Cal était paisiblement installé dans son canapé à zapper sur divers programmes qui passaient à la télé. Au détour d'une émission cuisine, une jeune femme le dérangea dans son activité en l'interpellant pour la seconde fois avec autorité :
— Cal.
Bien trop absorbé par ce qui se passait au petit écran, l'expert en mensonge n'accorda toujours aucune attention à son interlocutrice. Cette dernière n'abandonna et répéta avec plus de ferveur :
— Cal !
Le concernée sursauta presque lorsqu'un cuisinier découpa la tête d'un poulet à l'aide d'un grand couteau aiguisé. Cal tourna enfin son regard sur sa femme et demanda :
— Qu'est-ce qui se passe chérie ?
— Tu me demandes ce qui se passe ?! répéta Gillian sur un ton réprobateur.
Oh-oh... Il connaissait parfaitement cette expression renfrognée et il savait qu'il allait passer un très mauvais quart d'heure. Qu'est-ce qu'il avait encore fait...
— Qu'est-ce que j'ai encore fait ? demanda t-il d'un ton las.
— Tu oses me poser la question ! s'injuria t-elle, les mains sur ses hanches.
— Heu oui puisque je ne sais pas... Autrement je ne te poserai pas la question, allégua t-il intelligemment.
— Ne joues pas au plus malin avec moi Cal !
— Je t'assure que si je savais ce que j'avais fait pour te contrarier ainsi, je ne m'amuserais pas à tourner autour du pot. Tel que je te connais tu me regarderais avec un air condescendant, suivit d'un soupir puis tu me priverais de…
— Soit ! le coupa t-elle. Si tu ne vois vraiment pas de quoi je veux te parler je vais t'aider dans ce cas !
— Heuu…
Un téléphone fixe à la main, Gillian demanda :
— Sais-tu ce que c'est que ça ?!
— Un téléphone…, répondit Cal, sans comprendre où la jeune femme voulait en venir.
— Bonne réponse ! Continuons !
— J'espère qu'à la fin du jeu des questions réponses, le prix qu'on peut gagner se passe dans la chambre parce que…
L'expert en mensonge ne termina pas sa phrase alors que son épouse lui jeta un violent regard noir. Ok... Ne fais pas d'humour Cal ce n'est pas le moment, pensa t-il d'une petite moue de sa bouche.
— Et je suppose que tu sais à quoi ça sert ?!
— Bah oui quand même, je ne suis pas stup...
— Je te déconseille de ne pas finir ta phrase tu pourrais le regretter !
Cal resta subitement muet et laissa la psychologue continuer dans sa lancée :
— Maman vient d'appeler à l'instant !
Tout d'un coup, Cal comprit immédiatement la raison de la colère de sa femme. Il écarquilla ses yeux de peur en imaginant la suite des événements.
— Tu as raison d'avoir peur Cal ! signifia sa compagne toujours sur un ton de reproche. Elle pointa le téléphone sur lui et ajouta : — Elle vient de me dire qu'elle allait passer aujourd'hui comme prévu pour le déjeuner ! Tu n'as rien à me dire sur ça ?
Cal passa son regard de droite à gauche et lâcha :
— Heuu nope !
— Cal ! J'étais même pas au courant ! s'offusqua t-elle. Elle vient de me dire qu'elle avait pourtant appelé la semaine dernière pour nous prévenir de sa visite ! Et il semblerait que c'était toi qui avait décroché le téléphone ! Tu peux m'expliquer ?!
D'une mine pensif, Cal plissa ses yeux comme pour chercher une réponse adéquat ou du moins un mensonge valable pour éviter les cris de sa femme. Gillian devina ses pensées et s'injuria :
— Comment as-tu pu oublier ?!
L'expert en mensonge se leva d'un seul bond pour minauder auprès de la psychologue furieuse :
— Excuse-moi mon amour… J'ai complètement oublié ! Après son coup de téléphone, j'ai eu un deuxième appel de Loker. Il me disait qu'on avait eu un problème informatique et qu'on avait perdu la moitié de nos recherches sur l'affaire du juge corrompu... Après cela, ça m'est complètement sorti de la tête…
— C'est ça ton excuse ?! Loker !
— Bah…
— Tu sais qu'il y a un carnet de note à côté du téléphone !
Il ne répondit pas.
— C'est bien ce que je pensais ! Et tu sais très bien qu'un oubli est toujours intentionnel ! Même si tu avais soit disant oublié de marquer sur le calepin que ma mère venait, au fond de toi tu ne voulais pas qu'elle vienne !
— Quoi ?! s'offusqua t-il d'une voix étrangement aiguë. Mais qu'est-ce que tu racontes Gill', j'aime bien ta mère ! C'est juste que j'ai oublié...
— Arrête Cal ! Ne t'enfonces pas plus ! Je sais très bien que tu ne l'apprécies pas !
— Et vice versa…, marmonna t-il pour lui-même.
Elle ne comprit pas un traitre mot prononcé par son compagnon et réclama :
— Qu'est-ce que tu as dit ?!
— Non rien…
— Mouais… Bon et bien, il ne te reste plus qu'à faire les courses !
— Quoi ?! Mais pourquoi ?!
— Mais parce que il n'y a plus rien dans le frigo, que l'heure du repas approche et que Monsieur "homme lumière" a oublié de me prévenir de l'arrivée de ma mère !
— Ok, ok…, la tempéra t-il. J'ai compris, je vais aller à la grande surface du coin…
— Et emmènes les enfants avec toi !
— Nooon chériiie ! Tout mais pas ça ! Tu sais comment ils sont dans les magasins !
— Oh que si ! Et crois-moi que ma vengeance n'est pas prêt de se finir!
Cal soupira alors que Gillian se retourna et s'écria :
— Les enfants ! Venez en bas, vous allez accompagner votre père au magasin !
À cette annonce, un vacarme assourdissant résonna dans l'escalier lorsqu'une minute à peine, deux enfants d'une dizaine d'années et un autre de 7 ans déboulèrent comme des tornades dans le salon.
— Génial ! s'exclama joyeusement Seth.
— On part quand ?! quémanda Louise impatiente, en sautillant sur place devant son père.
Le père soupira une nouvelle fois et lança un regard suppliant à sa femme. Cette dernière ne lui rendit pas grâce et croisa ses bras contre son corps.
— Vous partez maintenant ! certifia Gillian.
— Super ! proclamèrent les trois enfants.
Le père roula des yeux et c'est avec une lenteur non feinte qu'il se dirigea vers leur porte d'entrée. Il aida ensuite ses trois petits monstres à s'habiller pour sortir puis tenta avec difficulté d'attacher leurs ceintures de sécurité dans sa voiture. Dix minutes plus tard... Il réussit enfin la manoeuvre sous les gesticulations intempestives des diablotins. Il s'installa derrière le volant et démarra son véhicule
Durant le trajet, Nicholas, Louise et Seth ne cessèrent de se chamailler, au plus grand damne de leur père qui ne cessa de jouer les gendarmes en leur demandant de bien vouloir se calmer. Cela fonctionna quelque instant jusqu'à ce que Seth tire la langue à sa soeur. Un geste qui créa la troisième guerre mondial dans la voiture ! Cal soupira sa frustration en priant intérieurement pour que le feu rouge, devant lequel il avait dû s'arrêter, se transforme rapidement en vert.
Une fois arrivé à destination, Cal sentit comme un début de maux de tête se propager dans son crâne. Il se gara à une place de parking libre et tourna brusquement sa tête vers ses trois enfants en les pointant du doigt.
— Écoutez-moi bien tous les trois ! Si jamais vous vous chamaillez, si vous criez, si vous courez dans le magasin, je vous assure que vous passerez tous vos après-midis à ranger mon placard au bureau avec Loker ! Me suis-je bien fais comprendre ?!
Les trois enfants hochèrent avec rapidité leur tête. Satisfait, Cal quitta sa voiture pour que ses enfants en fassent de même et qu'il puisse la verrouiller à distance. Il récupéra un cadi et ordonna à ses enfants de tenir celui-ci pour éviter qu'ils puissent se disperser dans tout le magasin. Le père de famille poussa son chariot dans les rayons du magasin en suivant la liste des courses que sa compagne lui avait préalablement donné avant de partir.
— Poulet, carotte, pomme de terre…, relata t-il, en lisant les ingrédients inscrits sur le bout de papier.
— Papa ? l'interpella Louise.
— Hmm ?
— Pourquoi tu n'aimes pas grand-mère Elizabeth ?
Cal releva rapidement sa tête de sa liste pour rencontrer le regard intrigué de sa petite fille.
— Pourquoi est-ce que tu me demandes ça Lou' ?
— Bah à chaque fois qu'elle vient tu dis que tu préférais discuter avec Loker pendant une heure que de la voir pendant une journée !
Tout d'un coup, Cal se dirigea vers le rayon qui proposait différentes sucreries et s'exclama :
— Tient voilà un gâteau au chocolat noisettes, ça sera parfait pour le dessert !
— Digestion ! proclama fortement Seth.
— C'est pas digestion mais "digression" ! le corrigea sa soeur en soupirant. Seth a raison papa !
— Hmm…, fit le concerné qui n'écouta que d'une oreille ce que ses enfants lui disaient.
— Et tu sais...
Louise s'interrompit dans sa plaidoirie lorsqu'elle aperçut son père attraper le gâteau afin de le mettre dans le cadi déjà bien rempli. Elle pencha sa tête sur le côté et demanda à son père.
— Mais… grand-mère… elle n'est pas allergique aux noisettes normalement ?
— Hin quoi ? répliqua Cal, en faisant rouler le cadi dans un autre rayon.
— Mouais…, marmonna Louise suspicieuse.
Plus tard, l'expert en mensonge réussit enfin à réunir toutes les provisions indiquées sur la liste (ou pas!). Il guida sa petite famille jusqu'à une caisse pour payer ses achats, mais c'est avec une immense joie qu'il découvrit la longue file d'attente devant ses yeux. Ils allaient devoir prendre leur mal en patience. D'un air blasé, il lâcha un long soupir puis plaça sa tête dans le creux de sa main. Il rêvassa au match de foot qu'il avait regardé hier lorsque son regard se porta sur un couple juste devant eux qui semblait tenir une conversation houleuse.
— Qu'est-ce que tu racontes chérie ? Je ne la connais pas cette fille !
À la défense de son mari, la femme répliqua :
— Ah oui ?! Alors pourquoi sur ton portable j'ai vu des sms disant que vous aviez un rendez-vous demain ! Et c'est justement ce jour là qu'on devait aller au cinéma ensemble ! Alors qu'hier tu m'avais pourtant dit que tu devais annuler notre sortie car tu avais trop de boulot !
— Puisque je te dis que je ne la connais pas !
Devant le regard non convaincu de sa femme, l'homme présenta l'écran de son portable et se justifia :
— Regarde, elle m'appelle Henry dessus alors que mon prénom c'est Steven ! Cette personne a dû se tromper de numéro, voilà tout !
— Mmh, tu ne me mens pas ? demanda sa femme en plissant ses yeux de suspicion.
— Bien sûr que non ! se défendit l'homme d'une voix aiguë.
Écoutant toujours la conversation, Cal ne put s'empêcher d'esquisser un petit sourire en coin en avançant dans la file. Le pauvre homme était un piètre menteur. Louise tira la veste de son père pour attirer son attention.
— Papa ! Je croyais que quand notre voix changeait pour aller dans les aiguë, c'était qu'on mentait ! Non ?
Les yeux de Cal s'agrandirent de stupeurs. Il s'empressa de poser une main sur la bouche de sa fille pour l'empêcher de prononcer le moindre mot. Une précaution inutile puisque le couple s'était vivement retourné dans leur direction.
— Ne faites pas attention à ce qu'elle dit ! Vous savez les enfants…, allégua l'expert en mensonge, avec sa main posée sur la bouche de sa fille.
— Mais si c'est vrai ! C'est même toi qui nous l'a dit quand tu avais interrogé Eli sur la disparition du thé au Lightman Group ! renchérit Nicholas, en regardant son père fermer ses yeux à cette annonce. Furieuse, la femme gifla son mari en s'écriant :
— Ah j'y crois pas espèce de salop !
Sans réclamer son reste, elle s'éloigna d'un pas précipité de son futur ex-mari. Ce dernier abandonna ses courses et tenta de rattraper sa femme.
— Ma chérie ! Attends je peux tout t'expliquer !
— Papa ? Ça veut dire quoi salop ? quémanda Seth curieux.
Cal ouvrit sa bouche pour la refermer aussi sec, en remarquant les regards des autres clients braqués sur eux. Il afficha une grimace et déclara :
— Je t'expliquerai plus tard Seth, aidez-moi à mettre les courses sur le tapis roulant s'il te plait.
Le petit garçon soupira sa déception et s'exécuta sous les yeux méprisant de la caissière qui avait un léger rictus peint sur ses lèvres. Cal se dépêcha de payer ses achats afin de partir rapidement du centre commercial avec ses enfants. Ils retournèrent à leur voiture et chargèrent leurs emplettes dans le coffre. La tache effectuée, le père demanda à ses enfants de s'attacher à leur place pour qu'il puisse démarrer son véhicule.
De retour chez eux, Nicholas et Louise détachèrent leur ceinture et coururent comme des fusées à l'intérieur de leur maison. Les bras chargés de courses, Cal s'écria ironiquement :
— M'aidez surtout pas ! Ah ces gosses j'vous jure...
— Tu veux de l'aide peut-être ? proposa une voix féminine.
Le père de famille baissa ses sacs. C'est avec une grande joie qu'il découvrit sa fille, Emily toute sourire, ses bras tendus en avant.
— Bonjour ma chérie ! Oui je veux bien s'il te plait.
L'adolescente déchargea son père de deux sacs. Ils marchèrent ensemble en direction de la cuisine pour déposer leurs fardeaux sur la table de celle-ci.
— Merci ma puce, la remercia Cal en l'embrassant dans ses cheveux.
— Alors ça va toi ? Tu es arrivée quand ?
— Hmm il y'a une heure à peu près. J'ai pas mal de boulot en ce moment mais ça va ! Et toi ?
— Bof…
— Ne me dis pas que tu fais cette tête parce que grand-mère Elizabeth viens ?!
— Bah…
— Vous n'avez toujours pas enterré la hache de guerre ?!
— C'est elle qui a commencée !
— J'y crois pas…, s'exaspéra l'adolescente en levant ses yeux au ciel. Il n'y en avait pas un pour rattraper l'autre…
— Cal ! s'exclama sévèrement Gillian en pénétrant dans la cuisine. — Tu peux me dire pourquoi Seth m'a demandé ce que veux dire "salop" ?!
Cal afficha une petite grimace. Emily comprit que son père s'était encore fourré dans des ennuis et tapa sur son épaule pour lui souhaiter bonne chance. Elle s'éclipsa de la pièce pour laisser seul les deux adultes. Les poings serrés sur ses hanches, Gillian réitéra :
— Alors je t'écoute ?!
— Tu vas rire ! En fait…, bafouilla t-il avec un geste de sa main comme pour gagner du temps sur l'inévitable.
— Vas-y je n'attends que ça.
— Bah en fait Seth…
Il s'apprêta à continuer sa phrase lorsque par bonheur son portable se mit à sonner. Sauvé par le gong ! D'un petit geste de sa main, il s'excusa auprès de sa femme pour quitter la pièce et accepter l'appel.
— Ria ?... ...Non le dossier Johnson est sur le bureau de Gillian... ...Oui c'est ça...
Toujours au téléphone, Cal s'arrêta de parler lorsqu'il vit exaspérer Nicholas, Louise et Seth courant dans le salon en faisant un bruit infernal.
— Attendez deux minutes !
Il plaça sa main sur le micro de son portable et ordonna fortement :
— Hey les enfants ! Stop ! Allez dans votre chambre !
Cela n'eut aucun effet. Le vacarme s'était même amplifié au plus grand damne du père irrité. Ce dernier joua le tout pour le tout et s'écria:
— Le placard ! Loker ! Tous les après-midis !
Effrayés par cette menace, les trois enfants stoppèrent net leur course poursuite et montèrent en vitesse dans leur chambre. Dès lors, Cal retourna à sa conversation téléphonique.
— Hum Torres excusez-moi, mais je vais devoir vous laissez, j'ai encore pas mal de chose à faire là... ...Oui c'est ça à demain, enfin si je suis toujours en vie…
Il raccrocha et rangea son portable dans sa poche de jean. Il pinça mécaniquement l'arrête de son nez en sentant son mal de tête empirer au fil des secondes.
— Oh bon sang…, gémit-il en se dirigeant vers la cuisine. Il aperçut sa femme cuisiner avec les ingrédients qu'il avait acheté et demanda :
— Chérie, est-ce qu'on a de l'aspirine ?
— Oui, regarde dans la pharmacie de la salle de bain.
— Merci.
Cal commença à partir quand Gillian l'informa :
— Ah et maman ne va pas tarder à arriver, elle vient de m'envoyer un sms.
— J'crois que je vais en prendre deux finalement…, marmonna t-il pour lui-même.
— Qu'est-ce que tu as dit ?
— J'ai dit vivement qu'elle arrive !
— Mouais… Ah et Cal on finira notre petite conversation sur Seth tout à l'heure!
— Moui…
Quelques minutes plus tard, Cal avala ses deux médicaments et s'écroula lourdement sur le canapé du salon. Il n'eut même pas le temps d'attendre que les comprimés agissent qu'il entendit la sonnette de la porte d'entrée retentir. Cette simple annonce marqua le début de ses ennuis. Il renversa lourdement sa tête en arrière pour fermer ses yeux et soupirer son mécontentent. Emily traversa la pièce pour aller ouvrir la porte d'entrée et proclama pour son père tourmenté :
— Allez courage papa ! Juste quelques heures, ce n'est pas la mort !
— C'est quelques heures de trop…
La jeune fille ria puis disparut de son champs de vision. Cal ne bougea pas. Il fixa pensivement le plafond immaculé jusqu'au moment où Gillian l'interrompit dans ce moment de grâce avant la tempête :
— Cal !
— Hmm…
— Je veux que tu me promettes d'être gentil avec elle !
Cal se releva avec difficulté pour se positionner devant sa compagne.
— Je te promets d'être poli !
— Cal…
— C'est le maximum que je puisse faire chérie !
Gillian roula ses yeux d'exaspérations.
— Et dis toi que je voulais mettre des somnifères dans son verre ! C'est un ami qui m'a donné cette idée et pour lui cela a très bien fonctionné.
— Et tu vois comment il a fini !
— Ouais bah…
Une voix à l'entrée interrompit la joute verbale du couple. Cal reconnu immédiatement le timbre et marmonna :
— Oh non voilà la sorcière...
— Cal, tu as intérêt d'être gentil parce que crois moi que tout ce que tu aimais jusqu'à présent pourra très bien être mis en pause.
— Quoi ?! Mais c'est du chantage ! tenta t-il de protester. C'est elle qui n'arrête pas de…
Cal s'arrêta bien vite dans ses arguments lorsqu'une veille dame entra dans la pièce pour enlacer Gillian en s'exclamant :
— Ooh ma chérie !
— Maman !
Après cette bref embrassade, la mère se recula quelque peu de sa fille pour la contempler.
— Tu es sublime ma chérie, cette robe noire te va à ravir !
— Merci maman ! Tu sais, c'est Cal qui me l'a offerte !
— Quoiqu'elle fasse un peu enterrement, je te verrais plus avec quelque chose de coloré. M'enfin tout le monde ne peut pas avoir bon goût...
— En effet…, marmonna amèrement Cal en dévisageant l'accoutrement de la veille dame sans qu'elle ne s'en aperçoive. Elizabeth fit comme si elle n'avait rien entendu et ôta son manteau pour le donner à sa fille.
— Il commence à faire froid dehors !
— Tu trouves ? demanda Gillian, en se rendant dans le vestibule pour accrocher la veste au porte manteau. Dans le salon, Elisabeth employa un ton assez fort pour que sa fille puisse l'entendre :
— Oh oui ! Si Emily n'avait pas eu la bonté de venir m'ouvrir alors que j'étais dehors, je crois que j'aurais pu geler sur place !
Cal devina le sous-entendu de sa belle-mère et répliqua à voix basse :
— Bah c'est bien dommage…
Elisabeth tourna rapidement sa tête vers son gendre en lui lançant un violent regard noir. Gillian réapparut dans la pièce et discerna une ambiance électrique.
— Heu… tout va bien ?
— Oui ma chérie ! Pourquoi ça n'irait pas ! s'exclama la mère faussement joyeuse.
— Bah vous...
— Bon alors ce diner ! la coupa t-elle. Ça sent rudement bon dis moi !
Elisabeth se rendit vers la cuisine.
— Et bonjour c'est pour les chien…, siffla l'expert en mensonge.
Gillian fusilla son mari du regard et l'interrogea entre ses dents :
— Je peux savoir ce que tu lui as dit ?!
— Rien !
— Tu...
— Le diner à l'air succulent ma chérie, clama la grand-mère dans la cuisine. Je suppose que personne ne t'as aidé comme d'habitude !
— Et là tu ne dis rien ! se rembrunit Cal.
— Cal à fait les courses maman !
— Ton père aussi les faisait !
— Attends ! Elle vient de me comparer à ton père là !
— Cal…
Gillian s'apprêta à lui répondre quelque chose lorsque Nicholas, Louise et Seth déboulèrent comme des tornades dans le salon. De retour dans la pièce, Elizabeth enlacèrent les trois enfants qui s'exclamèrent en coeur :
— Grand-mère !
— Oh mes chéris !
— Ça fait au moins plaisir à quelqu'un…, rouspéta Cal entre ses dents.
Gillian le frappa légèrement sur son bras en réprimande.
— Hey !
— Bon le repas va bientôt être prêt, je propose qu'on prenne l'apéritif pour commencer ! proposa Gillian.
— Bonne idée, concéda Elizabeth
La petite famille se déplaça dans la salle à manger et s'installa autour de la table à leur place respective. Enfin sauf Cal... Puisqu'Elizabeth avait eu l'audace de lui piquer la sienne. Ce dernier avait même voulu contester ce choix mais Gillian lui en avait empêché en lui faisant les gros yeux pour lui signifier de ne rien tenter. Grommelant de mécontentement, Cal s'était assis sans un mot en face de la veille dame pendant que sa femme versa un peu de vin dans le verre des adultes et du soda dans celui des enfants. Elizabeth remercia sa fille et tourna son attention sur la jeune Emily. D'un ton enjoué, elle lui demanda :
— Alors Emily ! Raconte-moi un peu, tes études ça se passe bien ?
— Oui très bien ! On a pas mal de travail mais vu que cela me plaît, ça ne me dérange pas !
— Tu fais une option je crois ? Tu peux me rappeler ce que tu fais, tu sais j'oublie vite moi ! allégua t-elle sur un ton rieur.
— Aah la sénilité touche tellement de personne âgé de nos jours…, ajouta Cal, en ponctuant sa réplique d'une gorgée de son vin.
— J'étudie le journalisme en option ! répondit rapidement la jeune fille afin que la conversation ne s'envenime pas entre son père et la vielle dame.
— Oh, comme cela doit être intéressant ! Tu sais quand Gillian était jeune, elle avait toujours eu pour vocation de devenir un jour psychologue. J'ai vu très tôt qu'elle avait ce petit quelque en chose en elle qui lui permettait d'aider n'importe quelle personne. Mais maintenant ce talent est gâché car des obstacles dans sa vie qui on fait que…
Cal comprit le message à peine déguisé et serra son poing de rage sur la table. Gillian s'empressa de poser une main délicate sur la sienne.
— Maman, tu sais que j'aime mon travail. Je le trouve très passionnant !
— Je ne dis pas qu'il ne l'est pas, je dis juste que tu mérites un peu mieux que de regarder deux sourcils froncer par jours…
Le poing de Cal se serra encore plus fort. Il bouillonnait intérieurement de rage. Cette femme avait vraiment le don de le sortir de ses gongs en seulement quelques secondes. Gillian caressa tendrement sa main afin de calmer les nerfs de son compagnon. Par chance, Elizabeth changea d'elle même la conversation :
— Bon et sinon comment allez-vous les enfants ?
— Super ! répondit gaiement la petite fille. La maîtresse est très gentille à l'école et Nick, Seth et moi on s'est fait pleins d'amis ! Et le week-end dernier on est allé à l'anniversaire de notre meilleure amie qui s'appelle Rose !
-- Il y avait plein de gâteaux et de bonbons ! s'exclama joyeusement Seth.
— Et bien voilà une vie bien remplie ! Et toi Nicholas tout va bien de ton côté ?
— Yep !
À ce mot, la grand-mère fronça ses sourcils puis répliqua :
— Tu sais Nicholas, ce n'est pas très polie de dire le mot que tu viens de prononcer. Il vaut mieux que tu répondes "oui", surtout quand tu t'adresses à une grande personne.
— Mais papa lui il le fait tout le temps alors pourquoi moi je ne pourrai pas le faire ?
— Tu apprendras que parfois dans la vie, les adultes ne sont pas toujours de bons conseilles...
Cal crispa sa mâchoire à l'extrême. Il était prêt à lancer une réplique bien placée à cette mégère, mais c'est curieusement que son fils s'en chargea à sa place :
— Bah alors si les adultes ne donnent toujours pas de bons conseilles, comment je sais que les tiens sont bons ?
Suite à la question de son fils, Cal esquissa un énorme sourire triomphant en regardant la veille dame bafouiller des choses incompréhensibles.
— Heu… Je crois que le gratin est prêt, je reviens ! signifia précipitamment Gillian en se levant de sa chaise pour se diriger vers la cuisine.
Un instant plus tard, la maitresse de maison revint dans la salle à manger avec un plat entre ses mains qu'elle déposa délicatement au centre de la table. Elle découpa et servit des parts égales pour chaque membre de sa famille avant de reprendre sa place. Elizabeth dévora du regard le plat cuisiné par fille et complimenta :
— Ça m'a l'air vraiment succulent Gillian ! Tu te surpasses à chaque fois !
— Pour une fois, je suis d'accord avec ta mère ! approuva Cal, sans regarder la veille dame qui lui offrit un magnifique rictus de mépris en guise de réplique. Cette dernière ravala son dédain et demanda à sa fille :
— Et sinon, vous avez fait quoi dernièrement ?
— On n'a pas fait grand chose... Cal et moi on a beaucoup de travail en ce moment. Entre le boulot et les enfants, c'est assez difficile de trouver du temps libre pour faire des activités extérieurs.
— Surtout si personne ne t'aides en rentrant…, ajouta sa mère, non sans un regard en biais vers son gendre.
— Tu sais, Cal m'aide beaucoup à la maison !
— Il doit faire la vaisselle une fois sur deux dans la semaine, comme tous les hommes...
— Non, Cal s'occupe régulièrement de l'entretient de la maison et il cuisine aussi très bien ! argua Gillian, afin de prendre la défense de son mari bien que le deuxième argument était un pieux mensonge.
— Et si c'était le cas, pourquoi n'a t-il pas fait le repas d'aujourd'hui ?
— Parce que j'aurais été trop tenté d'y mettre des ingrédients indigestes ! riposta dédaigneusement le concerné, en avalant par la suite une bouchée de ses pomme de terre.
— Tu veux un peu de vin maman ? proposa Gillian afin d'éviter que sa mère ne puisse répliquer à son compagnon.
— Non un verre me suffit largement ! refusa Elizabeth. Je ne ressens pas de manque. Pas comme certain…
La belle-mère regarda son gendre se servir un autre verre d'alcool et maugréa : — Ça doit être de famille…
D'un geste de la main, Cal riposta de manière hypocrite :
— Si c'est de famille je vous propose donc de rapporter la bouteille ! Cadeau !
Gillian comprit que la discussion allait encore s'envenimer et s'empressa de congédier un instant les quatre enfants.
— Excusez-moi du peu mon cher, mais je crois qu'entre ma famille et la vôtre l'alcool n'est pas un problème.
— La seule différence avec la votre c'est que mon père a eu la courtoisie de nous abandonner au contraire de Gillian !
— Cal ! le sermonna sa compagne par ses propos déplacés.
— Quoi c'est vrai ?! Ton père n'est qu'un alcoolique qui ne pense qu'à boire son précieux Whisky ! Alors que tu m'avais inviter à Thanksgiving, chez tes parents, il n'avait pas arrêter de se souler et il avait même fini par vomir sur la dinde, si c'est pour dire ! Quoique je peux l'en remercier! Car elle n'avait pas l'air très cuite, pour ne pas dire immangeable !
— Au moins moi je fais l'effort de cuisiner pour mes invités ! Même si ceux-ci sont parfois désagréable, pour ne pas dire impolie !
— Moi impolie ?! s'étrangla t-il. Vous rigolez j'espère ! Je fais d'énormes efforts pour ne pas vous parler !
— La preuve que ça ne marche pas ! Votre mère a dû bien souffrir de vos bêtises d'adolescent, je la plains fortement !
À ces dernières paroles, Cal se leva subitement de sa chaise ejta rageusement sa serviette sur la table pour ensuite se diriger prestement dans la cuisine.
— Maman ! protesta Gillian avec un regard réprobateur.
— Quoi ?!
— Tu sais très bien que la mère de Cal est morte lorsqu'il était jeune ! Il a eu une enfance difficile ! Tu aurais pu éviter de lui dire ça ! s'injuria sa fille, en se levant elle aussi pour tenter de faire revenir son mari autour de la table.
— Excuse-moi, j'avais oublié... Je regrette ce que j'ai dit, je suis peut-être aller un peu trop loin.
— Ah bon tu crois ?!
— Mais avoues que c'est aussi lui qui a commencé !
— Qu'est-ce que vous pouvez m'épuiser tous les deux ! siffla Gillian, en allant rejoindre son mari dans la pièce adjacente. Elle entra de manière hésitante et retrouva celui-ci avec ses mains posées sur l'ilot central et la tête basse. Elle s'approcha et posa une main réconfortante sur son dos recourbé.
— Chéri… Tu sais qu'elle ne l'a pas fais exprès…
— Je sais...
— Elle regrette ce qu'elle t'a dit... Tu veux bien revenir ?
— Mmh…
Cal se retourna pour faire face à la femme qu'il aimait. Elle capta le regard un peu perdu de son conjoint et le pris dans ses bras pour lui souffler au creux de son oreille :
— Aller encore quelques heures... Tu veux bien faire un effort pour moi mon chéri ?
L'expert en mensonge se détacha lentement de la psychologue. Il ancra son regard dans le sien et affirma en posant une main tendre sur sa joue :
— Je suis prêt à faire n'importe quoi pour toi Gillian, même à combattre un dragon au péril de ma vie ! Ce que je fais déjà d'ailleurs…
— Arrêtes Cal ! ria t-elle, en offrant une légère tape sur son bras. Il se recula légèrement d'un pas et ria avec elle. La tension retombée, il déclara :
— Non plus sérieusement, je te promets de faire un effort si elle aussi en fait un.
— Merci Cal…
Elle l'embrassa tendrement en remerciement lorsqu'une tiers personne les interrompit dans leur échange par un raclement de gorge. Le couple s'arrêta net et se retourna face à l'intrus.
— Excusez-moi de vous déranger... mais vu qu'on avait fini de manger le plat, je pensais qu'on pouvait passer au dessert.
— Oui tu as raison maman, je vais l'apporter ! Va dans la salle à manger avec Cal, je vous rejoins tout de suite.
La veille dame acquiesça et quitta la pièce avec son gendre sur les talons. À mi-chemin, Elizabeth l'arrêta sur place et s'excusa avec sincérité :
— Veuillez m'excuser pour ce que je vous ai dit. Mes mots ont dépassé mes pensées...
— Je vous excuse.
— Bien, je vous en remercie, mais ce n'est pas pour autant que j'arrêterais de vous embêter !
Sans attendre sa réponse, la veille dame fit volte face à l'expert en mensonge afin de regagner à sa place. Ce dernier l'imita et railla à voix basse :
— C'est fou mais... ça ne m'étonne même pas !
Une fois les enfants revenus, Gillian revint quelques secondes plus tard avec un gâteau entre les mains qu'elle posa délicatement sur la table. Elle découpa des parts de gâteaux et s'exclama souriante :
— Il est magnifique ce gâteau au chocolat !
— Ce sont les enfants qui ont eu cette idée ! s'exclama bien vite Cal.
— Quoi ?! mais c'est pas vr…
Nicholas n'eut pas le temps de terminer sa phrase que son père s'empressa de répliquer : — Et sinon, vous nous avez pas raconté Elizabeth ! Rien de nouveau dans votre vie de retraité ?!
— Heu bah…, bafouilla la concernée, assez décontenancée par la question de son gendre puisque celui-ci n'avait jamais prétendu vouloir s'intéresser à sa vie.
— Vous m'en direz tant ! jasa t-il, en découpant une part de son gâteau pour ensuite l'avaler. Elizabeth jeta un regard interrogateur à l'homme en coupant elle aussi un morceau de son dessert. Elle s'apprêta à le goûter, mais s'arrêta dans son action lorsqu'Emily déclara avec enthousiasme :
— Mmmh il est vraiment délicieux ce gâteau ! Et je trouve que les noisettes à l'intérieur donne un meilleur goût !
À cette information, la grand-mère s'immobilisa avec sa cuillère en l'air et reposa lourdement celle-ci sur le rebord de son assiette. Cal goba une nouvelle bouchée de son dessert et demanda sur un ton faussement intéressé :
— Vous n'aimez pas le gâteau au chocolat belle-maman ? Pourtant vous avez tort, il est délicieux !
La veille dame regarda haineusement son gendre et répondit entre ses dents :
— Je suis allergique aux noisettes...
— Oh mince ! C'est vraiment pas de chance ! Ah lalala vous auriez dû faire plus attention les enfants !
— Mais c'est to…
Cal s'empressa de couper sa fille Louise et de proposer :
— Bon bah... Vous voulez peut-être autre chose ? Je crois qu'il nous reste des pan cakes d'hier dans le frigo ! Vous en voulez ?!
— Non je crois que ça ira... Et puis je n'ai plus faim de toute façon...
— Comme vous voulez !
Cal haussa ses épaules et goba le dernier morceau de son gâteau.
Gillian n'avait pas lâché du regard son compagnon qui avait affiché un étrange sourire lors de cette curieuse conversation. Elle le fixa avec suspicion et songea : Il n'aurait pas fait ça tout de même, il n'aurait pas osé… La mère sortit brusquement de ses songes lorsque ses deux enfants demandèrent à quitter la table. Elle accepta et ils s'éclipsèrent à l'étage laissant ainsi les adultes entre eux.
— Tu veux du thé maman ? demanda sa fille.
— Je préfère du café si cela ne te dérange pas, car bizarrement en ce moment, j'ai beaucoup de mal avec le thé…, répondit sa mère.
— Comme c'est étonnant…, marmonna Cal en se levant. Restes assise Gill'. Je vais faire du thé et... du café ! signifia t-il d'un geste de la main.
— Et bien pour une fois que vous montrez une qualité qui fait la réputation de l'anglais ! répliqua Elizabeth, en faisant référence au peu de courtoisie qu'il dégageait en sa présence.
— Vous n'avez pas de la famille en France vous ?
— Si, pourquoi ? répondit t-elle, sans voir où son gendre voulait en venir.
— Hmm je comprends mieux ce côté râleur maintenant…, dit-il pour ensuite disparaître dans la cuisine en laissant sa belle-mère la mâchoire crispée.
Quelques minutes plus tard, l'expert en mensonge revint avec les boissons chaudes qu'il donna à chacune des personnes présentent autour de la table.
— Vous avez oublié le sucre ! signala Elizabeth à Cal.
— Non, vous en avez un à côté de vous.
— Oui mais il y en a qu'un et moi j'en prends toujours deux avec mon café !
Cal soupira son exaspération, mais retourna dans la cuisine afin d'aller chercher le deuxième sucre.
— J'espère qu'elle s'étouffera avec son café ! vociféra t-il entre ses dents.
Il retourna auprès de sa belle-mère pour lui offrir le dit sucre avec un immense sourire forcé. Cette dernière le lui rendit et tous dégustèrent leur boisson chaude. À peine ses lèvres trempées dans le liquide noirâtre de son café, qu'Elizabeth en profita pour jaser avec une petite trace de dégoût :
— Hmm et bien j'espère que les anglais sont vraiment aussi fort qu'ils le disent pour faire du thé car pour le café ce n'est pas encore ça !
— J'aurai vraiment dû suivre son conseille et prendre des somnifères…, chuchota t-il derrière sa tasse de thé.
— Qu'avez vous dit ? quémanda Elizabeth curieuse.
— Non, j'ai simplement dit qu'on ne pouvait pas être fort partout !
— En effet, surtout en cuisine ! siffla t-elle pour son gendre.
— En parlant de ça, il est bien dommage que vous ayez irrité que du côté râleur de vôtre famille et non pas de sa gastronomie ! Vous auriez pu au moins faire des heureux ! rétorqua t-il avec un air de défit dans les yeux.
— Vous...!
— Bon ! Et si on parlait d'autre chose ! s'exclama soudainement Gillian.
— Oui bonne idée ! Oh on pourrait parler de mon futur voyage en Australie par exemple ! suggéra Emily pour détendre l'atmosphère qui devenait de plus en plus pesante à chaque minutes. C'est sur ce choix de conversation que les hostilités s'arrêtèrent bien que quelques piques furent encore jetées entre les deux adversaires.
Deux heures plus tard, Elizabeth informa de son départ à la famille et cru entendre un «enfin une bonne nouvelle» de la part de son gendre. Toute la petite famille se retrouva à l'extérieur devant le taxi qui devait ramener la veille dame. Cette dernière embrassa tous les membres de sa famille en guise d'au revoir sauf Cal qui avait eu la bonté de faire un petit signe de tête.
— Ce fut une journée sympathique, merci de m'avoir invité ma chérie ! Bien que si je n'avais pas appelé je ne serais pas venue, ajouta t-elle avec un regard en biais vers son gendre. Ce dernier s'empressa de marmonner :
— La prochaine fois je débrancherai le téléphone si ce n'est que ça…
Cette fois-ci ce ne fut pas assez bas pour que Elizabeth ne puisse pas entendre. Intentionnelle ? Je vous laisse y répondre de vous-même ! La belle-mère lui jeta un autre regard noir puis ouvrit la portière de la voiture pour ensuite proclamer :
— A bientôt !
— Mais pas trop vite non plus, riposta l'homme acerbe.
— Au revoir ! crièrent presque le reste de la famille pour couvrir les paroles de Cal.
Après ces "formules de politesses", le taxi disparut de leur champ de vision et l'expert en mensonge relâcha enfin toute l'air qu'il avait retenu depuis qu'Elizabeth était rentrée chez eux.
Gillian leva ses yeux au ciel puis l'interrogea sur un ton intéressée :
— Au fait Cal ! Le gâteau c'est vraiment les enfants qui l'ont choisi ou c'est toi ?! Parce que tu as souri tout le long en mangeant ta part !
Le regard de Cal passa de droite à gauche et marmonna :
— Je ne vois pas du tout de quoi tu veux parler…
— J'y crois pas, tu…
Elle n'eut pas le temps de finir sa phrase que Seth s'interposa dans la conversation des deux parents.
— Papa ! Tu peux me dire ce que ça veut dire "salop" maintenant ! s'exaspéra le petit dernier face à son père. Au regard furieux de sa femme, Cal ordonna rapidement :
— Heu… rentres à la maison Seth on verra ça plus tard !
— Mais c'est aussi ce que tu m'avais dit tout à l'heure ! bredouilla t-il agacé.
— Ne discutes pas Seth !
Le petit garçon émit une petite moue mécontente et rentra avec ses deux soeurs dans leur maison. Un silence se propagea entre les deux experts en mensonge lorsque Gillian demanda de but en blanc à son mari :
— C'est quoi cette histoire de "salop"?!
— Tu sais que tu es rayonnante aujourd'hui ma chérie ! Pas que tu ne l'es pas tous les jours mais…, minauda Cal avec des mouvements évasifs de ses mains.
— Cal ! s'énerva t-elle de sa piètre manière de faire des digressions.
— Oh ! Attends je crois qu'on m'appelle là ! clama t-il subitement en sortant son téléphone portable de sa poche. Il se dirigea vers la maison suivit de près par son épouse irritée. — C'est Loker ! Il a encore dû faire une idiotie le connaissant !
— Caaal je sais que tu mens ! Loker est malade! Il m'a dit qu'il ne serait pas là de toute la semaine ! s'écria la jeune femme derrière lui.
— Allo ? continua l'homme dans son délire en collant l'appareil contre son oreille.
— CAAAL !
FIN*
Morale de l'histoire : Même si vous n'aimez pas une personne soyez le plus gentil possible ! Ça énerve encore plus !
— Cal.
Bien trop absorbé par ce qui se passait au petit écran, l'expert en mensonge n'accorda toujours aucune attention à son interlocutrice. Cette dernière n'abandonna et répéta avec plus de ferveur :
— Cal !
Le concernée sursauta presque lorsqu'un cuisinier découpa la tête d'un poulet à l'aide d'un grand couteau aiguisé. Cal tourna enfin son regard sur sa femme et demanda :
— Qu'est-ce qui se passe chérie ?
— Tu me demandes ce qui se passe ?! répéta Gillian sur un ton réprobateur.
Oh-oh... Il connaissait parfaitement cette expression renfrognée et il savait qu'il allait passer un très mauvais quart d'heure. Qu'est-ce qu'il avait encore fait...
— Qu'est-ce que j'ai encore fait ? demanda t-il d'un ton las.
— Tu oses me poser la question ! s'injuria t-elle, les mains sur ses hanches.
— Heu oui puisque je ne sais pas... Autrement je ne te poserai pas la question, allégua t-il intelligemment.
— Ne joues pas au plus malin avec moi Cal !
— Je t'assure que si je savais ce que j'avais fait pour te contrarier ainsi, je ne m'amuserais pas à tourner autour du pot. Tel que je te connais tu me regarderais avec un air condescendant, suivit d'un soupir puis tu me priverais de…
— Soit ! le coupa t-elle. Si tu ne vois vraiment pas de quoi je veux te parler je vais t'aider dans ce cas !
— Heuu…
Un téléphone fixe à la main, Gillian demanda :
— Sais-tu ce que c'est que ça ?!
— Un téléphone…, répondit Cal, sans comprendre où la jeune femme voulait en venir.
— Bonne réponse ! Continuons !
— J'espère qu'à la fin du jeu des questions réponses, le prix qu'on peut gagner se passe dans la chambre parce que…
L'expert en mensonge ne termina pas sa phrase alors que son épouse lui jeta un violent regard noir. Ok... Ne fais pas d'humour Cal ce n'est pas le moment, pensa t-il d'une petite moue de sa bouche.
— Et je suppose que tu sais à quoi ça sert ?!
— Bah oui quand même, je ne suis pas stup...
— Je te déconseille de ne pas finir ta phrase tu pourrais le regretter !
Cal resta subitement muet et laissa la psychologue continuer dans sa lancée :
— Maman vient d'appeler à l'instant !
Tout d'un coup, Cal comprit immédiatement la raison de la colère de sa femme. Il écarquilla ses yeux de peur en imaginant la suite des événements.
— Tu as raison d'avoir peur Cal ! signifia sa compagne toujours sur un ton de reproche. Elle pointa le téléphone sur lui et ajouta : — Elle vient de me dire qu'elle allait passer aujourd'hui comme prévu pour le déjeuner ! Tu n'as rien à me dire sur ça ?
Cal passa son regard de droite à gauche et lâcha :
— Heuu nope !
— Cal ! J'étais même pas au courant ! s'offusqua t-elle. Elle vient de me dire qu'elle avait pourtant appelé la semaine dernière pour nous prévenir de sa visite ! Et il semblerait que c'était toi qui avait décroché le téléphone ! Tu peux m'expliquer ?!
D'une mine pensif, Cal plissa ses yeux comme pour chercher une réponse adéquat ou du moins un mensonge valable pour éviter les cris de sa femme. Gillian devina ses pensées et s'injuria :
— Comment as-tu pu oublier ?!
L'expert en mensonge se leva d'un seul bond pour minauder auprès de la psychologue furieuse :
— Excuse-moi mon amour… J'ai complètement oublié ! Après son coup de téléphone, j'ai eu un deuxième appel de Loker. Il me disait qu'on avait eu un problème informatique et qu'on avait perdu la moitié de nos recherches sur l'affaire du juge corrompu... Après cela, ça m'est complètement sorti de la tête…
— C'est ça ton excuse ?! Loker !
— Bah…
— Tu sais qu'il y a un carnet de note à côté du téléphone !
Il ne répondit pas.
— C'est bien ce que je pensais ! Et tu sais très bien qu'un oubli est toujours intentionnel ! Même si tu avais soit disant oublié de marquer sur le calepin que ma mère venait, au fond de toi tu ne voulais pas qu'elle vienne !
— Quoi ?! s'offusqua t-il d'une voix étrangement aiguë. Mais qu'est-ce que tu racontes Gill', j'aime bien ta mère ! C'est juste que j'ai oublié...
— Arrête Cal ! Ne t'enfonces pas plus ! Je sais très bien que tu ne l'apprécies pas !
— Et vice versa…, marmonna t-il pour lui-même.
Elle ne comprit pas un traitre mot prononcé par son compagnon et réclama :
— Qu'est-ce que tu as dit ?!
— Non rien…
— Mouais… Bon et bien, il ne te reste plus qu'à faire les courses !
— Quoi ?! Mais pourquoi ?!
— Mais parce que il n'y a plus rien dans le frigo, que l'heure du repas approche et que Monsieur "homme lumière" a oublié de me prévenir de l'arrivée de ma mère !
— Ok, ok…, la tempéra t-il. J'ai compris, je vais aller à la grande surface du coin…
— Et emmènes les enfants avec toi !
— Nooon chériiie ! Tout mais pas ça ! Tu sais comment ils sont dans les magasins !
— Oh que si ! Et crois-moi que ma vengeance n'est pas prêt de se finir!
Cal soupira alors que Gillian se retourna et s'écria :
— Les enfants ! Venez en bas, vous allez accompagner votre père au magasin !
À cette annonce, un vacarme assourdissant résonna dans l'escalier lorsqu'une minute à peine, deux enfants d'une dizaine d'années et un autre de 7 ans déboulèrent comme des tornades dans le salon.
— Génial ! s'exclama joyeusement Seth.
— On part quand ?! quémanda Louise impatiente, en sautillant sur place devant son père.
Le père soupira une nouvelle fois et lança un regard suppliant à sa femme. Cette dernière ne lui rendit pas grâce et croisa ses bras contre son corps.
— Vous partez maintenant ! certifia Gillian.
— Super ! proclamèrent les trois enfants.
Le père roula des yeux et c'est avec une lenteur non feinte qu'il se dirigea vers leur porte d'entrée. Il aida ensuite ses trois petits monstres à s'habiller pour sortir puis tenta avec difficulté d'attacher leurs ceintures de sécurité dans sa voiture. Dix minutes plus tard... Il réussit enfin la manoeuvre sous les gesticulations intempestives des diablotins. Il s'installa derrière le volant et démarra son véhicule
Durant le trajet, Nicholas, Louise et Seth ne cessèrent de se chamailler, au plus grand damne de leur père qui ne cessa de jouer les gendarmes en leur demandant de bien vouloir se calmer. Cela fonctionna quelque instant jusqu'à ce que Seth tire la langue à sa soeur. Un geste qui créa la troisième guerre mondial dans la voiture ! Cal soupira sa frustration en priant intérieurement pour que le feu rouge, devant lequel il avait dû s'arrêter, se transforme rapidement en vert.
Une fois arrivé à destination, Cal sentit comme un début de maux de tête se propager dans son crâne. Il se gara à une place de parking libre et tourna brusquement sa tête vers ses trois enfants en les pointant du doigt.
— Écoutez-moi bien tous les trois ! Si jamais vous vous chamaillez, si vous criez, si vous courez dans le magasin, je vous assure que vous passerez tous vos après-midis à ranger mon placard au bureau avec Loker ! Me suis-je bien fais comprendre ?!
Les trois enfants hochèrent avec rapidité leur tête. Satisfait, Cal quitta sa voiture pour que ses enfants en fassent de même et qu'il puisse la verrouiller à distance. Il récupéra un cadi et ordonna à ses enfants de tenir celui-ci pour éviter qu'ils puissent se disperser dans tout le magasin. Le père de famille poussa son chariot dans les rayons du magasin en suivant la liste des courses que sa compagne lui avait préalablement donné avant de partir.
— Poulet, carotte, pomme de terre…, relata t-il, en lisant les ingrédients inscrits sur le bout de papier.
— Papa ? l'interpella Louise.
— Hmm ?
— Pourquoi tu n'aimes pas grand-mère Elizabeth ?
Cal releva rapidement sa tête de sa liste pour rencontrer le regard intrigué de sa petite fille.
— Pourquoi est-ce que tu me demandes ça Lou' ?
— Bah à chaque fois qu'elle vient tu dis que tu préférais discuter avec Loker pendant une heure que de la voir pendant une journée !
Tout d'un coup, Cal se dirigea vers le rayon qui proposait différentes sucreries et s'exclama :
— Tient voilà un gâteau au chocolat noisettes, ça sera parfait pour le dessert !
— Digestion ! proclama fortement Seth.
— C'est pas digestion mais "digression" ! le corrigea sa soeur en soupirant. Seth a raison papa !
— Hmm…, fit le concerné qui n'écouta que d'une oreille ce que ses enfants lui disaient.
— Et tu sais...
Louise s'interrompit dans sa plaidoirie lorsqu'elle aperçut son père attraper le gâteau afin de le mettre dans le cadi déjà bien rempli. Elle pencha sa tête sur le côté et demanda à son père.
— Mais… grand-mère… elle n'est pas allergique aux noisettes normalement ?
— Hin quoi ? répliqua Cal, en faisant rouler le cadi dans un autre rayon.
— Mouais…, marmonna Louise suspicieuse.
Plus tard, l'expert en mensonge réussit enfin à réunir toutes les provisions indiquées sur la liste (ou pas!). Il guida sa petite famille jusqu'à une caisse pour payer ses achats, mais c'est avec une immense joie qu'il découvrit la longue file d'attente devant ses yeux. Ils allaient devoir prendre leur mal en patience. D'un air blasé, il lâcha un long soupir puis plaça sa tête dans le creux de sa main. Il rêvassa au match de foot qu'il avait regardé hier lorsque son regard se porta sur un couple juste devant eux qui semblait tenir une conversation houleuse.
— Qu'est-ce que tu racontes chérie ? Je ne la connais pas cette fille !
À la défense de son mari, la femme répliqua :
— Ah oui ?! Alors pourquoi sur ton portable j'ai vu des sms disant que vous aviez un rendez-vous demain ! Et c'est justement ce jour là qu'on devait aller au cinéma ensemble ! Alors qu'hier tu m'avais pourtant dit que tu devais annuler notre sortie car tu avais trop de boulot !
— Puisque je te dis que je ne la connais pas !
Devant le regard non convaincu de sa femme, l'homme présenta l'écran de son portable et se justifia :
— Regarde, elle m'appelle Henry dessus alors que mon prénom c'est Steven ! Cette personne a dû se tromper de numéro, voilà tout !
— Mmh, tu ne me mens pas ? demanda sa femme en plissant ses yeux de suspicion.
— Bien sûr que non ! se défendit l'homme d'une voix aiguë.
Écoutant toujours la conversation, Cal ne put s'empêcher d'esquisser un petit sourire en coin en avançant dans la file. Le pauvre homme était un piètre menteur. Louise tira la veste de son père pour attirer son attention.
— Papa ! Je croyais que quand notre voix changeait pour aller dans les aiguë, c'était qu'on mentait ! Non ?
Les yeux de Cal s'agrandirent de stupeurs. Il s'empressa de poser une main sur la bouche de sa fille pour l'empêcher de prononcer le moindre mot. Une précaution inutile puisque le couple s'était vivement retourné dans leur direction.
— Ne faites pas attention à ce qu'elle dit ! Vous savez les enfants…, allégua l'expert en mensonge, avec sa main posée sur la bouche de sa fille.
— Mais si c'est vrai ! C'est même toi qui nous l'a dit quand tu avais interrogé Eli sur la disparition du thé au Lightman Group ! renchérit Nicholas, en regardant son père fermer ses yeux à cette annonce. Furieuse, la femme gifla son mari en s'écriant :
— Ah j'y crois pas espèce de salop !
Sans réclamer son reste, elle s'éloigna d'un pas précipité de son futur ex-mari. Ce dernier abandonna ses courses et tenta de rattraper sa femme.
— Ma chérie ! Attends je peux tout t'expliquer !
— Papa ? Ça veut dire quoi salop ? quémanda Seth curieux.
Cal ouvrit sa bouche pour la refermer aussi sec, en remarquant les regards des autres clients braqués sur eux. Il afficha une grimace et déclara :
— Je t'expliquerai plus tard Seth, aidez-moi à mettre les courses sur le tapis roulant s'il te plait.
Le petit garçon soupira sa déception et s'exécuta sous les yeux méprisant de la caissière qui avait un léger rictus peint sur ses lèvres. Cal se dépêcha de payer ses achats afin de partir rapidement du centre commercial avec ses enfants. Ils retournèrent à leur voiture et chargèrent leurs emplettes dans le coffre. La tache effectuée, le père demanda à ses enfants de s'attacher à leur place pour qu'il puisse démarrer son véhicule.
De retour chez eux, Nicholas et Louise détachèrent leur ceinture et coururent comme des fusées à l'intérieur de leur maison. Les bras chargés de courses, Cal s'écria ironiquement :
— M'aidez surtout pas ! Ah ces gosses j'vous jure...
— Tu veux de l'aide peut-être ? proposa une voix féminine.
Le père de famille baissa ses sacs. C'est avec une grande joie qu'il découvrit sa fille, Emily toute sourire, ses bras tendus en avant.
— Bonjour ma chérie ! Oui je veux bien s'il te plait.
L'adolescente déchargea son père de deux sacs. Ils marchèrent ensemble en direction de la cuisine pour déposer leurs fardeaux sur la table de celle-ci.
— Merci ma puce, la remercia Cal en l'embrassant dans ses cheveux.
— Alors ça va toi ? Tu es arrivée quand ?
— Hmm il y'a une heure à peu près. J'ai pas mal de boulot en ce moment mais ça va ! Et toi ?
— Bof…
— Ne me dis pas que tu fais cette tête parce que grand-mère Elizabeth viens ?!
— Bah…
— Vous n'avez toujours pas enterré la hache de guerre ?!
— C'est elle qui a commencée !
— J'y crois pas…, s'exaspéra l'adolescente en levant ses yeux au ciel. Il n'y en avait pas un pour rattraper l'autre…
— Cal ! s'exclama sévèrement Gillian en pénétrant dans la cuisine. — Tu peux me dire pourquoi Seth m'a demandé ce que veux dire "salop" ?!
Cal afficha une petite grimace. Emily comprit que son père s'était encore fourré dans des ennuis et tapa sur son épaule pour lui souhaiter bonne chance. Elle s'éclipsa de la pièce pour laisser seul les deux adultes. Les poings serrés sur ses hanches, Gillian réitéra :
— Alors je t'écoute ?!
— Tu vas rire ! En fait…, bafouilla t-il avec un geste de sa main comme pour gagner du temps sur l'inévitable.
— Vas-y je n'attends que ça.
— Bah en fait Seth…
Il s'apprêta à continuer sa phrase lorsque par bonheur son portable se mit à sonner. Sauvé par le gong ! D'un petit geste de sa main, il s'excusa auprès de sa femme pour quitter la pièce et accepter l'appel.
— Ria ?... ...Non le dossier Johnson est sur le bureau de Gillian... ...Oui c'est ça...
Toujours au téléphone, Cal s'arrêta de parler lorsqu'il vit exaspérer Nicholas, Louise et Seth courant dans le salon en faisant un bruit infernal.
— Attendez deux minutes !
Il plaça sa main sur le micro de son portable et ordonna fortement :
— Hey les enfants ! Stop ! Allez dans votre chambre !
Cela n'eut aucun effet. Le vacarme s'était même amplifié au plus grand damne du père irrité. Ce dernier joua le tout pour le tout et s'écria:
— Le placard ! Loker ! Tous les après-midis !
Effrayés par cette menace, les trois enfants stoppèrent net leur course poursuite et montèrent en vitesse dans leur chambre. Dès lors, Cal retourna à sa conversation téléphonique.
— Hum Torres excusez-moi, mais je vais devoir vous laissez, j'ai encore pas mal de chose à faire là... ...Oui c'est ça à demain, enfin si je suis toujours en vie…
Il raccrocha et rangea son portable dans sa poche de jean. Il pinça mécaniquement l'arrête de son nez en sentant son mal de tête empirer au fil des secondes.
— Oh bon sang…, gémit-il en se dirigeant vers la cuisine. Il aperçut sa femme cuisiner avec les ingrédients qu'il avait acheté et demanda :
— Chérie, est-ce qu'on a de l'aspirine ?
— Oui, regarde dans la pharmacie de la salle de bain.
— Merci.
Cal commença à partir quand Gillian l'informa :
— Ah et maman ne va pas tarder à arriver, elle vient de m'envoyer un sms.
— J'crois que je vais en prendre deux finalement…, marmonna t-il pour lui-même.
— Qu'est-ce que tu as dit ?
— J'ai dit vivement qu'elle arrive !
— Mouais… Ah et Cal on finira notre petite conversation sur Seth tout à l'heure!
— Moui…
Quelques minutes plus tard, Cal avala ses deux médicaments et s'écroula lourdement sur le canapé du salon. Il n'eut même pas le temps d'attendre que les comprimés agissent qu'il entendit la sonnette de la porte d'entrée retentir. Cette simple annonce marqua le début de ses ennuis. Il renversa lourdement sa tête en arrière pour fermer ses yeux et soupirer son mécontentent. Emily traversa la pièce pour aller ouvrir la porte d'entrée et proclama pour son père tourmenté :
— Allez courage papa ! Juste quelques heures, ce n'est pas la mort !
— C'est quelques heures de trop…
La jeune fille ria puis disparut de son champs de vision. Cal ne bougea pas. Il fixa pensivement le plafond immaculé jusqu'au moment où Gillian l'interrompit dans ce moment de grâce avant la tempête :
— Cal !
— Hmm…
— Je veux que tu me promettes d'être gentil avec elle !
Cal se releva avec difficulté pour se positionner devant sa compagne.
— Je te promets d'être poli !
— Cal…
— C'est le maximum que je puisse faire chérie !
Gillian roula ses yeux d'exaspérations.
— Et dis toi que je voulais mettre des somnifères dans son verre ! C'est un ami qui m'a donné cette idée et pour lui cela a très bien fonctionné.
— Et tu vois comment il a fini !
— Ouais bah…
Une voix à l'entrée interrompit la joute verbale du couple. Cal reconnu immédiatement le timbre et marmonna :
— Oh non voilà la sorcière...
— Cal, tu as intérêt d'être gentil parce que crois moi que tout ce que tu aimais jusqu'à présent pourra très bien être mis en pause.
— Quoi ?! Mais c'est du chantage ! tenta t-il de protester. C'est elle qui n'arrête pas de…
Cal s'arrêta bien vite dans ses arguments lorsqu'une veille dame entra dans la pièce pour enlacer Gillian en s'exclamant :
— Ooh ma chérie !
— Maman !
Après cette bref embrassade, la mère se recula quelque peu de sa fille pour la contempler.
— Tu es sublime ma chérie, cette robe noire te va à ravir !
— Merci maman ! Tu sais, c'est Cal qui me l'a offerte !
— Quoiqu'elle fasse un peu enterrement, je te verrais plus avec quelque chose de coloré. M'enfin tout le monde ne peut pas avoir bon goût...
— En effet…, marmonna amèrement Cal en dévisageant l'accoutrement de la veille dame sans qu'elle ne s'en aperçoive. Elizabeth fit comme si elle n'avait rien entendu et ôta son manteau pour le donner à sa fille.
— Il commence à faire froid dehors !
— Tu trouves ? demanda Gillian, en se rendant dans le vestibule pour accrocher la veste au porte manteau. Dans le salon, Elisabeth employa un ton assez fort pour que sa fille puisse l'entendre :
— Oh oui ! Si Emily n'avait pas eu la bonté de venir m'ouvrir alors que j'étais dehors, je crois que j'aurais pu geler sur place !
Cal devina le sous-entendu de sa belle-mère et répliqua à voix basse :
— Bah c'est bien dommage…
Elisabeth tourna rapidement sa tête vers son gendre en lui lançant un violent regard noir. Gillian réapparut dans la pièce et discerna une ambiance électrique.
— Heu… tout va bien ?
— Oui ma chérie ! Pourquoi ça n'irait pas ! s'exclama la mère faussement joyeuse.
— Bah vous...
— Bon alors ce diner ! la coupa t-elle. Ça sent rudement bon dis moi !
Elisabeth se rendit vers la cuisine.
— Et bonjour c'est pour les chien…, siffla l'expert en mensonge.
Gillian fusilla son mari du regard et l'interrogea entre ses dents :
— Je peux savoir ce que tu lui as dit ?!
— Rien !
— Tu...
— Le diner à l'air succulent ma chérie, clama la grand-mère dans la cuisine. Je suppose que personne ne t'as aidé comme d'habitude !
— Et là tu ne dis rien ! se rembrunit Cal.
— Cal à fait les courses maman !
— Ton père aussi les faisait !
— Attends ! Elle vient de me comparer à ton père là !
— Cal…
Gillian s'apprêta à lui répondre quelque chose lorsque Nicholas, Louise et Seth déboulèrent comme des tornades dans le salon. De retour dans la pièce, Elizabeth enlacèrent les trois enfants qui s'exclamèrent en coeur :
— Grand-mère !
— Oh mes chéris !
— Ça fait au moins plaisir à quelqu'un…, rouspéta Cal entre ses dents.
Gillian le frappa légèrement sur son bras en réprimande.
— Hey !
— Bon le repas va bientôt être prêt, je propose qu'on prenne l'apéritif pour commencer ! proposa Gillian.
— Bonne idée, concéda Elizabeth
La petite famille se déplaça dans la salle à manger et s'installa autour de la table à leur place respective. Enfin sauf Cal... Puisqu'Elizabeth avait eu l'audace de lui piquer la sienne. Ce dernier avait même voulu contester ce choix mais Gillian lui en avait empêché en lui faisant les gros yeux pour lui signifier de ne rien tenter. Grommelant de mécontentement, Cal s'était assis sans un mot en face de la veille dame pendant que sa femme versa un peu de vin dans le verre des adultes et du soda dans celui des enfants. Elizabeth remercia sa fille et tourna son attention sur la jeune Emily. D'un ton enjoué, elle lui demanda :
— Alors Emily ! Raconte-moi un peu, tes études ça se passe bien ?
— Oui très bien ! On a pas mal de travail mais vu que cela me plaît, ça ne me dérange pas !
— Tu fais une option je crois ? Tu peux me rappeler ce que tu fais, tu sais j'oublie vite moi ! allégua t-elle sur un ton rieur.
— Aah la sénilité touche tellement de personne âgé de nos jours…, ajouta Cal, en ponctuant sa réplique d'une gorgée de son vin.
— J'étudie le journalisme en option ! répondit rapidement la jeune fille afin que la conversation ne s'envenime pas entre son père et la vielle dame.
— Oh, comme cela doit être intéressant ! Tu sais quand Gillian était jeune, elle avait toujours eu pour vocation de devenir un jour psychologue. J'ai vu très tôt qu'elle avait ce petit quelque en chose en elle qui lui permettait d'aider n'importe quelle personne. Mais maintenant ce talent est gâché car des obstacles dans sa vie qui on fait que…
Cal comprit le message à peine déguisé et serra son poing de rage sur la table. Gillian s'empressa de poser une main délicate sur la sienne.
— Maman, tu sais que j'aime mon travail. Je le trouve très passionnant !
— Je ne dis pas qu'il ne l'est pas, je dis juste que tu mérites un peu mieux que de regarder deux sourcils froncer par jours…
Le poing de Cal se serra encore plus fort. Il bouillonnait intérieurement de rage. Cette femme avait vraiment le don de le sortir de ses gongs en seulement quelques secondes. Gillian caressa tendrement sa main afin de calmer les nerfs de son compagnon. Par chance, Elizabeth changea d'elle même la conversation :
— Bon et sinon comment allez-vous les enfants ?
— Super ! répondit gaiement la petite fille. La maîtresse est très gentille à l'école et Nick, Seth et moi on s'est fait pleins d'amis ! Et le week-end dernier on est allé à l'anniversaire de notre meilleure amie qui s'appelle Rose !
-- Il y avait plein de gâteaux et de bonbons ! s'exclama joyeusement Seth.
— Et bien voilà une vie bien remplie ! Et toi Nicholas tout va bien de ton côté ?
— Yep !
À ce mot, la grand-mère fronça ses sourcils puis répliqua :
— Tu sais Nicholas, ce n'est pas très polie de dire le mot que tu viens de prononcer. Il vaut mieux que tu répondes "oui", surtout quand tu t'adresses à une grande personne.
— Mais papa lui il le fait tout le temps alors pourquoi moi je ne pourrai pas le faire ?
— Tu apprendras que parfois dans la vie, les adultes ne sont pas toujours de bons conseilles...
Cal crispa sa mâchoire à l'extrême. Il était prêt à lancer une réplique bien placée à cette mégère, mais c'est curieusement que son fils s'en chargea à sa place :
— Bah alors si les adultes ne donnent toujours pas de bons conseilles, comment je sais que les tiens sont bons ?
Suite à la question de son fils, Cal esquissa un énorme sourire triomphant en regardant la veille dame bafouiller des choses incompréhensibles.
— Heu… Je crois que le gratin est prêt, je reviens ! signifia précipitamment Gillian en se levant de sa chaise pour se diriger vers la cuisine.
Un instant plus tard, la maitresse de maison revint dans la salle à manger avec un plat entre ses mains qu'elle déposa délicatement au centre de la table. Elle découpa et servit des parts égales pour chaque membre de sa famille avant de reprendre sa place. Elizabeth dévora du regard le plat cuisiné par fille et complimenta :
— Ça m'a l'air vraiment succulent Gillian ! Tu te surpasses à chaque fois !
— Pour une fois, je suis d'accord avec ta mère ! approuva Cal, sans regarder la veille dame qui lui offrit un magnifique rictus de mépris en guise de réplique. Cette dernière ravala son dédain et demanda à sa fille :
— Et sinon, vous avez fait quoi dernièrement ?
— On n'a pas fait grand chose... Cal et moi on a beaucoup de travail en ce moment. Entre le boulot et les enfants, c'est assez difficile de trouver du temps libre pour faire des activités extérieurs.
— Surtout si personne ne t'aides en rentrant…, ajouta sa mère, non sans un regard en biais vers son gendre.
— Tu sais, Cal m'aide beaucoup à la maison !
— Il doit faire la vaisselle une fois sur deux dans la semaine, comme tous les hommes...
— Non, Cal s'occupe régulièrement de l'entretient de la maison et il cuisine aussi très bien ! argua Gillian, afin de prendre la défense de son mari bien que le deuxième argument était un pieux mensonge.
— Et si c'était le cas, pourquoi n'a t-il pas fait le repas d'aujourd'hui ?
— Parce que j'aurais été trop tenté d'y mettre des ingrédients indigestes ! riposta dédaigneusement le concerné, en avalant par la suite une bouchée de ses pomme de terre.
— Tu veux un peu de vin maman ? proposa Gillian afin d'éviter que sa mère ne puisse répliquer à son compagnon.
— Non un verre me suffit largement ! refusa Elizabeth. Je ne ressens pas de manque. Pas comme certain…
La belle-mère regarda son gendre se servir un autre verre d'alcool et maugréa : — Ça doit être de famille…
D'un geste de la main, Cal riposta de manière hypocrite :
— Si c'est de famille je vous propose donc de rapporter la bouteille ! Cadeau !
Gillian comprit que la discussion allait encore s'envenimer et s'empressa de congédier un instant les quatre enfants.
— Excusez-moi du peu mon cher, mais je crois qu'entre ma famille et la vôtre l'alcool n'est pas un problème.
— La seule différence avec la votre c'est que mon père a eu la courtoisie de nous abandonner au contraire de Gillian !
— Cal ! le sermonna sa compagne par ses propos déplacés.
— Quoi c'est vrai ?! Ton père n'est qu'un alcoolique qui ne pense qu'à boire son précieux Whisky ! Alors que tu m'avais inviter à Thanksgiving, chez tes parents, il n'avait pas arrêter de se souler et il avait même fini par vomir sur la dinde, si c'est pour dire ! Quoique je peux l'en remercier! Car elle n'avait pas l'air très cuite, pour ne pas dire immangeable !
— Au moins moi je fais l'effort de cuisiner pour mes invités ! Même si ceux-ci sont parfois désagréable, pour ne pas dire impolie !
— Moi impolie ?! s'étrangla t-il. Vous rigolez j'espère ! Je fais d'énormes efforts pour ne pas vous parler !
— La preuve que ça ne marche pas ! Votre mère a dû bien souffrir de vos bêtises d'adolescent, je la plains fortement !
À ces dernières paroles, Cal se leva subitement de sa chaise ejta rageusement sa serviette sur la table pour ensuite se diriger prestement dans la cuisine.
— Maman ! protesta Gillian avec un regard réprobateur.
— Quoi ?!
— Tu sais très bien que la mère de Cal est morte lorsqu'il était jeune ! Il a eu une enfance difficile ! Tu aurais pu éviter de lui dire ça ! s'injuria sa fille, en se levant elle aussi pour tenter de faire revenir son mari autour de la table.
— Excuse-moi, j'avais oublié... Je regrette ce que j'ai dit, je suis peut-être aller un peu trop loin.
— Ah bon tu crois ?!
— Mais avoues que c'est aussi lui qui a commencé !
— Qu'est-ce que vous pouvez m'épuiser tous les deux ! siffla Gillian, en allant rejoindre son mari dans la pièce adjacente. Elle entra de manière hésitante et retrouva celui-ci avec ses mains posées sur l'ilot central et la tête basse. Elle s'approcha et posa une main réconfortante sur son dos recourbé.
— Chéri… Tu sais qu'elle ne l'a pas fais exprès…
— Je sais...
— Elle regrette ce qu'elle t'a dit... Tu veux bien revenir ?
— Mmh…
Cal se retourna pour faire face à la femme qu'il aimait. Elle capta le regard un peu perdu de son conjoint et le pris dans ses bras pour lui souffler au creux de son oreille :
— Aller encore quelques heures... Tu veux bien faire un effort pour moi mon chéri ?
L'expert en mensonge se détacha lentement de la psychologue. Il ancra son regard dans le sien et affirma en posant une main tendre sur sa joue :
— Je suis prêt à faire n'importe quoi pour toi Gillian, même à combattre un dragon au péril de ma vie ! Ce que je fais déjà d'ailleurs…
— Arrêtes Cal ! ria t-elle, en offrant une légère tape sur son bras. Il se recula légèrement d'un pas et ria avec elle. La tension retombée, il déclara :
— Non plus sérieusement, je te promets de faire un effort si elle aussi en fait un.
— Merci Cal…
Elle l'embrassa tendrement en remerciement lorsqu'une tiers personne les interrompit dans leur échange par un raclement de gorge. Le couple s'arrêta net et se retourna face à l'intrus.
— Excusez-moi de vous déranger... mais vu qu'on avait fini de manger le plat, je pensais qu'on pouvait passer au dessert.
— Oui tu as raison maman, je vais l'apporter ! Va dans la salle à manger avec Cal, je vous rejoins tout de suite.
La veille dame acquiesça et quitta la pièce avec son gendre sur les talons. À mi-chemin, Elizabeth l'arrêta sur place et s'excusa avec sincérité :
— Veuillez m'excuser pour ce que je vous ai dit. Mes mots ont dépassé mes pensées...
— Je vous excuse.
— Bien, je vous en remercie, mais ce n'est pas pour autant que j'arrêterais de vous embêter !
Sans attendre sa réponse, la veille dame fit volte face à l'expert en mensonge afin de regagner à sa place. Ce dernier l'imita et railla à voix basse :
— C'est fou mais... ça ne m'étonne même pas !
Une fois les enfants revenus, Gillian revint quelques secondes plus tard avec un gâteau entre les mains qu'elle posa délicatement sur la table. Elle découpa des parts de gâteaux et s'exclama souriante :
— Il est magnifique ce gâteau au chocolat !
— Ce sont les enfants qui ont eu cette idée ! s'exclama bien vite Cal.
— Quoi ?! mais c'est pas vr…
Nicholas n'eut pas le temps de terminer sa phrase que son père s'empressa de répliquer : — Et sinon, vous nous avez pas raconté Elizabeth ! Rien de nouveau dans votre vie de retraité ?!
— Heu bah…, bafouilla la concernée, assez décontenancée par la question de son gendre puisque celui-ci n'avait jamais prétendu vouloir s'intéresser à sa vie.
— Vous m'en direz tant ! jasa t-il, en découpant une part de son gâteau pour ensuite l'avaler. Elizabeth jeta un regard interrogateur à l'homme en coupant elle aussi un morceau de son dessert. Elle s'apprêta à le goûter, mais s'arrêta dans son action lorsqu'Emily déclara avec enthousiasme :
— Mmmh il est vraiment délicieux ce gâteau ! Et je trouve que les noisettes à l'intérieur donne un meilleur goût !
À cette information, la grand-mère s'immobilisa avec sa cuillère en l'air et reposa lourdement celle-ci sur le rebord de son assiette. Cal goba une nouvelle bouchée de son dessert et demanda sur un ton faussement intéressé :
— Vous n'aimez pas le gâteau au chocolat belle-maman ? Pourtant vous avez tort, il est délicieux !
La veille dame regarda haineusement son gendre et répondit entre ses dents :
— Je suis allergique aux noisettes...
— Oh mince ! C'est vraiment pas de chance ! Ah lalala vous auriez dû faire plus attention les enfants !
— Mais c'est to…
Cal s'empressa de couper sa fille Louise et de proposer :
— Bon bah... Vous voulez peut-être autre chose ? Je crois qu'il nous reste des pan cakes d'hier dans le frigo ! Vous en voulez ?!
— Non je crois que ça ira... Et puis je n'ai plus faim de toute façon...
— Comme vous voulez !
Cal haussa ses épaules et goba le dernier morceau de son gâteau.
Gillian n'avait pas lâché du regard son compagnon qui avait affiché un étrange sourire lors de cette curieuse conversation. Elle le fixa avec suspicion et songea : Il n'aurait pas fait ça tout de même, il n'aurait pas osé… La mère sortit brusquement de ses songes lorsque ses deux enfants demandèrent à quitter la table. Elle accepta et ils s'éclipsèrent à l'étage laissant ainsi les adultes entre eux.
— Tu veux du thé maman ? demanda sa fille.
— Je préfère du café si cela ne te dérange pas, car bizarrement en ce moment, j'ai beaucoup de mal avec le thé…, répondit sa mère.
— Comme c'est étonnant…, marmonna Cal en se levant. Restes assise Gill'. Je vais faire du thé et... du café ! signifia t-il d'un geste de la main.
— Et bien pour une fois que vous montrez une qualité qui fait la réputation de l'anglais ! répliqua Elizabeth, en faisant référence au peu de courtoisie qu'il dégageait en sa présence.
— Vous n'avez pas de la famille en France vous ?
— Si, pourquoi ? répondit t-elle, sans voir où son gendre voulait en venir.
— Hmm je comprends mieux ce côté râleur maintenant…, dit-il pour ensuite disparaître dans la cuisine en laissant sa belle-mère la mâchoire crispée.
Quelques minutes plus tard, l'expert en mensonge revint avec les boissons chaudes qu'il donna à chacune des personnes présentent autour de la table.
— Vous avez oublié le sucre ! signala Elizabeth à Cal.
— Non, vous en avez un à côté de vous.
— Oui mais il y en a qu'un et moi j'en prends toujours deux avec mon café !
Cal soupira son exaspération, mais retourna dans la cuisine afin d'aller chercher le deuxième sucre.
— J'espère qu'elle s'étouffera avec son café ! vociféra t-il entre ses dents.
Il retourna auprès de sa belle-mère pour lui offrir le dit sucre avec un immense sourire forcé. Cette dernière le lui rendit et tous dégustèrent leur boisson chaude. À peine ses lèvres trempées dans le liquide noirâtre de son café, qu'Elizabeth en profita pour jaser avec une petite trace de dégoût :
— Hmm et bien j'espère que les anglais sont vraiment aussi fort qu'ils le disent pour faire du thé car pour le café ce n'est pas encore ça !
— J'aurai vraiment dû suivre son conseille et prendre des somnifères…, chuchota t-il derrière sa tasse de thé.
— Qu'avez vous dit ? quémanda Elizabeth curieuse.
— Non, j'ai simplement dit qu'on ne pouvait pas être fort partout !
— En effet, surtout en cuisine ! siffla t-elle pour son gendre.
— En parlant de ça, il est bien dommage que vous ayez irrité que du côté râleur de vôtre famille et non pas de sa gastronomie ! Vous auriez pu au moins faire des heureux ! rétorqua t-il avec un air de défit dans les yeux.
— Vous...!
— Bon ! Et si on parlait d'autre chose ! s'exclama soudainement Gillian.
— Oui bonne idée ! Oh on pourrait parler de mon futur voyage en Australie par exemple ! suggéra Emily pour détendre l'atmosphère qui devenait de plus en plus pesante à chaque minutes. C'est sur ce choix de conversation que les hostilités s'arrêtèrent bien que quelques piques furent encore jetées entre les deux adversaires.
Deux heures plus tard, Elizabeth informa de son départ à la famille et cru entendre un «enfin une bonne nouvelle» de la part de son gendre. Toute la petite famille se retrouva à l'extérieur devant le taxi qui devait ramener la veille dame. Cette dernière embrassa tous les membres de sa famille en guise d'au revoir sauf Cal qui avait eu la bonté de faire un petit signe de tête.
— Ce fut une journée sympathique, merci de m'avoir invité ma chérie ! Bien que si je n'avais pas appelé je ne serais pas venue, ajouta t-elle avec un regard en biais vers son gendre. Ce dernier s'empressa de marmonner :
— La prochaine fois je débrancherai le téléphone si ce n'est que ça…
Cette fois-ci ce ne fut pas assez bas pour que Elizabeth ne puisse pas entendre. Intentionnelle ? Je vous laisse y répondre de vous-même ! La belle-mère lui jeta un autre regard noir puis ouvrit la portière de la voiture pour ensuite proclamer :
— A bientôt !
— Mais pas trop vite non plus, riposta l'homme acerbe.
— Au revoir ! crièrent presque le reste de la famille pour couvrir les paroles de Cal.
Après ces "formules de politesses", le taxi disparut de leur champ de vision et l'expert en mensonge relâcha enfin toute l'air qu'il avait retenu depuis qu'Elizabeth était rentrée chez eux.
Gillian leva ses yeux au ciel puis l'interrogea sur un ton intéressée :
— Au fait Cal ! Le gâteau c'est vraiment les enfants qui l'ont choisi ou c'est toi ?! Parce que tu as souri tout le long en mangeant ta part !
Le regard de Cal passa de droite à gauche et marmonna :
— Je ne vois pas du tout de quoi tu veux parler…
— J'y crois pas, tu…
Elle n'eut pas le temps de finir sa phrase que Seth s'interposa dans la conversation des deux parents.
— Papa ! Tu peux me dire ce que ça veut dire "salop" maintenant ! s'exaspéra le petit dernier face à son père. Au regard furieux de sa femme, Cal ordonna rapidement :
— Heu… rentres à la maison Seth on verra ça plus tard !
— Mais c'est aussi ce que tu m'avais dit tout à l'heure ! bredouilla t-il agacé.
— Ne discutes pas Seth !
Le petit garçon émit une petite moue mécontente et rentra avec ses deux soeurs dans leur maison. Un silence se propagea entre les deux experts en mensonge lorsque Gillian demanda de but en blanc à son mari :
— C'est quoi cette histoire de "salop"?!
— Tu sais que tu es rayonnante aujourd'hui ma chérie ! Pas que tu ne l'es pas tous les jours mais…, minauda Cal avec des mouvements évasifs de ses mains.
— Cal ! s'énerva t-elle de sa piètre manière de faire des digressions.
— Oh ! Attends je crois qu'on m'appelle là ! clama t-il subitement en sortant son téléphone portable de sa poche. Il se dirigea vers la maison suivit de près par son épouse irritée. — C'est Loker ! Il a encore dû faire une idiotie le connaissant !
— Caaal je sais que tu mens ! Loker est malade! Il m'a dit qu'il ne serait pas là de toute la semaine ! s'écria la jeune femme derrière lui.
— Allo ? continua l'homme dans son délire en collant l'appareil contre son oreille.
— CAAAL !
FIN*
Morale de l'histoire : Même si vous n'aimez pas une personne soyez le plus gentil possible ! Ça énerve encore plus !