l'intention de le refaire. On peut lui faire confiance.
— Je lui fais confiance… C'est juste que… les choses peuvent vite changer sans qu'on ne s'en rende compte…
— Mmh je sais, souffla t-il, en prenant sa compagne dans ses bras.
— Ils grandissent trop vite, Cal…
— Tu ne me croyais pas lorsque je disais ça pour Lou'… Pourtant, ils ont le même âge.
— Ne te moque pas de moi, s'amusa t-elle.
Il sourit, l'embrassa dans ses cheveux et dit :
— Pour te rassurer, j'ai donné la méthode de contraception imparable pour Nick.
— C'est quoi ?
— Je lui ai dit de penser à ta mère.
— Cal ! s'offusqua t-elle.
— Quoi ?! Ça marche bien pour moi !
— T'es irrécupérable !
— Et plus encore ! argua t-il, en se plaçant sur le corps de sa femme avec un large sourire. Il embrassa voluptueusement son cou puis mordilla sensuellement son oreille. Comprenant ce qu'il désirait, Gillian répliqua rieuse:
— Toi, tu n'es pas fatiguée…
— Nop ! Un deal est un deal… Et puis, il serait dommage de ne pas l'utiliser, dit-il, en sortant de nulle part le préservatif subtilisé à son fils.
— Je trouve ça un peu étrange..., déclara t-elle, d'un regard incertain vers le petit objet.
— On n'est pas obligé de l'utiliser…
— On a eu des jumeaux neuf mois après notre mariage ! Avec toi, je m'attends à avoir des triplés, alors met en deux !
Cal ria et embrassa son épouse qui se laissa complètement aller dans ses bras.
Le jour suivant au Lightman Group, Cal et Gillian avait trié tous les conducteurs de train qui avaient déjà pris cette ligne. Deux d'entre eux avaient démontré des signes d'angoisses plus fortes que la normale. Cal commanda à Reynolds de les interroger en même temps dans le cube lumineux. Le premier était M. Burgess et le second M. Silva. La quarantaine passée, ils travaillaient depuis très longtemps sur cette ligne. Assis en face des deux suspects, le couple d'experts en mensonge se tenaient côte à côte avec le dossier de l'affaire entre leurs mains.
— D'après votre fichier M. Silva, vous travaillez depuis de nombreuses années sur cette ligne ? l'interrogea Gillian.
— Oui…, répondit faiblement Silva.
— Vous pouvez répéter, quémanda Cal, d'un geste de main. Parce que votre oui ne semblait pas très convainquant ! Vous êtes sûr d'avoir déjà travaillé sur cette ligne ?
— Oui, répéta plus fortement Burgess pour Silva. Cal jeta un curieux regard à Burgess, mais garda ses impressions pour lui. Gillian continua son interrogatoire, tout en étudiant le dossier :
— Et je vois M. Silva… que vous avez pris une retraite anticipée que la compagnie a acceptée.
— Une retraite anticipée de plusieurs années… C'est pas avec vous qu'on va combler le déficit ! jasa Cal.
— Il a le droit de faire ce qu'il veut ! objecta Burgess, rageur. Notre métier est très difficile par moment !
— Comme tous les métiers, contra Lightman, en se penchant sur la table, ce que j'aimerai comprendre c'est pourquoi vous laissez répondre M. Burgess à votre place, M. Silva ? Vous aimez être dominé ou… c'est juste qu'on vous ennui avec nos questions ?
— Je… Je suis simplement stressé, dit Silva.
— Il n'y a pas raison de l'être, si vous n'avez rien à vous reprocher…, répliqua Cal, en ancrant son regard incisif dans celui dilaté de peur de Silva.
— Nous n'avons rien à nous reprocher, affirma Burgess, en croisant ses bras contre son corps.
— Oh il passe de "il" à "nous", releva Cal, avec un large sourire. Je crois que vous avez bien plus à vous reprocher qu'on ne le croit… Vous savez ce qui a fait déraillé le train n'est-ce pas ?
Cal capta la colère chez Burgess et la honte chez Silva.
— Oui, vous le savez…
— M. Silva dites nous ce que vous savez, exigea Gillian, moins compatissante. Si la compagnie nous cache des éléments et qu'on découvre que vous avez participé à la dissimulation de preuves d'un homicide, vous pourrez être sévèrement jugé.
— Oui, les victimes, proclama Cal, l'air menaçant. Un père de famille et un jeune homme de 20 ans qui s'apprêtait à se rendre dans une nouvelle université. Deux vies gâchées et peut-être à cause de vous…
— Je… Je ne sais pas ce qui a pu causer cet accident, bafouilla Silva.
— Olson a dû faire une erreur ! proclama Burgess.
— Vous avez l'esprit d'équipe chez les chemineaux, railla Cal. Vous rejetez tout sur le nouveau venu ! D'ailleurs… Cobbs a dit la même chose que vous…
Au nom de Cobbs, Silva détourna son regard et arbora une expression de mépris.
— Oulà ! Vous n'aimez pas beaucoup Cobbs…, déclara l'expert en mensonge, son regard fixé sur le visage de Silva. Il vous dégoûte même…
Cal se retourna vers un agent de police à l'extérieur du cube et exigea qu'on fasse sortir Burgess. Ce dernier se débattit oralement et lança un regard meurtrier à Silva avant de quitter le cube de force. Gillian resta à sa place, alors que Cal se leva pour dominer Silva.
— Pourquoi Cobbs vous dégoute ? réclama Cal.
— Je n'ai rien contre Cobbs, c'est un bon patron, mentit-il.
— Mon cul, jura l'expert en mensonge, tout ce que vous avez dit depuis que vous avez franchi cette porte, ne sont que des bobards !
Cal se pencha vers Silva pour se retrouvez qu'à quelques centimètres de son visage.
— Quand allez-vous arrêter de mentir et vous conduire en homme !
Silva baissa les yeux. Exaspéré, Cal sortit les photos des victimes pour les poser face à Silva qui n'osa pas y jeter un seul regard.
— Ces deux personnes, qui avaient la vie devant-elles, sont mortes dans un accident qui aurait peut-être pu être évité. Si vous nous aidez pas à trouver la vérité, d'autres personnes pourront aussi mourir. Vous ne pourrez jamais vivre avec cette culpabilité. Burgess peut-être, mais pas vous. Je sais que vous avez une morale, sinon vous n'auriez pas quitté votre job si vite. Vous êtes un père de famille. Si un de vos enfants avait pris ce train, comment vous sentiriez-vous ?
Silva déglutit. Une expression de tristesse passa sur son visage.
— Olson vivra tous les jours avec la mort de ces deux victimes, même si cela n'est pas de sa faute ! argua Cal, en pointant du doigt les clichés.
Gillian vit Silva pincer ses lèvres et demanda sur un ton plus tempéré :
— Vous savez quelque chose M. Silva. Dites-le nous.
Silva ferma un instant ses yeux lorsqu'il avoua :
— Je sais juste que la compagnie voulait faire des économies sur nos salaires. Les syndicats ont gueulé, alors ils ont trouvé un moyen d'en faire ailleurs…
— Sur la sécurité, devina Cal dépité alors que Silva cautionna ses dires.
— Je… Un jour sur le terrain, j'ai remarqué que des boulons devaient être changés. Je m'apprêtais à en faire la commande mais Burgess l'a annulée. Je suis allé voir Cobbs. Il m'a dit que c'était normal et que je ne devais pas m'inquiéter. Qu'un jour de plus ou de moins, cela n'allait rien changer.
— Mouais et voilà le résultat, railla l'expert en mensonge.
— Pourquoi n'avez-vous pas alerté votre haut dirigent ? l'interrogea Gillian.
— Olson et lui sont amis…
— Il vous a menacé, conclut Cal.
Silva ne répondit pas, mais son visage parla pour lui.
Après l'interrogatoire, Cal, Gillian et Reynolds se retrouvèrent dans le couloir pour une mise au point.
— Alors ? demanda Ben.
— Silva est effrayé par Burgess et Cobbs, argua Cal. Ce sont eux qui tiennent les ficelles.
— Burgess faisait tout pour que Silva ne parle pas, l'appuya Gillian.
— Vous pensez que Silva a démissionné pour éviter de se confronter à Burgess et Cobbs ?
— J'en suis persuadé ! confirma l'expert en mensonge. Ils ont dû avoir une totale emprise sur lui et la seule façon de s'en sortir pour lui, c'était la fuite…
— Il y a donc un lien entre eux.
— Mouais, il faut juste trouver lequel, signala Cal. Il vérifia l'heure sur son téléphone portable et dit : — Il faut que je vous laisse. J'ai promis à Nick de faire quelque chose.
— D'accord, approuva Gillian. Je vais analyser les dernières vidéos de Ria et Eli et attendre leur retour.
— Je vais programmer l'interrogatoire de Cobbs pour demain, ajouta Reynolds.
Gillian acquiesça et s'éloigna en direction de la salle d'analyse. Ben s'apprêta à partir lui aussi, mais Cal le retint sur place.
— Vous pouvez rester dans les parages ? J'aurais sans doute besoin de vous…
— Ça dépend pour quoi ? demanda l'agent avec suspicion. Avec vous je m'attends à tout.
— Vous avez le physique d'un videur de boite de nuit ! Vous savez bien comment faire sortir les poltrons sans ménagement non ?
Ben jeta un regard déconcerté à Lightman. Ce dernier discerna son incompréhension et répliqua blasé :
— Laissez tomber, rester simplement dans le coin !
L'agent du FBI regarda l'expert en mensonge s'éloigner et songea qu'il allait devoir rester sur ses gardes. Rien n'était moins sûr lorsque Lightman avait des idées derrière la tête. La plus part conduisaient, toutes ou presque, à l'hôpital.
Dans l'après-midi, Cal et Nicholas se rendirent au domicile de Matthew. Le jeune homme habitait dans une petite maison en banlieue dans un quartier peu sécurisé. Sur le porche, Cal jeta un regard à son fils inquiet puis frappa contre la porte. Du bruit s'opéra.
— Va voir qui c'est ! s'écria un homme à l'intérieur.
Une seconde plus tard, Matthew apparut à l'entrebâillement en découvrant les deux Lightman avec perplexité.
— Nick ? Qu'est-ce que tu fais ici ?
— Salut Matt', dit Nicholas. Mon père et moi on allait voir un match, on se demandait si ça te disait de venir avec nous?
— Heu… c'est sympa, mais en ce moment j'suis un peu occupé… Tu devrais proposer ça à Chris, répondit Matthew de manière évasive.
Cal observa le visage de Matthew et déclara :
— Tout va comme tu veux à l'intérieur ?
— Hum, oui ça va…, affirma le jeune homme, d'un léger hochement négatif de sa tête.
— J'ai bu un litre d'eau avant de venir ici, ça te dérange si j'utilise tes toilettes ? demanda Cal, en indiquant sa maison d'un geste de la main.
— Je… Je suis désolé, mais c'est pas…
Tout d'un coup, la porte s'ouvrit en grand et Cal fit face à un adulte particulièrement en colère.
— Qu'est-ce que tu fiches ?! beugla l'homme contre Matthew. Ça fait vingt minutes que j'attends mon repas !
— Je discutais papa, répondit Matt.
M. Turner focalisa son regard brumeux sur les nouveaux visiteur et réclama furibond :
— Qui êtes vous ?
— Cal Lightman, je suis le père de Nicholas. Votre fils et le miens sont amis. Et il s'inquiétait de ne pas le voir depuis plusieurs jours. Alors, on est venu voir ce qu'il se passait.
— Il se passe rien, alors j'vous conseil de partir, rétorqua Turner menaçant.
— Votre fils n'a pas l'air d'accord avec vous, objecta Cal.
— Quoi ?!
— J'ai dit que votre fils ne veut pas qu'on parte, répéta t-il plus fortement. Je vois de la peur sur son visage et de la colère aussi. Il est effrayé par vous, exposa t-il, en désignant Matthew.
Totalement déconnecté, par les dires de Cal, M. Turner beugla :
— Qu'est-ce que vous racontez ?!
Cal comprit que l'homme était bien trop soûl pour assimiler la moindre de ses paroles. Il jeta un regard par dessus son épaule afin de s'adresser directement à Matthew :
— Il te fait du mal, Matt ?
Matthew ne répondit pas, mais Cal capta une expression qui voulait dire oui.
— Je vois. Tu peux venir avec nous tu sais.
M. Turner fit barrage à l'expert en mensonge et s'exclama :
— Personne n'emmènera mon gosse !
N'étant nullement impressionné par l'adulte, Cal s'approcha de celui-ci et rétorqua entre ses dents :
— Sinon quoi ? Vous allez me cogner comme pour lui ?
Le père de Matt ne répondit pas, mais présenta une grande colère et serra ses poings.
— Vous tournez à quoi ? Whisky, scotch, bière ?
Turner ne répondit toujours pas.
— Ouais, un peu tout ça à la fois. La vie ne vous a pas donné ce que vous vouliez alors vous vous vengez sur votre gamin !
— Dégagez de chez moi, ou je vais chercher mon fusil et vous regretterez d'être venu.
Cal arbora un sourire mauvais et railla :
— Les types comme vous me font plus pitié qu'autre chose.
Matthew capta l'extrême de son père et sut que s'il n'agissait pas maintenant, il y aurait un bain de sang.
— Laisse papa, je m'en occupe.
Aux paroles de son fils, le père jeta un dernier regard haineux à Cal et rentra dans sa maison sans réclamer son reste.
— Matthew ! l'appela une voix féminine.
— J'arrive Abby ! scanda le jeune homme avant de se retourner vers les deux Lightman :
— Vous devriez partir.
— On va partir, mais je te promets qu'on va revenir, jura Cal, en le pointant avec son index.
Matthew ne répondit pas et ferma sa porte. Cal et Nicholas descendirent du porche pour retourner à leur voiture.
— Qu'est-ce qu'on fait ?
— On va le sortir de cet enfer, répondit Cal, d'un air déterminé.
Suite aux derniers éléments, Ria et Loker examinèrent les lieux de l'accident. Quelques débris étaient encore présents sur le sol. Torres leva son regard et indiqua :
— Il y a trois caméras. D'après les vidéos, le train a déraillé à cet endroit.
Loker sillonna les débris en suivant les railles. Un détail l'intrigua. Il s'accroupit au niveau du sol et découvrit des soudures fraiches.
— Ria, vient voir ça.
Torres rejoignit son collègue. Celle-ci regarda l'étrange réparation et demanda :
— Tu crois que cela a été fait avant ou après l'accident ?
— Je crois qu'on va devoir demander d'autres vidéos des caméras de surveillance, allégua Loker, en regardant l'une d'entre elles tournée dans leur direction.
De retour au Lightman Group, Cal avait demandé à son fils de le suivre dans son bureau. Il avait convié Gillian et Reynolds à venir le rejoindre et exposa sa rencontre avec M. Turner. Mains sur les hanches, l'agent du FBI demanda :
— Vous êtes sûr que ce type frappe son fils ?
Nonchalamment assis sur un fauteuil, Cal certifia :
— À 100% je connais ce genre de personne et croyez moi, Matthew vit un enfer.
— J'aurai dû le voir plus tôt, souffla Nicholas dépité, installé sur le canapé avec sa mère.
Attristée, Gillian posa une main réconfortante sur celle de son fils et souffla :
— Chéri… Ce n'est pas de ta faute.
— C'est l'un de mes meilleurs amis !
Cal comprit la culpabilité de Nicholas et l'apaisa :
— Nick, certaines personnes cachent des choses, par honte ou parce qu'ils pensent qu'ils peuvent gérer la situation, même aux personnes qui nous sont les plus proches.
— Et sa mère ? réclama Ben.
— Elle est morte lorsqu'il avait 8 ans…, répondit Nicholas. Il a une petite soeur de 10 ans… Abbigael. C'est lui qui s'en occupe. Matt ne m'a jamais parlé du problème de son père…
— Je crois que c'est pour ça qu'il n'est pas parti…, soupira Cal.
— Comment ça ?
— Il attend d'être majeur pour avoir la garde de sa soeur.
— Tout ce qu'on peut faire, c'est appeler les services sociaux, proposa Reynolds.
— Matthew ne se laissera pas faire, contra Cal. Il voudra protéger sa soeur et il pourrait s'enfuir avec elle.
— Qu'est-ce que vous proposez ?
— J'irai lui parler… Je sais comment il fonctionne.
Cal et Gillian s'échangèrent un regard entendu. Nicholas regarda son père de manière intriguée, mais ne s'opposa pas à son idée. Il lui faisait une totale confiance.
Dans la salle d'analyse, Ria et Eli visionnèrent les vidéos des caméras de surveillance quelques heures après l'accident et découvrirent quelque chose de stupéfiant. Sans tarder, ils retrouvèrent leur patron pour faire partager ce nouvel élément qui allait tout changer.
Le soir, Cal prit sa voiture et se gara devant une boite de nuit. Une musique électro pouvait s'entendre à trois kilomètres à la ronde. Il quitta son véhicule et entra dans le bâtiment. Des centaines de personnes dansaient sur la piste et buvaient sans modération. Les publicités du gouvernent ne devaient pas être entendues. Cal se fraya un chemin jusqu'au bar où il interpella un serveur.
— Matthew Turner ?! exigea t-il en criant presque pour se faire entendre de cette musique infernale. Où était passé le bon rock et le blues !
Le barman indiqua la porte de service. Cal se dirigea vers la direction pointée et sortit pour se retrouver à l'arrière du bâtiment. Sans surprise, il découvrit Matthew, adossé contre un mur, fumant une cigarette. Mains dans les poches, Cal s'approcha du jeune homme et déclara :
— T'es pas un peu jeune pour travailler ?
Matthew ravala une expression surprise à l'apparition de l'expert en mensonge et répliqua :
— La loi autorise à partir de 16.
— T'as commencé plus tôt, dit Cal.
— 'Faut bien se nourrir.
— Ton père ne travaille pas ?
— Y'a pas de taf'. La crise…, expliqua t-il, en expirant une bouffée de sa cigarette.
— Une boite de nuit. On est loin des livres et du terrain de basket.
— Ça paye mieux.
— Pas sur le long terme, rétorqua t-il, en se plaçant à ses côtés. Ton père doit être content. Tu peux lui ramener des bouteilles gratos et lui donner ton fric…
Cal releva une contradiction dans le langage corporelle de Matthew et dit :
— Oh, à moins que tu te gardes un peu d'argent de côté…
L'adolescent ne répondit pas, mais Cal avait deviné juste. Ce dernier se plaça devant lui et déclara, avec un extrême sérieux, presque menaçant :
— Tu crois que tu es grand et que tu peux gérer la situation, mais c'est faux. T'es qu'un gamin Matt. Tu as besoin d'aide. Si tu continues comme ça, tu vas très mal finir…
— Vous jouez les psy', mais vous savez pas d'quoi vous parlez.
Cal émit une petite moue de sa bouche et quémanda avec un geste de la main :
— Ton père préfère quoi ? Les marques de cigarettes, les poings, les coups de ceinture… Le mien c'était les trois à la fois lorsqu'il avait fini de boire ses deux bouteilles de whisky ! Aujourd'hui, rien que cette odeur me donne la nausée !
Comme preuve, Cal présenta son dos avec des cicatrices qui ne s'étaient pas effacées avec le temps.
— Est-ce qu'il t'es arrivé de ne plus pouvoir te relever tellement qu'il t'avait cogné ! De prier à un dieu que tu ne crois plus de te venir en aide ! De vouloir te réveiller de tes cauchemars pour aller le tuer de tes propres mains !
Le jeune homme continua de garder le silence. Cal comprit qu'il avait vécu la même chose que lui.
— Matt… Ce que tu vis est un cauchemar ! Et si tu veux te réveiller, il faut que tu partes !
— Vous n'avez pas déjà un fils dont vous pouvez vous occuper, maugréa Matt méprisant.
— Exact, et c'est lui qui m'a demandé de te venir en aide !
— J'en ai pas besoin, réfuta t-il, en écrasant sa cigarette pour retourner dans la boite de nuit. Cal arrêta le jeune homme et souleva son t-shirt pour voir les marques violacées sur son corps juvénile.
— Dis moi le contraire, le défia Cal.
Matt jeta un regard méprisant à l'expert en mensonge et se dégagea de son emprise pour retourner à son poste. L'expert en mensonge soupira et comprit qu'il allait devoir passer à l'étape supérieure.
Le lendemain, Cobbs attendait, bras croisés, qu'on vienne l'interroger dans le cube lumineux. Il tourna en rond comme un lion enfermé dans une cage jusqu'au moment où Cal décida de faire son entrée.
— Veuillez m'excuser… Y'avait plus de thé dans la salle de restauration, s'excusa t-il, avec un mug à la main.
— Ça fait trente minute que j'attends ! s'énerva Cobbs.
— C'est aussi ce que j'ai dit à mon employé lorsqu'il est parti aller m'en chercher au bar du coin ! Bref ! Alors, si on vous a fait venir c'était pour vous montrer un petit film !
— Quoi ?!
— On se tait et on regarde ! réclama Cal, en appuyant sur le bouton d'une télécommande pour activer une télé accrochée en l'air. Cobbs regarda la vidéo où on pouvait apercevoir un homme venir sur les lieux pour réparer les railles du train.
— Alors, comment avez-vous trouvé ce film ? Étonnant, n'est-ce pas ? Enfin… sauf pour vous apparement ! Je ne vois aucune surprise sur votre visage. Attendez…
Cal zooma sur l'écran où on pouvait parfaitement discerner le visage de Burgess.
— C'est votre cher ami Burgess qui, deux heures après l'accident, est arrivé sur les lieux du crime pour souder la partie endommagée des railles. Ce qui s'appelle dans le jargon des flics, un vice de procédure et dans le mien un salopard !
Cal contempla le visage de Cobbs.
— À ce que je vois, vous étiez aussi au courant pour ça… c'est même vous qui en avez eu l'idée… Hou le vilain garçon! Même pas capable de faire le sale boulot !
— Je ne sais pas ce que vous racontez. Je n'ai jamais dit à Burgess de faire ça !
— Vous mentez ! Silva nous a dit que vous aviez fait un marché avec Burgess et la compagnie. Pour éviter de baisser les salaires, vous avez décidé de faire un rabat sur la maintenance ! Ce que j'aimerai savoir, c'est si le grand patron est au courant de vos petites manigances…, quémanda Cal sournoisement, avec des gestes de ses mains.
Cobbs détourna le regard.
— Oh… non il ne l'est pas. Vous êtes dans de beau drap.
— Vous n'avez aucune preuve ! Silva ne m'aime pas parce que j'ai dû baisser son salaire et il est parti de son plein grès !
— Non, il ne vous aime pas parce que vous l'avez menacé et que vous êtes un meurtrier ! contra Cal, d'un doigt inquisiteur.
— Olson a conduit ce train !
Cal esquissa un rictus et demanda à faire entrer Olson. À son entrée, l'expert en mensonge présenta le conducteur de manière théâtrale :
— Voilà M. Olson ! Un employé exemplaire ! Maintenant, dites lui en face que c'est de sa faute si cet accident a eu lieu.
Cobbs ne prononça pas le moindre mot.
— Hein, fit Cal méprisant, plus facile à mettre des couteaux dans le dos… Elle est belle la hiérarchie… M. Olson, étiez-vous au courant qu'il y avait des défauts sur la ligne ?
— Non, personne ne m'en a fait par.
— Vous voyez ! Lui, il ne ment pas ! allégua Cal, en désignant Olson. Vous êtes prêt à envoyer un innocent en prison juste pour sauver votre peau !
— Je n'étais pas au courant ! Burgess a pris cette iniative de lui-même !
— Burgess a décidé de lui-même d'interférer sur une enquête policière ?
— Oui ! Il a surement dû vouloir cacher son travail imprécis !
— Ouais, ça peut être vrai ! lui accorda Cal, d'une petite moue pensive. Il bu une gorgée de son thé et proclama : Et si, on lui demandait ! Faites entrez M. Burgess je vous pris.
L'air contrarié, Burgess entra dans le cube avec Reynolds.
— J'ai l'impression d'être dans un cirque ! sourit Cal. Il dévisagea Burgess et dit : — Vous avez entendu ce que votre patron a dit sur vous ! Il rejette toute la responsabilité de l'accident sur vous ! Après Olson, il s'en prend à vous. Maintenant, il ne s'agit plus de savoir qui est le coupable, mais quelle est le degré de responsabilité dans cette affaire et qui va écoper le plus d'années en prison ! Vous êtes toujours prêt à protéger votre cher patron ?
— C'est lui qui m'a dit de faire ça ! ragea Burgess.
— C'est faux ! rétorqua Cobbs. Vous êtes allez seul, de votre plein grès !
— Vous m'avez dit de rectifier les railles pour ne pas que la police suspect quoique ce soit ! Les conducteurs étaient tous au courant, ils ralentissaient tous à ce passage ! Ils savaient qu'il pouvait y avoir un accident ! Olson n'était pas au courant !
— C'est pour ça que Silva avait pris sa retraite, souleva Cal. Il ne voulait plus jouer les pions dans votre organisation !
— Vous n'avez aucune preuve ! contra Cobbs.
— Moi, j'en ai ! répliqua Burgess. J'ai des documents qui prouve que Cobbs annulait toutes les commandes des nouvelles pièces et qu'il plaçait cet argent dans nos salaires !
Cal s'approcha de Cobbs, refoulant sa rage, analysa son visage et dit :
— Pas que… J'ai l'impression qu'une partie était placée dans votre petit compte d'épargne. Vous souhaitiez un petit pécule pour votre retraite ? Le Mexique ? Non… le Brasil ! Beau choix ! Mais tout ce que vous verrez ces prochaines années ce sont les quatre murs de votre cellule.
— On va tout vérifier et tout sera donné au procureur, déclara Reynolds.
— Embarqué moi ces deux criminels…
Un policier et Reynolds embarquèrent Cobbs et Burgess sous les yeux dégoutés de Cal.
OoO
Le soir même, Cal demanda à Reynolds de l'accompagner rendre une petite visite aux Turner. Dans la voiture de Cal, Reynolds, installé sur le siège passager, jeta un regard inquiet au domicile et demanda :
— Vous êtes sûr de vous ?
— Non, mais c'est le seul moyen...
Ils quittèrent le véhicule et s'approchèrent de la maison. Devant la porte d'entrée, ils entendirent des hurlements. Les deux hommes s'échangèrent un regard entendu lorsque Ben défonça la porte. Ils se précipitèrent vers les cris et entrèrent dans la cuisine où M. Turner avait pris à parti son fils pour le frapper de toutes ses forces.
— Sale petit fumier ! Arrête de mentir, j'sais que c'est toi qui m'a volé une bouteille !
Cal se rua sur M. Turner avant qu'il n'ai pu encore levé la main sur son fils et enchaina un combat au corps à corps. Il reçut un coin de poing sur son visage qui le lui rendit. Turner s'écroula au sol alors que Reynolds s'empressa de le menotter.
— Comment va le gamin ? demanda Reynolds.
Cal se précipita sur Matthew rétamé sur le sol. Ce dernier se redressa et essuya d'un revers de main du sang perlant de son nez.
— Ça va ?
— J'ai eu pire…, souffla Matthew.
— J'en doute pas, répondit Cal de manière saccadée.
— Matthew ? l'interpella apeurée une petite fille de 10 ans.
L'adolescent tourna son regard sur sa petite soeur et ouvrit implicitement ses bras pour qu'il puisse la consoler. La petite fille courut dans les bras de son frère qui la serra aussi fort qu'il pu. Cal regarda les deux enfants enlacés puis Reynolds embarquer M. Turner en garde à vue. Les choses calmées, il commanda à Matt de prendre des affaires pour l'emmener chez lui pour la soirée. Sur le chemin de la maison, Cal résuma les faits à Gillian qui avait préparé une chambre pour les deux enfants.
Cal entra dans le salon où Gillian les attendait avec Nicholas. À la vue de son mari en sang, elle s'empressa de venir à lui :
— Oh mon dieu chéri !
— J'vais bien, ne t'inquiète pas pour moi… Occupe toi plutôt de lui, dit-il, alors que Matthew fit son apparition. Gillian arbora une mine horrifiée à la vue du jeune homme blessé. Elle demanda à Louise de s'occuper d'Abby et convia Matthew à prendre place autour de la table de la salle à manger. Un instant plus tard, Seth ramena une trousse de secours pour sa mère qui allait s'improviser infirmière. Depuis le temps, elle pouvait même prétendre au titre de médecin, au vu des nombreuses fois où elle avait dû recoudre son mari.
— Vous avez tout ce qu'il faut, sourit Matthew à la vue de la trousse de secours plus que complète.
— 'Faut bien, vu la famille, plaisanta Nicholas.
Matt émit un soupir rieur. Gillian s'installa à ses côtés et soigna l'adolescent tuméfié. Après ça, Cal et Seth apportèrent une boisson chaude au jeune homme et prit place sur un siège pour aborder une sérieuse conversation.
— Ça fait longtemps que les violences ont commencé ? l'interrogea Gillian.
— Après la mort de ma mère…, répondit Matthew. Elle est morte dans un accident peu après la naissance d'Abby… Mon père ne l'a pas supporté. Il ne savait pas comment gérer la situation alors il a commencé… à boire… jusqu'à ce que cela devienne une habitude… Il m'a reproché ses malheurs… Au départ, c'était juste des coups occasionnels puis il est devenu de plus en plus imaginatif… J'ai toujours fait en sorte pour qu'il se venge sur moi et de protéger Abby…
— Pourquoi tu ne m'as rien dit Matt ? demanda Nicholas peiné par cette histoire.
— T'avais tes propres problèmes… Et j'ai toujours su me débrouiller tout seul…
— Tu ne l'es plus maintenant…, ajouta Gillian, d'une main rassurante sur celle de l'adolescent.
— On va t'aider, signala Nicholas, en jetant un regard à son père silencieux. N'est-ce pas papa ?
— Bien sûr.
Gillian mima un air compatissant et dit :
— Matt, il faut que tu comprennes que tu ne peux plus continuer comme ça. Tu ne peux pas subvenir aux besoins de ta petite soeur et en même temps te faire un avenir.
— Mon avenir, je suis un idiot à l'école !
— Ne dit pas ça, Matt..., souffla Gillian attristée.
— Tu as du retard à cause de tes problèmes à la maison, rectifia Cal. Non pas parce que tu penses que tu n'as pas les capacités à être au même niveau que les autres.
— Peu importe... J'aurai bientôt 18 ans et je me suis fait assez d'argent comme barman !
— Tu vas tenir 3 mois voir 6 au maximum et après ? quémanda Cal. Qu'est-ce que tu feras ? Imagine que ta soeur tombe malade ou que tu ne trouves plus de boulot ?
— Je… Je trouverai un moyen ! Je l'ai toujours fait ! Si vous appelez les services sociaux, je sais parfaitement ce qu'il va se passer, vous m'enverrez en foyer et vous me séparerez de ma soeur !
— Personne ne t'enlèvera ta sœur, je te le garanti…, certifia Cal.
— Matthew…, dit Gillian. Je connais une personne qui travaille pour les services sociaux. Elle fera tout pour que tu restes avec ta soeur et que tu te retrouves dans une famille d'accueil prête à vous garder tous les deux. Tu garderas le même environnement et tu pourras reprendre le chemin de l'école et obtenir ton diplôme… Pour ça, il faut que tu nous fasses confiance…
Tout d'un coup, Abby apparut avec Louise pour se réfugier dans les bras de son grand frère. Gillian sourit tendrement à ce tableau familial alors que Cal déclara d'un geste de la main pour l'adolescent :
— Il faut aussi que tu penses à l'avenir de ta soeur… Tu ne peux plus décider que pour toi maintenant…
Sa soeur dans les bras, Matt sembla réfléchir aux paroles de Cal jusqu'au moment où il acquiesça pour approuver ses dires.
Plus tard, Nicholas emmena son ami dans sa chambre alors que sa soeur dormit dans celle de Louise. Épuisé, Seth souhaita une bonne soirée à ses parents se retira dans sa chambre. Cal et Gillian s'isolèrent dans le salon. Installés sur le canapé, Gillian obligea son mari à faire soigner la plaie sur son front sous les yeux de Punk. Au moment où elle désinfecta celle-ci, Cal crispa sa mâchoire de douleur. Elle prit un pansement et le colla sur la blessure.
— Il faudra penser à racheter des pansements…, signala Gillian.
— Depuis le temps, ils pourraient nous faire une ristourne…
Elle lâcha un léger rire puis contempla pensivement le visage de son compagnon.
— Tu as bien su gérer la situation avec Matt…
— J'peux être un bon psy' quand je veux.
— J'en doute pas…
— C'est juste un gamin perdu. Il faut qu'il retrouve le droit chemin, après ça… tout ira mieux pour lui.
— Il faut des personnes pour le guider, ajouta t-elle, d'une main tendre sur sa joue.
Cal comprit que Gillian faisait allusion à sa propre enfance tumultueuse. Ils n'avaient pas besoin d'en parler pour savoir ce que l'autre pensait.
— Ouais…, souffla t-il, avec un léger sourire. Cal caressa le visage bienveillant de sa femme puis s'approcha d'elle pour l'embrasser tendrement.
Le jour suivant, Gillian avait contacté son amie qui travaillait pour les services sociaux. Un arrangement avait été trouvé. Matthew et sa soeur avaient été envoyés dans une famille d'accueille prête à les accueillir tous les deux dans le centre ville de Washington. Désormais, Matthew pouvait reprendre son cursus scolaire sans être effrayé par un lendemain incertain. En sachant qu'il était déjà passé par là, Nicholas lui promit de l'aider à rattraper son retard.
Dans le couloir du Lightman Group, Matthew était passé remercier Cal et Gillian de leur aide.
— Merci pour tout M. et Mme Lightman.
— Appelle moi Cal, répliqua l'expert en mensonge.
— Et moi Gillian !
— Très bien, sourit-il. Rien n'est encore gagné, mais sans vous, je crois que j'aurai mal fini…
— Concentre toi sur ce que tu as aujourd'hui, dit Cal. Tu vas t'en sortir, crois moi Matt.
— Et si jamais tu as le moindre problème, n'hésite pas à venir nous voir, ajouta Gillian.
Matthew acquiesça. Il remercia encore une fois le couple et s'éloigna pour en rejoindre un autre qui allait devenir sa nouvelle famille. Nicholas apparut aux côtés de ses parents et souffla en regardant son ami faire connaissance avec le couple :
— J'espère que ça va aller.
— Y'a pas de raison…, répondit Cal.
— Il mérite d'avoir une famille… comme la notre.
Le père de famille esquissa un sourire et passa un bras autour des épaules de son fils pour le faire avancer vers la sortie de l'entreprise.
— Une glace pour fêter ça ?
— Tu commences à t'engraisser papa ! Il faut que tu ralentisses sur les sucreries…
— Hey ! fit-il faussement vexé. Non mais tu l'entends ! D'où te viens cette impertinence !
— On se le demande, soupira Gillian, en levant ses yeux au ciel.
Nicholas ria ainsi que Cal qui pris sa femme par la taille pour l'embrasser.
FIN*